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Critiques de Charles Masson (125)
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Sept vies à vivre

Notre jeune héros René perd ses 7 frères et soeurs alors qu'il n'a que 7 ans. Il va vouloir prendre une revanche sur l'existence en menant 7 vies à vivre malgré les drames qui le touchent. Perdre des êtres chers de sa famille est incontestablement une épreuve très difficile qui laisse des traces psychologiques.



Il y aura le service militaire à accomplir au Maroc qui ne se passera pas aussi bien qu'espéré, puis le retour à la ferme familiale dans une existence assez pauvre dans une triste réalité.



Bref, on ne va pas s'ennuyer avec ce singulier personnage qui n'arrête pas d'aider les autres sans être toutefois un héros. Ce type ordinaire pourrait très bien être quelqu'un de notre entourage, le français moyen avec ses qualités entre attachement et sincérité et ses défauts entre faiblesse et fragilité.



Pour ma part, je ne connaissais pas le massif des Bauges en Savoie où se déroule ce récit principalement. C'est dans le contrefort des Alpes dans une région montagneuse difficile d'accès qui a rarement été conquises aux contraires des vallées environnantes. Ainsi, les allemands prendront finalement possession que vers mi-1944 c'est à dire à la fin de la guerre.



On va suivre surtout sa relation particulière avec son amour de jeunesse qui n'a pas pu se concrétiser suite à des destins séparés. Parfois, il vaut mieux écouter son coeur. Mais bon, tout n'est pas perdu. René arrive à se relever à chaque fois malgré les épreuves.



L'auteur a choisi un découpage autour de ses 7 vies. En réalité, il n'y en a qu'une seule mais qui se décline en phase selon les âges et les épreuves traversées. La plus terrible sera sans doute celle de la guerre avec l'occupation allemande qui pourchassait les résistants dans ces endroits montagneux où se cachaient également des familles juives voulant échapper aux rafles menés par le gouvernement de Pétain.



C'est vrai que je n'ai pas tout de site compris cette histoire de croix en bois qui sont piétinés dans le cimeterre. Visiblement, la Seconde Guerre Mondiale a laissé des cicatrices douloureuses pour les familles de ces patelins.



J'ai également eu une confusion avec école qui est en fait le nom du village où s'est produite la terrible fusillade de représailles. On verra à la fin que beaucoup de choses sont reliés entre elles comme un puzzle mais qui ne s'assemble qu'à la toute fin. Je peux évidemment parler d'une véritable maîtrise dans le scénario.



A noter qu'il y aura également une réflexion assez intéressante sur le colonialisme, l'occupation, l'impérialisme mais également sur notre rapport avec les étrangers. C'est le genre de BD à lire mais tout en prenant le temps de la comprendre.



Je tiens à remercier l'éditeur Delcourt ainsi que Babélio de m'avoir permis de découvrir ce titre dans le cadre d'une masse critique. J'avais découvert l'auteur Charles Masson il y a bien longtemps en 2003 lors de la sortie de « Soupe froide » qui m'avait beaucoup plu dans un ton sobre et juste. Je dois également reconnaître que l'auteur a énormément progressé au niveau d'un graphisme devenu bien plus avenant.



Sept vies à vivre est incontestablement une bonne leçon de vie à nous donner !

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Sept vies à vivre

Un grand merci à Babelio et aux éditions Delcourt...



C'est dans le massif inhospitalier des Bauges, à École, loin de la vallée, que se sont installés, depuis des générations, les ancêtres de René. Sans électricité, sans eau courante, sans médecin pour accourir au chevet des patients, les conditions de vie étaient précaires. Sur les neufs enfants que la mère de René mit au monde, seuls deux survivront. René, lui, est un bon gaillard de bonne constitution. Tout comme sa mère, une femme forte qui porte le pantalon tandis que son père, menuisier, est petit et tout sec. Au cœur de la nature, le petit garçon s'épanouit malgré la misère et la faim qui le tenaille parfois. D'une nature optimiste, René s'est juré de vivre pleinement, de vivre sept vies en mémoire de ses frères et sœurs décédés...



De sa naissance, en avril 1927, à un âge bien avancé, l'on suit le parcours de René. Son enfance, dans des conditions difficiles, dans les Bauges ; son service militaire au Maroc où il prendra conscience du colonialisme et du racisme ; ses amitiés avec des résistants qu'il est le premier à aider ; son amour de jeunesse qu'il n'oubliera jamais et le hantera des années durant ; le lien indéfectible avec sa petite sœur. Et les drames, bien sûr, qui jalonneront sa vie. Pour autant, René, de par sa bonhomie, son enjouement, son caractère optimiste et nonchalant, saura traverser les épreuves de la vie. Avec ce personnage terriblement attachant, Charles Masson dépeint, avec tendresse, une vie d'une simplicité et authenticité rares. Une vie de tragédies, de petits bonheurs, de grande joie que René saisira toujours à bras le corps. Un album réconfortant, un brin nostalgique, qui fleure bon le temps qui passe d'autant que, graphiquement, le dessin pixélisé et les couleurs tranchées rappellent ceux des anciens albums.

Un album touchant...

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Sept vies à vivre

On ne peut pas dire que René ait eu une vie extraordinaire, il est né dans un village montagnard du massif des Bauges en Savoie , l'a quitté pour la vallée, est parti faire son service militaire au Maroc et est revenu au point de départ.

