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Critiques de John Burnside (187)
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Une vie nulle part

« Tout ce qui importait était qu'elle puisse imaginer un endroit autre que cette ville enfumée, empoisonnée : la lumière; des forêts vierges; des cerfs traversant des chemins de campagne au crépuscule . Cet endroit imaginaire, ce pays qui n'existait pas, était son foyer. N'importe où, excepté Corby, aurait pu être son chez soi.* » Dans ce roman à forte connotation autobiographique, John Burnside nous raconte Corby, dans les années 70, à travers l'histoire de deux familles, l'une arrivée d'Ecosse, l'autre de Lettonie, pour travailler dans les aciéries . Connu sous le nom de « Little Scotland » dû à une forte concentration d'écossais, Corby est une ville industrielle du nord de l'Angleterre, où grandit aussi Burnside avec un père ouvrier dans les mêmes aciéries.

Dans l'atmosphère d'un film en noir et blanc, l'écrivain nous dresse le portrait d'une ville sale, une saleté qui marque tout, même les gens , ces gens arrivés d'un peu partout. Dans ce contexte où se pose la question d'identité nationale et culturelle, s'éclosent frustrations et nostalgie à l'état brute. Une nostalgie qu'ici ne s'attachant à aucun passé auquel on désirerait y retourner, débouche sur la souffrance. Venus y chercher une vie meilleure, ils semblent avoir fui un enfer pour tomber dans un autre, coincé dans un endroit qui semble être nul part, symbolisé par le titre du livre, « Living nowhere ». Cette grisaille est pourtant chargée d'une atmosphère incandescente. Dans la chaleur des hauts-fourneaux, où la violence n'est jamais loin et finira tôt ou tard par se manifester au sein de l'histoire, la seule religion qui rassemble ici tout le monde est : « ne pas devenir une victime », alors que la vraie religion est concrètement absente.…..



Burnside est un alchimiste de la littérature , d'un sujet noir il en a fait une pépite d'or où étincelle une prose magnifique qui est propre à lui. Descriptions magnifiques des synergies des rencontres, analyses subtiles des protagonistes , les divers membres des deux familles, qui reflètent brillamment ces vies perdues au coeur d'une ville qui est « nul part ». Même l'amour peine à y trouver son chemin, le bonheur est éphémère, l'amitié spéciale, les relations familiales estompés, la religion une mascarade. Un vide abyssale. Les jeunes ont peu de choses à partager en dehors de l'alcool, la drogue et autres stupéfiants et s'ils ne sont pas violents, ils rêvent de lieux imaginaires, ou tout simplement d'être propulsés dans l'univers, à la recherche d'un nouvel espace pour trouver « son chez soi ( home) », comme le fera l'un des jeunes protagonistes Francis voyageant pendant vingt ans , et comme le notera Derek son frère, dans son calepin, « Derek Alan Cameron /17 Blackburn Drive /Cowdenbeath Fife /Scotland/ Great Britain Europe /The World /The Solar System /The Milky Way/The Universe ». Mais finalement, à travers son personnage Francis, l'écrivain conclue que ce fameux « chez soi » est loin d'être injoignable, ni un rêve, il suffit de regarder autour de soi, oublier son petit ego , être dans le monde, dans la vie , afin d’être libre et pourquoi pas heureux 😊 !



C'était mon troisième Burnside, c'est beau, c'est profond. Un très grand écrivain qui me subjugue à chaque lecture.



« Il ne voulait pas se souvenir, car il ne voulait pas oublier ».

(He didn't want to remember, because he didn't want to forget.)







*« All that mattered was that she could imagine somewhere outside this smoky, poisoned town: light; empty woods; deer crossing a country road in the dusk. This imagined place, this country which did not exist, was home for her. Anywhere could have been home for her, as long as it wasn't Corby. »
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Le bruit du dégel

Je ne sais pas comment je fais pour choisir mes lectures qui font un parfait écho à ma vie du moment. Ma critique va être brouillon, je le sais, pour cause de fatigue et de ressentis nombreux et contradictoires. Il y a quelques mois j'ai eu la chance d'être embauchée à un poste où je me sens à ma place. Mais voilà, même si je suis en jeans, baskets, très peu maquillée, pas très sophistiquée tout en étant propre et nette, j'ai 54 ans et demi. Et les conversations de mes très jeunes collègues étaient : ahhh elle est vieille, on aurait préféré une jeune…” Ouais...Le rapport avec ce récit ? Une rencontre entre deux femmes, belle mais improbable dans notre société où l'individualisme est une star, où la vieillesse est un dégoût.



Kate boit pour oublier, pour arrêter le temps, pour faire son deuil, mais surtout à cause d'une mauvaise rencontre avec un jeune cinéaste qui a besoin d'excès pour créer ses oeuvres.



Jean vit en solitaire et c'est un choix pour ne pas faire de concession, pour vivre avec ses souvenirs. Jean a choisi une autre façon d'arrêter le temps.



La rencontre de ces deux femmes, différentes et pourtant si semblables va leur permettre de se réparer, l'une et l'autre.



À travers le récit des souvenirs de Jean et de sa façon de vivre son quotidien pour survivre à un traumatisme et la vie actuelle de Kate et ses ressentis, John Burnside arrête le temps, nous permet de nous poser, de reprendre notre souffle, de nous attabler avec ces deux femmes autour d'un thé et de beignets aux pommes. Parce que la vie, le bonheur après lequel nous courons tous est là dans les gestes quotidiens et répétés : couper le bois, faire un gâteau, regarder la nature, le ciel et écouter.



Écouter les histoires des autres et ne plus s'en raconter. Écouter la vérité de l'autre qui n'est peut être pas la réalité mais la sienne avant de devenir un secret. Écouter et ne pas entendre simplement.



Se régénérer au contact d'une amitié sincère, authentique sans jugement, en prenant le temps.



Vous connaissez le bruit que fait le dégel ?



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L'été des noyés

C'est tout là-haut, dans l'Arctique, qu'a élu domicile Angelika Rossdal. Peintre célèbre, elle a choisi cette côte sauvage pour la lumière si particulière qui émane de cet endroit quasiment désert. Elle s'est acclimatée à la rudesse de l'hiver qui contraste si fortement avec les chaleurs étouffantes de l'été. Certains journalistes qui viennent l'interviewer diront d'elle qu'elle vit comme une recluse. Elle, évidemment, ne le voit pas ainsi. Sa fille, Liv, considère Kvaløya comme la seule île où elle n'ait jamais vécue. C'est au cours de cet été-là, il y a dix ans maintenant, que se joua ces événements tragiques. Deux frères, Mats et Harald, se noyèrent à quelques jours d'intervalle, sur le même canot emprunté. Que faisaient-ils donc à bord, en pleine nuit? Personne ne trouve d'explications rationnelles à ces noyades. Kyrre, le vieux voisin, qui aime à raconter les légendes et les histoires de trolls ou de magie, dira à Liv qu'un esprit est à l'origine de tout cela. Que Maia, la dernière personne vue en compagnie des deux frères, est la réincarnation de la huldra, femme aux pouvoirs magiques et à la beauté fatale, que c'est elle, sans doute, la responsable. Mais comment expliquer la disparition de deux autres personnes? Liv, en tant qu'espion de Dieu, voudrait tant, aujourd'hui, trouver un sens à cela...  



Venez boire un thé avec Mère, écouter les légendes de Kyrre ou bien prendre un bain de soleil dans le jardin exotique... Dépaysant, mystérieux, sombre ou un peu irréel, ce roman nous emporte dans le nord de la Norvège. Liv nous raconte cet été-là, l'été de ses 18 ans, l'été où deux de ses camarades de classe se sont noyés mystérieusement. A travers le portrait de cette jeune fille mais aussi celui de sa maman, du vieux et attachant Kyrre, il nous emmène dans cette île qui regorge de légendes. Il ne s'y passe pas grand-chose, certes, mais l'atmosphère nous enveloppe tout à fait. L'écriture est dense, riche et poétique et les descriptions sont magnifiques. John Burnside nous offre un roman fort, fantastique et étrange... presque insaisissable. 