Pourquoi « sept» vies alors ?

Parce que le petit garçon a perdu ses sept frères et sœurs alors qu'il n'a que sept ans et qu'il va vouloir vivre « sept vies » pour eux...

De petit garçon sauvage et quasi illettré, il va devenir un jeune homme plutôt séduisant qui va participer au maquis pendant la guerre , il va rencontrer l'amour de sa vie au service militaire, mais le destin ne va pas les réunir tout de suite, il va revenir et mener une vie un peu chaotique parsemé de drames.

C'est une existence à la fois simple et héroïque que nous raconte Charles Masson, celle d'un paysan/monsieur toutlemonde, ballotté par la vie.

Un graphisme faussement naïf et à l'aspect colorisé donne de la distance et de l'humour à ce récit touchant et « rétro ».



Merci à Babelio/Masse critique et Delcourt.

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Soupe froide

Roger est un SDF. Atteint d'un cancer, il est actuellement en maison de convalescence. Mais, ce soir, à cause d'une infirmière qui lui a servi une soupe froide, il s'est enfui. Une soupe froide ! Même les chiens, on leur porte plus d'attention ! Tout le monde s'en fout des clochards ! Vêtu d'un simple pyjama, ses pauvres pantoufles ayant vite rendu l'âme, le froid, la neige qui se met bientôt à tomber et le vent lui glacent le sang. Mais, il faut vite sortir de cette forêt. Ne surtout pas s'arrêter s'il ne veut pas mourir gelé. Alors qu'il tente de rejoindre la ville, il repense à cette infirmière, à sa femme qui a refait sa vie, à sa fille qu'il ne voit plus. Comment en est-il arrivé là ?



Inspiré d'un fait divers véridique, Charles Masson, médecin ORL, donne la parole à Roger, cet homme qui avant de devenir clochard, avait une vie somme toute presque normale. Et on l'écoute nous raconter ses souvenirs, parfois décousus, et sa descente aux enfers. L'on compatit évidemment et l'on se prend d'affection pour cet homme devant lutter contre le froid et la faim. Tout ça à cause d'une soupe servie froide... Même si le propos est louable, empli de justesse et jamais larmoyant, l'ensemble manque parfois de profondeur et cette voix-off est trop répétitive. le trait hachuré et brut manque de finesse mais sied, tout comme le noir et blanc, au tragique de cette histoire.



Tout ça à cause d'une Soupe froide !
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Sept vies à vivre

Le massif des Bauges est le cadre dans lequel René nait et va vivre une très grande partie de sa vie.

Les 7 vies vont être les 7 grands moments de son existence qui seront toujours, non pas exceptionnels mais des périodes de la vie où René mettra son courage, sa force, son amour pour les autres.

C'est le gars que l'on veut avoir comme copain, celui avec qui il est bon de partager des petites tranches de vie.

Ces 7 cette vie sont aussi les 7 vies de ses frères et sœurs pour qui il vit. La perte très jeune de ses frères et sœurs en bas âge va le marquer à vie. Il va communiquer avec eux, vivre pour eux et partager ses moments. Cela est touchant et les dessins chaleureux renforcent ce sentiment de proximité.

Cette BD pleine d'humanité ne fait pas d'esbroufes, elle montre le quotidien des paysans, des personnes pauvres, isolées. Comment ne pas tomber sous le charme de ce Rener avec sa chemise à carreaux, enfourchant sa mobylette ?

Tout est dans la simplicité mais aussi dans la sincérité, l'authenticité et l'altruisme. Alors oui on tombe sous le charme.

Le dessin que je ne sais pas comment décrire, m'a d'emblée plu. Il me rappelle, comme l'a justement dit Visages, les albums de Sylvain et Sylvette. Ces dessins capturent l'essence de la nature et du monde rural avec des personnages expressifs et des paysages pittoresques.

J'aime beaucoup. Album nostalgique et touchant.
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Sept vies à vivre

Roger est né en 1926 dans le massif alpin des Bauges, « le pays de ceux qui n'ont rien. »

Sur les neuf enfants de sa fratrie, sept sont décédés en bas âge. Ces petits fantômes ne cesseront de l'accompagner, lui qui restera à jamais leur 'grand frère'. Roger vivra pour eux, "sept vies" - et l'auteur a l'idée touchante de découper son existence en autant de périodes jalonnées de drames universels (les guerres) et intimes.

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J'ai reçu hier ce bel album, l'ai commencé aussitôt et lu d'une traite.

Effet madeleine de Proust avec le graphisme : les couleurs de peau & de cheveux des personnages sont faites de petits points (nos actuels 'pixels') comme dans les oeuvres de Roy Lichtenstein et les vieux comics & dessins de publicités dont l'artiste s'inspirait.

Les teintes pâles, le trait, les décors bucoliques, les vêtements... tout cela m'a replongée dans l'ambiance des vieux magazines 'Lisette' et 'Fillette' qu'on trouvait chez mes grands-parents. L'époque est la même puisque René a traversé le 20e siècle.

A tel point que j'ai pris l'auteur pour un 'vieux rural'. Non, Charles Masson est "jeune" - né en 1968, comme moi - et médecin ORL.