Revivez L'été des noyés... 
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Le bruit du dégel

Après une énième gueule de bois Kate déambule dans un quartier pavillonnaire, elle est en quête d'histoire pour d'éventuelles scénarios, un travail que son amant-ami de beuverie Laurits lui a confié

Kate n'est pas à l'aise avec les gens, pas facile de faire la démarche et d'être à l'écoute

Après avoir essuyé des refus et trouvé des portes closes Kate est sur le point de faire demi-tour quand au détour d'un regard elle découvre une maison non répertoriée dans le plan du quartier

Les lendemains de cuites sont toujours difficiles, Kate n'y échappe pas, sa migraine, la chaleur du jour, cette maison qui semble venir de nulle part, mirage...

" Le bruit du dégel" de John Burnside est un roman sur la détresse, la tristesse et la reconstruction La rencontre de Kate l'étudiante en rupture de banc et de Jean la vieille dame va interrompre le lent processus de destruction, ranger les fantômes au placard et découvrir un pan de l'histoire américaine grace aux histoires de Jean

Après l'embâcle, la glace se brise, c'est la débâcle, le bruit du dégel.

Une belle histoire de rencontre entre deux générations en manques de liens.
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I put a spell on you

"I put a spell on you", La fameuse chanson de Nina Simone (chantée aussi par d'autres) donne le titre de ce roman autobiographique du romancier écossais John Burnside. Des mémoires de jeunesse dans les années 60 dans la ville de Corby, de post adolescence, et d'autres fragments de vie ultérieure, agrémentées de digressions sur le côté caché et sombre de l'amour et de la séduction, sur le désir paradoxal de s'isoler voulant pourtant faire partie d'une communauté, sur les idéaux de jeunesses qu'on perdra à jamais, où l'auteur s'y perd pour mieux s'y retrouver, aussi bien au sens figuré qu'au sens propre.



" Je t'ai jeté un sort" , rien de maléfique, plutôt le charme, l'envoûtement, d'un moment, d'un regard ,d'un événement, ou d'un amour non consumé que les écossais appelle "Glamourie"-, qui nous restera gravé dans la mémoire, à vie et qu'on conservera comme notre trésor caché. Pour Burnside lors de ses vingt ans, c'est le regard d'une jeune femme penchée par dessus le dossier de sa chaise qui lui chante les premières strophes de la chanson de Nina Simone. Elle n'est ni sa petite amie, ni quelqu'un de particulier ....pourtant accentué aussi par sa prochaine disparition, ce moment , ce regard et ses paroles resteront à jamais gravés dans sa mémoire, de même que d'autres histoires, d'autres moments des années plus tard.

"Thrawn", un autre mot écossais qui signifie tordu, déformé,singulier, qui sort du lot, s'oppose, un mot qui l'attire comme un aimant......la relation de ses parents des moins enviables, les dangers dû à l'absence de contraception, associés à l'inévitable scénario d'un marriage en perspective, image d'une vie domestique sans sexe, sans amour, où l'alcool et le foot seraient les uniques consolations d'une vie d'homme marié, dans le contexte d'un milieu ouvrier catholique, le pousse à dévier d'un chemin morne tout tracé.......pour notre grand bonheur nous lectrices et lecteurs.



Une prose sublime, géniale, simple mais ô combien poétique, sensible,touchante, des pensées claires et concises, avec des nombreuses références littéraires et cinématographiques et beaucoup de musique......pour moi un des plus grands auteurs vivants.

Il est professeur d'anglais à l'Université de Saint Andrews, en Ecosse, too late mais j'aurais adoré être son élève....