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Je les ai tout de suite aimés, René & ses proches, tant ils ressemblent à des gens de ma famille, qui ont vécu à la campagne dans des conditions à peine moins rudes (climat plus clément).

Cette histoire m'a également rappelé le très beau film d'animation 'Interdit aux chiens et aux Italiens' (Alain Ughetto, 2022). Les vies y ressemblent à celles de mes grands-parents et à la jeunesse de mes parents. Ça ne fait pas si longtemps puisque je garde bien en tête leurs souvenirs... et tout était pourtant si différent de notre quotidien, de nos préoccupations.

Bref, mon petit coeur tout mou a fondu, hier, et j'ai été particulièrement touchée par la fin (les croix...).

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Un très grand merci à Babelio et Delcourt/Mirages pour cette MCS.
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Salles d'attente

Il y a plusieurs catégories de bandes dessinées. Celle-ci, avec ses 450 pages, est un double monstre.

En masse et en volume d’abord : si vous lisez couché, vous risquez la tendinite ou l'accident si vous flanchez.

En densité émotionnelle ensuite. le gars est docteur dessinateur. Double métier assez rare et pas enseigné tel quel.

Ce pavé est donc une compilation et on voit l'évolution du trait, qui s'affine, s'améliore... Pour l'humanisme, par contre, pas de reniement, de perte de sens. L'âge n'a pas engendré chez lui la floraison de ce "réalisme" pris à tort pour de la sagesse chez les anciens idéalistes devenus de vieux réactionnaires.

Justesse de ton, justesse de trait.

La dernière histoire est sans doute la plus politique. On y aborde tous les thèmes précédents sous forme de transmission à sa fille.

Faites comme moi, lisez le et selon, transmettez-le à votre fille. Ou à votre fils si vous en avez un.
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Sept vies à vivre

Voici un bel objet au format original, 20 cm sur 16 cm. On dirait un manuel scolaire, pour écoles publiques et privées sous contrat (décidément quel mauvais esprit).

La couverture donne envie de s'y plonger, un bonhomme d'un certain âge avec un truc ressemblant à la moustache d'un certain Adolf (Tiens, toujours pas revenu à la mode ce prénom?).

A le feuilleter, on apprécie la qualité du papier, même si l'on sait qu'il a été imprimé en Belgique, rien n'est parfait.

Le dessin est appliqué et la mise en couleur est originale, c'est une sorte de pointillisme parsemé d’aplats de couleurs qui ressortent. L'ensemble est très esthétique, c'est réussi.

Sept vies, qu'est-ce à dire? Dès le début de l'histoire, on nous l'apprend, ce n'est pas une bande dessinée à suspense : il s'agit des morts, des frères et sœurs défunts du héros. Il doit vivre pour l'ensemble de la fratrie qui l'accompagne comme les chœurs des tragédies grecques commentant l'action dramatique.

On va donc voir notre René parcourir à vélomoteur ses souvenirs, alors qu'en parallèle, nous aurons le droit à la lecture du journal intime de Céline, son homard (référence non culturelle à une série culte étasunienne).

Sa vie dans les montagnes près du village d’École (tiens! le format! ) en Savoie, célèbre pour le martyre qu'il a subi le 6 juillet 1944 de la part des soldats allemands va nous être racontée en sept chapitres.

Pour le final, je n'irai pas plus loin même si on peut le deviner...

Le seul bémol que je pourrais apporter à ce très sympathique ouvrage est la tendance, somme toute naturelle, à glisser, peut être inconsciemment, des éléments caractéristiques de la bonne morale contemporaine dans le fil narratif. Un exemple : il y a un réfugié Ukrainien qui n'aime pas les soviétiques... Il y a aussi plein de petites leçons de morale d'anti-racisme disséminées ici et là dans les dialogues. Pour être sûr que le lecteur reçoive sa dose.

Donc, pour cela, je crois que c'est une bande dessinée à vocation éducative pour les plus jeunes (les plus vieux n'ont pas besoin qu'on leur explique ce qu'ils lisent) qui pourront trouver un réel plaisir à suivre la vie simple et représentative des mœurs françaises évoluant avec le temps. C'est déjà une belle réussite et je remercie sincèrement les éditions Soleil et Babelio de m'avoir permis de parcourir le massif des Bauges en compagnie de ce sympathique optimiste qu'est René.

Une lecture humaniste belle et rafraîchissante.





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La dernière femme

Road movie pitoyable d'un quinquagénaire adipeux et lourdingue. Déprimé, shooté aux pilules qui rigolent, le comptable Albert quitte le nord de l'Allemagne pour Lyon. Afin de se sentir moins seul, il embarque dans sa Jaguar MK2 le jeune Al aussi inexistant qu'idéaliste. Non Al n'est pas un fantôme. Al c'est Albert dégraissé et jeunot.



Comme je tente un challenge ABC pour diminuer ma pile de livres en attente en cet an de grâce 2013, Albert a tenté de piloter sa vie en séduisant 26 femmes dans l'ordre alphabétique. Au moment où Al prête une oreille aussi attentive qu'excédée et fictive au monologue gras de son avenir, la lettre Z est en suspens. Le Y est resté en Allemagne avec un marin plus appétissant après avoir ratissé les comptes du comptable.

A comme Annie et cette première fois où il n'eut le temps que de compter jusqu'à deux. B comme Barbara, C comme Chantal… Q comme Qunégonde (il y a tricherie mais j'ai fait passer la lettre X de mon challenge sous le couvert d'Anonyme; ce n'est guère mieux).



Charles Masson égrène quelques façons de gros con de rater sa vie sentimentalo-sexuelle qu'il s'agisse d'investissement affectif (Albert est comptable, il rentabilise) ou de plans cul. A soviétiser son existence, on la rate sans moyen d'y remédier. Bien fait!

Moi, je lui aurais bien éclaté la tête au comptable malgré quelques pâles velléités morales.

Le regret colérique (en raison du Y récalcitrant) ne le rend guère plus sympathique. Pourtant son épanchement soutenu se lit avec plaisir à défaut d'empathie. L'anecdote érotique croustille comme du bacon frit (poétique non? Je me mets au diapason). Le clin d'oeil promotionnel de Masson à son Droit du sol est charmant. Le cynisme distillé avec parcimonie se savoure. C'est enlevé, amusant parce qu'agaçant.

La bourgeoisie lamentable de cet amant détestable a un côté jubilatoire.
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Sept vies à vivre

Je vous sens tous impatients et impatientes de faire la connaissance de René, cet homme bonhomme au nez pointu et à la moustache-sparadrap, cet homme trônant sur une mobylette bleu-ciel, la cravate et le sourire au vent.

Si le nombre sept est un nombre merveilleux, dans les contes ou les croyances populaires, il peut aussi être maléfique. Charles Masson l’a choisi pour découper l’existence de son héros avec le souci d’attribuer une vie à chacun des frères et sœurs de René morts en bas âge.

Le XXème siècle a atteint sa majorité depuis quelques années lorsque René naît dans le massif des Bauges. Sa famille vit dans le dénuement total, dans une maisonnette isolée et délabrée. C’est un gaillard solide, enthousiaste, généreux et optimiste. René vit entouré de la présence de ses frères et sœurs disparues, il leur parle, ils lui répondent et l’encouragent. René est drôle et sémillant pour sept. Il est heureux de son sort, né en haut des montagnes et en bas de l’échelle sociale, se hisser de quelques barreaux, pour ne plus jamais avoir faim, lui suffit.

Traversée par les pétarades de la mobylette vintage et les saluts souriants du conducteur, la bande dessinée déplie les différentes étapes de la vie de René. Le petit sauvageon qui se cache dans les bois deviendra amoureux, aidera les maquisards, découvrira le racisme ordinaire lors de son service au Maroc, affrontera des deuils intimes et s’illuminera en présence de sa petite sœur puis de ses neveux.

Charles Masson fait vivre René sous des traits et des couleurs de l’autre siècle. Sept vies à vivre est à déguster sans presse pour apprécier les ciels changeants qui teignent ce gars généreux, drôle, pacifique et un peu naïf.

C’est une histoire attendrissante et touchante autant par sa simplicité que par ses drames.

Merci à Babelio/Masse critique et les éditions Delcourt.



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Sept vies à vivre

Voici mon retour de lecture sur le roman graphique Sept vies à vivre de Charles Masson.

1939. René a 13 ans, il vit isolé avec ses parents dans le massif des Bauges. Après la perte de ses sept frères et sœurs en bas âge, il ressent le besoin de vivre pour eux.

De son service militaire à son retour à la ferme familiale, du deuil de ses proches aux retrouvailles avec son amour de jeunesse, les sept vies que mène René mêlent le drame à la simplicité d'une existence dédiée aux autres.

Sept vies à vivre est un roman graphique que j'ai pris plaisir à lire d'une traite.

René vit dans le massif des Bauges avec ses parents. En 1939, il n'a que 13 ans quand éclate la seconde guerre mondiale.

Le jeune garçon est tout à fait ordinaire, mais ses sept frères et sœurs sont morts quand il n'avait que 7 ans. Alors, René a décidé de vivre sept vies, pour eux.

Des vies qui ne sont pas extraordinaires, mais sept chapitres qui nous dévoilent les moments forts de la vie de René.

Il est plutôt beau garçon le René, il va tomber amoureux mais ne fera pas sa vie avec elle. Quoi que, parfois le destin est taquin même au bout de nombreuses années ;)

Nous le suivons pendant la seconde guerre mondiale, pendant son service militaire en Algérie, dans son quotidien avec ses parents..

Il grandit, il vieillit, comme tout le monde :) Et j'ai aimé le suivre tout au long de ses années qui filent à toute vitesse.

J'ai eu un peu de mal avec les dessins au début, c'est un peu naïf, pas tout à fait avec ce que j'accroche au premier abord. Et puis, je m'y suis fait et je trouve que ça colle parfaitement avec le scénario.