Ce livre n'est malheureusement pas encore traduit en français, j'espère que les éditions Métailié, le fera prochainement, ainsi que son superbe recueil de nouvelles "Something like happy".



"All things that are

Are with more spirit chased than enjoyed".

Shakespeare
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La maison muette

Où se trouve le siège de l'âme ? L'âme est-elle liée au langage ? le langage est-il inné ou acquis ? On sait que la parole (les mots, la langue, la grammaire) s'acquiert, mais n'existerait-il pas une sorte de pré-langage inné, universel, commun à toute l'humanité, qui nous aurait permis de communiquer dès la naissance, si, paradoxalement, l'apprentissage de la parole (la langue, les mots,...) ne nous l'avait pas fait oublier peu à peu ?



Des questions vertigineuses, et sans réponse, dès lors qu'il faudrait être dénué de toute éthique scientifique, de toute morale, de toute humanité enfin, pour se livrer à des expérimentations (forcément sur des cobayes humains tout juste nés) qui permettraient d'y répondre.



Mais ce que la science et la morale n'autorisent pas (en principe), la littérature le permet.



Ainsi donc, "La maison muette" raconte l'histoire d'un homme, depuis son enfance entre un père transparent et une mère dominatrice, jusqu'à sa tentative d'expérience pseudo-scientifique consistant à élever des jumeaux nouveau-nés sans aucun contact avec la parole humaine. Enfant intelligent et curieux, il a grandi avec l'idée que lui a inculquée sa mère : "une créature sans langage était une créature sans âme". Bientôt, la question de la définition de l'âme, de sa situation, voire de sa matérialisation physique, l'obsède. Autodidacte, il n'a de cesse de compulser ouvrages d'anatomie et encyclopédies médicales, tout ce qui pourrait le mettre sur la piste. "Pour connaître l'âme, il fallait que je connaisse le langage. [...] A présent, je tenais ma véritable vocation". Et en effet, c'est avec l'acharnement d'un Prix Nobel qu'il se consacre désormais à ses recherches, puis à l'expérimentation in vivo, lorsque le hasard (ou le destin) lui offre deux jumeaux nouveau-nés. Avec acharnement, certes, mais sans aucune méthode ni rigueur scientifique, et surtout sans le moindre état d'âme, dépourvu qu'il est de la moindre empathie et de toute morale ; un sociopathe, dont les actions apparaissent cruelles et perverses, et dont je ne suis pas tout à fait certaine qu'il soit capable de distinguer le Bien du Mal.



Quoi qu'il en soit, cet homme est glacial, glaçant, et ce roman nous emmène dans son cerveau tortueux et torturé, nous le dissèque avec la précision, la froideur et la dureté métallique d'un scalpel. On se laisse emporter dans ces méandres pourtant étrangement envoûtants. C'est cela qui fait surgir le malaise, parce qu'on ne peut s'empêcher d'être fasciné par cet être atteint d'incommunicabilité pathologique avec ses semblables et qui tente de percer le secret de l'origine du langage, cet outil de communication par excellence. On comprend d'emblée que son expérience est scientifiquement absurde et fantaisiste en plus d'être d'une cruauté sans nom, et pourtant on est curieux d'en connaître le résultat. Malsain, donc, parce que si le narrateur est dépourvu d'empathie et qu'il est enfermé dans sa logique purement expérimentale, le lecteur, lui (en principe), sait que "c'est mal". John Burnside nous révélerait-il notre part de perversité ?



Une lecture un peu éprouvante d'un texte puissant et froidement violent, qui pousse à s'interroger sur l'âme et l'humanité.



En partenariat avec les Editions Métailié.
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Le bruit du dégel

" - Vous êtes végétarienne ?