Sept vies à vivre est un bon roman graphique que je vous invite à découvrir et note quatre étoiles :)

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Sept vies à vivre

René et un petit montagnard des Bauges. Quand je dis petit,c'est par affection car en réalité c'est un sacré bon gaillard qui a su s'accrocher à la vie,acceptant la faim comme compagne permanente de son enfance. Ses sept petits frères et sœurs n'ont pas eu cette force,alors,raison de plus pour vivre! Il se devait de vivre pour sept! Les petits fantômes seront toujours présents à ses côtés. Et puis,la pauvreté n'est pas synonyme de tristesse pour René car il adore galoper dans la nature,et plus encore faire rire,distribuer la joie, prendre soin des autres. École, c'est son univers,un Havre de paix où il a grandi, là où le monde est venu à lui y compris son grand amour. Ce lieu c'est celui que le peuple a choisi depuis le haut moyen âge pour échapper aux diverses invasions, préférant une vie rude,au risque d'être agressé en demeurant dans les vallées. René va devoir quitter cet univers mais ce sera toujours parce que les événements politiques le lui imposeront. Il traverse avec bonhomie les épreuves car il reste toujours fidèle à lui-même. Il aura cependant une sombre traversée que Charles Masson décide d'accompagner par des pages au fond noir...Mais lorsqu'on a le devoir de vivre pour sept,on a pas le choix que de sortir du tunnel!

Cet album est doux,réconfortant,et il m'a replongé dans mon enfance par son ambiance, ses objets,et ses dessins qui m'ont vraiment rappelé les bd que je feuilletais enfant,comme Sylvain et Sylvestre. Des dessins simples mais très expressifs,avec pleins de détails champêtres.

Quelle chance j'ai eu d'être sélectionnée par une masse critique privilégiée ! Merci babelio et merci les Éditions Delcourt/Mirages !

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Droit du sol

Mayotte et son statut de Département d'Outre Mer en cours (nous sommes en 2009), ses expatriés français, ses autochtones mahorais, ses clandestins comoriens.

Mayotte au crible du social et non carte postale de vacances réussies avec lagon, crabes, soleil. Pourtant y a du soleil et des nanas darladiladada… Et on s'en met jusque là de ces cinglants portraits au travers desquels Charles Masson échographie l'Île.



Ah le gérant du magasin SFR! Des claques!!! Que dis-je des claques? Un uppercut, un coup de pied dans les parties et dans son romantisme collégien ridicule étalé dans un journal intime (on le plaint le papier!). L'as de la bêtise, le Dieu de la complaisance pétainiste, le gratin de l'humain que l'on ne voudrait jamais côtoyer, lui qui se paye une histoire d'amour autochtone en cautionnant (dans le sirop) les pires injustices.



Le médecin dont la vie amoureuse hésitante s'écartèle entre île et métropole, par paresse, veulerie. Pas méchant dans le fond. Mais dont les actes parlent et ne disent aucun bien.



Le carré indispensable des femmes d'expatriés habitées par les muses. Peinture, sculpture, cuisine, broderie. Manque le macramé.

La sage femme qui arrive pleine de foi dans sa mission et va se heurter à une administration obtuse. Sans renoncer.



Les cons divers mais pas variés. Le bientôt retraité qui veut épouser la bientôt bachelière pour aider. Le cul, c'est une oeuvre de charité. L'adipeux qui craint la mise en place du RSA. Ben oui, si elles ont le RSA, elles seront plus difficiles à b… les autochtones, non?



L'exploitation sexuelle généralisée est aussi généralisée que le racisme ambiant.

Entre blancs et noirs. Entre Mahorais et Comoriens. Entre celui qui a et celui qui a moins ou n'a pas. Entre celui qui a moins et celui qui n'a rien. Celui qui n'a rien c'est ce clandestin en quête du paradis français où l'herbe ne sera pas plus verte mais qui espère mieux que ses Comores affamées. Qui débarque (ou se noie) chaque nuit.



Droit du sol c'est la dénonciation d'une France qui, en proposant un statut, exclut mieux et plus fort. Désormais, il convient d'expulser. Ce roman graphique n'est pas un prêchi-prêcha mais un témoignage qui s'achève dans l'apothéose d'une horreur ordinaire.



Monsieur Masson, si vous n'existiez pas je voudrais qu'on vous inventât.

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Sept vies à vivre

Mais oui, c'est René, cet homme souriant, que l'on découvre au centre de la couverture de Sept vies à vivre, c'est bien lui au volant d'une mobylette pétaradante, alors que sept dessins en demi-teinte illustrent son histoire...



René est venu au monde en 1926 ans dans le massif des Bauges, en Savoie, dans une famille d'une grande pauvreté vivant en quasi autarcie. Il a vu disparaître de maladie ses sept petits frères et soeurs - maladies bénignes que ses parents ne savaient pas soigner. René a voulu, comme les chats, vivre sept vies...Rendre hommage aux petits disparus, à sa manière, en vivant pour sept, en prenant la vie telle qu'elle venait, en aidant les autres à supporter la leur.



Sept vies à vivre nous dépeint le quotidien d'un homme qui a connu très jeune le malheur ; à l'adolescence ses parents ont échappé de peu aux nazis ; des nazis qui, en juillet 1944 ont perquisitionné son village Ecole, fusillé douze habitants avant de mettre le feu aux maisons...

Puis c'est le temps du service militaire au Maroc, et d'une grave blessure, le retour en France à une vie des plus ordinaires....



Vraiment ordinaire ? René peut-il oublier son été 44, la rencontre avec Céline, une jeune fille venue réviser son bac en Savoie ? Céline, retrouvée en 1947 qui lui a appris à jouer au scrabble. Mais Céline va se marier à un autre....