- Depuis trente ans, dit-elle. Pas à cause de l'abattage, comprenez bien. On tue à longueur de temps. On tue pour produire de l'électricité. Chaque route qu'on aménage est une vraie piste de mort. Je ne peux rien contre ça, en revanche je n'ai aucun envie de collaborer avec la nébuleuse de l'agriculture industrielle.(...) "







C'est peut-être l'échange qui sous tend tout le livre, enfin à mes yeux...



Un livre est comme une partition : les notes sont écrites mais chaque interprète, chaque lecteur jouera ou lira selon sa propre personnalité, le tempo de sa vie, le phrasé de ses refus. C'est tout l'art de l'écrivain de faire que d'un récit surgissent plusieurs histoires qui parleront à ceux qui lisent.







Qu'est-ce qui pousse Jean, cette femme âgée et solitaire, à accueillir spontanément celle qui vient l'interroger pour une hypothétique enquête ? Est-ce une reconnaissance d'un moment, d'un être, qui sont tous deux synonymes de transmission ? Comme si celle qui se présentait à sa porte était  "l'attendue"…



Qu'est qui entraîne Kate à franchir le portillon d'une maison qui n'était même pas répertoriée sur le liste de son enquête ? La ressemblance de la maison et de la nature qui l'environne avec le lieu de son enfance et par là même, l'évocation de ce père qu'elle vient de perdre et dont elle ne parvient pas à se consoler de l'absence ? Ce chagrin qui la fait trouver dans l'alcool la force de continuer sans trop avoir à se battre contre les pensées et les regrets qui l'habitent .



Elles vont donc échanger : le fardeau d'un chagrin dont il faut comprendre qu'il est le terreau d'un avenir contre le poids de souvenirs qui sont autant d'enseignements pour appréhender la vie du pays, les engagements, les choix, les refus de chacun, la trame d'une vie.



Si la mort est le ciment de nos routes de vie, sa soeur, la violence est le pavé de nos existences.

Jean va évoquer sa vie, sa famille, ses rencontres : chaque personnage est le symbole d'une période de l'Histoire Humaine des Etats-Unis : Droits Civiques, Guerre du Vietnam, Fat Man et Little Boy, Black Panthers, non -violence, mouvements underground, pacifistes, désertion, trahison…

En faisant défiler les années, Jean expose ses engagements, ses choix, ses refus et ce sont eux les plus importants.

Ne pas écouter tout ce qui est dit par les instances dirigeantes, ne pas croire que la vérité est toujours du côté de ceux qui gouvernent, refuser d'acquiescer à tout et de là, choisir d'avoir une vie en adéquation avec ses principes même si elle est une vie en marge, avec la solitude pour compagne, avec la fuite pour raison d'être, avec la clandestinité pour quotidien.

Choisir qui on aime, même en affrontant une société, être sincère et fidèle à ses aspirations, aux promesses qu'on a faites...

Essayer d'éloigner cette violence qui fait partie de nous, essayer de comprendre l'autre avant de le juger, accueillir celui qui souffre et qui a besoin d'aide en l'occurrence Kate, protéger ceux dont on partage les idéaux même si leur absence en est la condition.

Prendre conscience que cette violence surgira dans l'existence comme une évidence, comme une circonstance qu'on ne pourra éviter...







Livre magnifique, vous l'aurez compris, et encore j'aimerais trouver d'autres mots pour le décrire tant il comptera dans mes lectures.

Une écriture envoûtante, une construction habile pour faire qu'on ne peut le quitter.

Un décor de scènes de films courts-métrages, la référence à nombres de films de grands réalisateurs des années 40-60- Orson Wells, Alfred Hitchcock...- l'évocation de poètes américains – Robert Frost, Marianne Moore… - et les citations des textes d'Emily Dickinson qui sont le refrain de ce récit font de ce livre une fabuleuse découverte comme on a le bonheur d'en faire dans une vie de lecteur.





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Scintillation

« Scintillation », un titre paradoxal pour ce roman qui se déroule dans l'Intraville, bled côtier indéterminé de Grande-Bretagne, autrefois prospère grâce à l'usine chimique qui employait à peu près tous les habitants des environs. Aujourd'hui, l'usine est désaffectée depuis longtemps, la faune et la flore sont empoisonnées, les habitants au chômage et parfois gravement malades. Comme si cela ne suffisait pas à la noirceur du tableau, en quelques années, cinq jeunes adolescents ont disparu chacun à leur tour, sans qu'on s'en préoccupe plus que cela. « Partis chercher un avenir meilleur », dit-on le plus souvent. Léonard, 14 ans, n'en croit pas un mot et vit dans l'attente angoissante d'une autre « victime », lui, peut-être. Mais il essaie de garder espoir, entre ses deux passions : la littérature et les jolies filles.

Cette histoire a des airs de roman post-apocalyptique, dans lequel la Nature est morte, les adultes lâches ou cupides, l'agent de police inutile et corrompu et les enfants sauvages et livrés à eux-mêmes. Réunissant peurs et angoisses universelles (maladie, mort, disparitions d'enfants, chômage, violence, catastrophe écologique), le tableau est sinistre, glauque, malsain et comporte quelques scènes poignantes. le style est à la fois lyrique et cru, magnifique, et les réflexions pertinentes. Il ne faut pas se laisser rebuter par les premières pages, introspectives et obscures, mais se laisser guider ensuite par les différentes voix qui apportent chacune son point de vue, laissant au lecteur le soin d'assembler le puzzle. J'avoue que je n'ai pas bien saisi la scène finale, quasiment messianique, inquiétante et littéralement aveuglante: rédemptrice ou infernale, elle annonce la fin certaine d'un monde, sans qu'on sache s'il en adviendra un autre, ni s'il sera meilleur…


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Le bruit du dégel

"Personne ne devrait avoir honte de ce qui est nécessaire. Un père. Une mère. Un amant ou une amante. Une caresse, un mot, un corps. du reste, longtemps, j'ai en effet regretté, allongée dans mon lit, bien éveillée, qu'il n'y ait pas quelqu'un à mes côtés. Quelqu'un à toucher. Si j'ai appris une chose, après le départ de Lee, ce fut à quel point il est important d'avoir quelqu'un qu'on peut toucher. Quelqu'un qui nous touche".



C'est ainsi que Jean, vieille dame solitaire, s'adresse à Kate, jeune étudiante en cinéma paumée qui noie le deuil de son père dans l'alcool, la drogue et l'ennui.



Elles se sont rencontrées un jour que Kate errait au bout d'un quartier résidentiel désert, à la recherche de bonnes âmes qui accepteraient de répondre à son "enquête", menée en vue du vague projet cinématographique de son petit ami. Qu'est-ce qui l'a poussée à frapper à la porte de Jean, qu'est-ce qui a poussé Jean à lui proposer un marché : lui raconter des histoires en échange de sa sobriété ?



On ne l'apprendra qu'à la toute fin de ces 360 pages, d'une beauté et d'une tristesse qui vous serrent le coeur.



Si Jean est solitaire, d'une solitude désormais choisie pour ne rien devoir concéder de sa liberté ("...j'eus la certitude qu'elle était parfaitement seule au monde, et qu'elle se plaisait ainsi..."), Kate, bien qu'en couple, semble tout aussi seule au monde, avec la différence qu'elle en est profondément malheureuse, perdue entre la nostalgie et les regrets.



Le marché est conclu, et respecté : Kate arrête de boire, et Jean, au travers de récits qui la concernent elle, son frère, ses neveu et nièce, son associée, tire le portrait d'un rêve américain désenchanté, où l'idéalisme et le patriotisme se sont fracassés contre le pragmatisme de la realpolitik. Toutes les guerres y passent, mondiales ou internes : la Deuxième, la froide, la Corée, le Vietnam, les luttes pour les droits civiques, les Black Panthers et le Weather Underground.