Au scrabble, comme le dit notre héros, il y a des noms, comme René, qui ne comptent que quatre points - mais Céline ajoute qu'amour en compte déjà sept ...

Et au scrabble, il y a des vies qui peuvent, sur le tard, valoir double, voire triple.... surtout lorsqu'on retrouve ses 17 ans dans les yeux d'un amour de jeunesse.



Une BD qui n'a pas recours à de grands effets graphiques, mais qui fourmille d'inventions : René tient des conversations suivies avec ses petits frères et soeurs, représentés en blanc, dans un petit halo hachuré, petits fantômes qui l'encouragent et le questionnent tout au long de sa vie... le journal de Céline, sur fond jaune, apporte une grande fraîcheur au récit et offre une autre perspective, plus intime.



Après avoir vécu la vie des autres, René va pouvoir enfin commencer à vivre la sienne !



Une lecture originale, pleine d'humanité. Une belle découverte.



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Sept vies à vivre

René, 7 ans, est le seul enfant survivant de ses parents, ses sept petits frères et soeurs sont tous morts en bas âge.

Sa famille habite dans le massif des Bauges, en Savoie, dans une petite ferme isolée.

Né dans les années 20, nous allons suivre la vie de René, de son enfance jusqu'à sa vieillesse, une vie simple mais riche d'enseignements.

Bien que pauvre, René tentera toute sa vie durant de faire vivre sa famille.

Il profitera de chaque occasion pour croquer la vie à pleines dents, afin de rendre hommage à ses frères et soeurs disparus trop tôt.

J'ai beaucoup aimé le dessin et les couleurs qui donnent une touche ancienne à cette bande dessinée, on croirait feuilleter un vieux livre datant de l'époque de nos grands-parents.

J'ai apprécié le découpage de la vie de René en 7 parties, comme les vies qu'auraient pu mener ses petits frères et soeurs, et qui représentent toutes des étapes importantes dans la vie de René.

Les thèmes abordés sont nombreux : le deuil, le racisme, la guerre, les résistants, le colonialisme, la nature, la dignité malgré la pauvreté, le sens du travail bien fait, l'éducation, sans oublier l'amour.

J'ai été très touchée par cet homme simple, qui n'a pas beaucoup été à l'école, qui a été confronté très vite à des drames et qui toute sa vie a tenté de mener une existence honnête.

Malgré de nombreux aléas, René ira toujours de l'avant, sans pour autant écraser les autres, et tentera d'avoir lui aussi sa part de bonheur.

Une bande dessinée vraiment plaisante, surannée, et très touchante.

Je remercie Babelio et les éditions Delcourt pour cet envoi.
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Droit du sol

Charles Masson s'est servi de son expérience de médecin ORL dans "les îles" pour témoigner de la misère sociale qu'il y a vu.



Avec quelques destins croisés de personnages fraichement débarqués de métropole, ou non, il nous montre, sans fard, l'arrière du décor sur l'île de Mayotte. Et chacun en prend pour son grade, du vieux lubrique aux gentils médecins philanthropes en passant par des marginaux qui voulait décrocher de l'héroïne.



L'auteur nous parle aussi des clandestins qui cherchent à tout prix à y arriver dans l'espoir d'une vie meilleure, mais à quel prix , ....

Bien sûr, tous les lieux communs sur leur fainéantise et leur statut de profiteur y passent !

Les lois et les mesures sur les expulsions passées sous notre précédent gouvernement prend un visage humain.



Ce que j'ai surtout aimé, c'est le portrait sans complaisance qu'il fait des expatriés français, qui, il faut bien l'admettre sont absolument insupportables - plein de suffisance, de mépris pour les autochtones et chauvins à outrance !!!

(mais pas d'inquiétude, les travers des mahorais y passent aussi !)



Une BD qui fait réagir, ou du moins qui ne peut pas laisser son lecteur indifférent.
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Sept vies à vivre

Quel plaisir j’ai eu à lire ce livre. Je suis particulièrement content d’avoir participé à cette masse critique spéciale de Babelio et d’avoir reçu ce livre des éditions Delcourt.



Tout d’abord quelques mots sur le côté esthétique : le dessin, la couleur et le grain sont à l’ancienne, ça sent bon les bd de mon enfance. Il y a du Bob et bobette, du Jo et Zette et bien d’autres classiques dans l’ouvrage de Charles Masson.



Le scénario ensuite m’a beaucoup plus. L’histoire est bien tenue du début à la fin, il y a un rythme et une dynamique constante. Il y a un bel équilibre et un bon mélange d’humour, de bonne humeur, d’émotions et de dureté, un beau résumé de la vie en fait. Je n’ai pas eu envie une seule fois de reposer ce livre. Je ne connaissais pas Charles Masson, mais je vais regarder de plus près le reste de sa production.



Nous suivons donc René tout au long de sa vie. Il est issu des Bauges, une région dure parmi les dures. Il nait dans les années 20 et est issu d’une famille de 9 enfants dont seulement deux survivront. Dans sa famille, on a que le strict minimum et on s’en contente. Il n’est pas malheureux pour autant, ses parents sont aimants et présents. Il sait très tôt qu’il est un survivant et il décide qu’il doit vivre pour ses 7 frères et sœurs morts en bas âge. De ce fait, il croque la vie à pleines dents, savoure tout et ne se plaint jamais. Il est toujours prêt à rendre service et à découvrir la vie dans ses montagnes et ailleurs.

Et puis la Deuxième Guerre mondiale survient, avec son lot de belles rencontres comme Céline et certains résistants et son lot de tragédies. Au sortir de ces années noires, il partira en Afrique faire son service militaire.

La vie va passer avec son lot de bons moments et de drames. Ces derniers au fil des années lui sembleront peut-être parfois prendre le dessus. Mais il se doit de vivre, il l’a promis aux 7 autres qui n’ont pas eu sa chance.

Mais la vie est ainsi faite qu’elle peut parfois réserver son lot de surprises et de rebondissements. René a peut-être eu raison de ne jamais complètement baisser les bras… 😉



L’histoire de René m’a particulièrement touché. Je l’ai trouvé sensible et très belle et j’ai refermé ce livre en ayant envie de rencontré René dans sa montagne et de partager un verre et une belle discussion avec lui. Dommage, c’est un personnage de fiction. Mais des René, à cette époque et sans doute encore de nos jours, il y en a un peu partout.





Pour ne rien gâcher, c’est un très bel objet, une belle couverture en relief, plus de 200 pages agréables à lire. Franchement, un livre que je vais avoir plaisir à mettre dans ma bibliothèque et à recommander.



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Droit du sol

Mayotte. Petit territoire français perdu au large des côtes africaines, au nord de Madagascar. Île paradisiaque ? C’est ce que pensent les centaines de Malgaches, de Comoriens et d’Anjouanais qui tentent, chaque mois, de rejoindre les côtes de l’île aux parfums. Au risque de leur vie, ils s’entassent dans des kwassas, barques rudimentaires qui peuvent se retourner ou s’échouer sur les platiers qui entourent l’île. Mais tout vaut mieux que la vie de misère qu’ils ont dans les autres îles de l’océan Indien. Et tant pis si les autorités françaises les rattrapent et les renvoient chez eux : ils rassembleront encore tout l’argent possible pour se payer une traversée vers l’El Dorado français. Parmi eux, il y a des femmes qui sont prêtent à tout pour accoucher en terre française, pour que leurs enfants bénéficient du droit du sol et, peut-être, d’une chance de vivre mieux que leurs parents.



Pour Danièle, sage-femme fraîchement débarquée de métropole, Mayotte est pleine de beautés. Même sa saleté et son manque d’organisation la charment. Enfin, Danièle va exercer auprès de populations qui ont vraiment besoin d’elles. Enfin, son travail aura du sens. Et l’accueil qu’elle reçoit est bien plus chaleureux que celui qui attend les malheureux qui débarquent de nuit. « C’est quand même merveilleux d’être accueillie sur une île par des types qui pêchent dans un lagon et vous font coucou. » (p.11)



Il y a d’autres métropolitains sur l’île, comme ce philosophe qui a fui Paris pour échapper à la drogue et qu’une belle Mahoraise a pris dans ses filets, entre amour vache et vache à lait. Il y a Serge, vendeur en téléphonie mobile, grand romantique qui cherche le grand amour et qui a des idées très nettes sur ce qu’il faut faire pour endiguer le flot de clandestins qui essayent de rejoindre l’île. « Ah, les rigolos, ils sont censés arrêter les clandestins qui arrivent par la mer […] Et toutes les gendarmeries sont dans les terres, loin des plages, avec les fenêtres orientées vers la forêt… Ils surveillent les lémuriens. Ouais ! Belle efficacité, la gendarmerie française ! » (p. 119) Il y a Pierre, médecin volontaire en pleine quête existentielle. Mayotte accueillerait-elle ceux que l’Hexagone ne juge plus dignes de lui ? « Il est vrai que trop de personnes ici ne pouvaient plus être ailleurs, tant ils sont désocialisés… Ce sont des gens dont plus personne ne veut en métropole ! » (p. 157) Où s’arrête donc le paradis mahorais et où commence l’enfer ?



On suit les destins de ces Blancs sur plusieurs chapitres. Perdus dans une communauté composée à 99 % de Noirs, ils vivent pour la plupart repliés dans la sécurité relative de la communauté d’expatriés, pour échapper à la violence et aux vols. Ces « mouzoungous », ou étrangers, sont tous aussi français que les Mahorais, mais l’intégration semble impossible en raison des différences culturelles, religieuses et économiques entre Blancs et Noirs. Et pourtant, il y a des rapprochements entre eux : ce sont surtout de belles et très jeunes Mahoraises qui cherchent des Blancs pour les faire vivre. Attention, il ne s’agit pas de faire entretenir, mais bien de survivre dans une île où tout coûte très cher en raison des taxes et des frais d’importation. Alors, quand un Blanc passe, même s’il est vieux, laid ou gros, les Mahoraises sont prêtes à l’aimer.



Dans ce très beau roman graphique, Charles Masson se garde bien de choisir un camp ou de donner raison à une population plutôt qu’à une autre. Mayotte est française, la plus africaine des îles françaises, avec ce que cela suppose de pauvreté, de corruption et de retard de développement. Sans complaisance, l’auteur évoque la politique métropolitaine à l’égard de ce petit caillou qui flotte dans les eaux de l’océan Indien. Mayotte a refusé l’indépendance en 1974, au contraire des Comores : elle est française et elle attend que l’État la reconnaisse pleinement comme telle.



Que dire des clandestins qui tournent leurs espoirs vers Mayotte ? N’ont-ils pas raison de vouloir échapper à la misère dans laquelle ils ont été plongés après l’indépendance ? Ce n’est pas l’avis de nombreux métropolitains expatriés qui s’étonnent que la France soit encore vue comme une terre d’asile. « La gabegie doit s’arrêter : les illégaux doivent comprendre que cette île peut vivre sans eux. » (p. 280) Mais eux, peuvent-ils vivre sans elle ? La fin du roman graphique déchire le cœur, coupe le souffle et retourne les tripes. On a envie de gerber sur l’injustice, parce que crever sous les tropiques, dans une eau fabuleusement bleue, c’est toujours crever.



Le dessin n’est que noir et blanc. Ce minimalisme s’accorde à merveille à la rapidité du trait. Chaque image semble croquée à toute allure : pas le temps de raffiner, il y a trop à dire et trop à montrer. Et on tourne les pages de ce roman graphique avec une émotion avide, impatiente. Non, Charles Masson ne nous envoie pas une carte postale de Mayotte, mais plutôt le négatif de la carte postale, l’envers du décor. Mayotte, ce n’est pas que les plages de sable noir, les lémuriens aux mimiques adorables ou les tenues bigarrées des Mahoraises.



Quelle émotion de reconnaître cette île sous la plume de Charles Masson ! Les questions et les sujets qu’il soulève, je les ai vus, vécus ou approchés. Les bons souvenirs sont revenus, les mauvais aussi. Le droit du sol est une notion que je connais, mais que je ne comprends pas, n’ayant pas eu à me battre pour obtenir la nationalité française. Droit du sol n’est pas un pamphlet antigouvernemental, c’est un plaidoyer en faveur de ceux qui ne pourront jamais se défendre.

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Sept vies à vivre

René vit dans la montagne avec ses parents. La famille, très pauvre, perd successivement six enfants. René décide alors de vivre autant pour lui que pour eux.

Sept vies à vivre est un album qui retrace le parcours de son personnage principal, héros un peu malgré lui d'une odyssée qui va le faire traverse l'histoire de France. On s'attache rapidement à René et à sa famille, dont la simplicité est touchante. René, qui avance dans sa vie avec une certaine naïveté, perd petit à petit ses illusions. Pourtant, le récit ne tombe jamais dans le drame et, malgré les épreuves, garde une certaine légèreté.

Côté planche, j'ai beaucoup aimé le graphisme vintage de l'ensemble. Les traits des personnages font penser aux BD des années 50-60 et la colorisation en pointillé apporte un côté vieux magazine.

Un parcours de vie touchant sans être jamais plombant, porté par des dessins très réussis.
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Soupe froide

Y a pas, on n'est pas des chiens! Faut pas charrier, on a sa dignité!



Il marche et vitupère, marche et tempête, grelotte et maugrée, souffre et peste, trébuche et râle… Les pieds nus dans la neige, il s'emporte dans le vent, jure dans le froid. Vêtu d'un pyjama, il fulmine encore, déblatère toujours. Le crayon noir parle la colère et zèbre la page blanche, trop blanche, trop propre pour lui.

Il crèvera sur la route mais ils pourront toujours l'attendre dans ce putain de foyer. Il avance un peu plus sur le chemin qui doit le conduire à l'hôpital. Le cancer lui bouffe la mâchoire mais il ne fera pas demi-tour. Il mangera les trente kilomètres à grands coups de dents furibardes. Mètre après mètre, il plante sa colère dans les arbres, le sol, les cieux et chaque souvenir.

Il ressasse cette soupe froide dégradante. SDF c'est un statut social, ni plus ni moins. Un SDF est toujours un homme. Et un homme avale sa soupe CHAUDE. Ses pieds sales et gelés collent au froid mais avancent toujours. Sa colère s'alimente à l'humiliation qui lui a troué les tripes et l'âme, à ce cancer qui vrille douloureusement, à sa vie passée, à son présent qui grelotte. Tous des cons ou pas loin. "Pauvre Juju. L’était mort d’hypothermie qu’ils disaient. J’avais été voir le registre. Le médecin légiste a écrit « Mort naturelle ». Ca lui paraissait naturel de mourir de froid à c’t’ enculé."



Et pendant qu'il déchire la nuit, qu'il accroche sa harangue aux branches, qu'il frotte son honneur bafoué sur les cailloux hostiles, qu'il maudit l'infirmière au potage vexant, un médecin s'est fait dessinateur de bande dessinée. Son trait pas tout à fait abouti sert le propos rageur de celui qui traine son statut d'humain dans la campagne déserte. Parce qu'un jour, alors qu'il exerçait, un homme a quitté le service. Cet homme venait de Lyon. Il s'en souvient. Muni du statut de mascotte du Dr Masson, l'homme bénéficiait d'une hospitalisation hivernale. L'accord se rompit pour une soupe servie froide.



Cette bande dessinée, je l'ai rangée au chaud. C'était le moins que je pusse faire. Ainsi qu'honorer cet homme avec un imparfait du subjonctif.

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