Au rythme de la préparation du thé et des beignets aux pommes, Jean explique les choix de vie et les engagements des uns et des autres, et Kate écoute, en se demandant en arrière-plan pourquoi Jean l'a choisie comme confidente, elle dont la vie est à la dérive, dépourvue de sens, qui n'a fait d'autre choix que celui de ne pas vraiment en faire.



Au fil de ces histoires, le temps s'arrête : Jean retourne dans le passé pendant que Kate met le chaos de sa vie sur pause. Raconter ces histoires, vraies ou fausses, les transmettre comme ce qu'on a de plus précieux, se libérer enfin des secrets qu'elles renferment. Les écouter, vraies ou fausses, pour s'en nourrir, se guider, se réchauffer, soigner ses blessures, revivre malgré les cicatrices.



Pour le lecteur aussi, le temps s'arrête : on respire, on lâche prise, on se retrouve un peu en Jean ou Kate, on prend un thé et un cookie, on s'en réconforte, on oublie le monde réel, puis la dernière page tournée on y revient, avec l'espoir que la réalité soit à la hauteur de la fiction, avec l'espoir de connaître un jour une telle amitié inconditionnelle, de trouver un tel baume qui apaiserait toutes les blessures.



"Le bruit du dégel" est un roman magnifique, doux et triste. Sa trame paraît banale, pourtant les personnages sont complexes, tous attachants. C'est bien plus qu'une histoire d'amitié, il y est question de transmission, d'histoire des USA, de loyauté, de sincérité, de choix et d'engagements, de solitude et de carapaces de protection.



D'ailleurs, le bruit du dégel, de la glace qui craque, ne serait-il pas le même que celui d'un coeur qui s'ouvre et fend l'armure ?



En partenariat avec les Editions Métailié.
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L'été des noyés

Angelika Rossdal, artiste peintre reconnue décide, après avoir vécu à Oslo, de partir s’installer dans une île du cercle polaire arctique, Kvaloya. Elle y vit avec sa fille Liv qui ne sait rien de son père sans que cela la préoccupe particulièrement, car elle et sa mère vivent côte à côte en respectant l’espace de chacune.

« Je ne me voyais pas comme une enfant grandissant dans l’ombre de ma mère. Je vivais dans un monde de ma propre conception, un espace que Mère avait délimité, puis m’avait laissé définir à ma guise. Elle vivait exactement comme elle l’avait choisi, et j’ai toujours su que ses travaux passaient avant tout le reste, mais cela ne faisait que me donner la liberté de vivre comme j’en avais envie et de choisir ce qui primait à mes yeux (…) nous étions très bien comme ça. Nous avions la maison, et toute l’île, en fait. Nous disposions de calme et d’espace en suffisance pour vivre la vie comme nous l’entendions plutôt qu’en nous conformant à l’idée que s’en faisait quelqu’un d’autre, et nous nous suffisions à peu près. Nous étions parfaitement capables de veiller sur nous-mêmes et n’avions rien à demander à personne. »



C’est dix ans après qu’ils soient survenus, que nous allons découvrir, par la voix de Liv, la suite d’évènements, en particulier des disparitions, qui vont s’échelonner de fin mai 2001 (quand on remonte Mats Sigfridsson, un de ses camarades de classe, du fond du détroit de Malangen) à la fin de l’été.



« C’était il y a dix étés. Celui de mes dix-huit ans ; l’été où mon père mort apparut puis disparut dans le silence d’où il était sorti ; l’été des esprits et des secrets ; le dernier été où je me considérai comme un des espions de Dieu. Un été long, blanc, d’histoires que l’on accepta tous, tout en sachant que d’un bout à l’autre elles n’étaient que mensonges. L’été où la huldra sortit de sa cache et noya trois hommes, l’un après l’autre, dans les eaux froides et lisses du détroit de Malangen.»



Mais ce ne sont pas les événements en eux-mêmes qui permettent de se faire une idée de ce roman d’une grande beauté, une beauté inquiétante, envoutante qui se cache et surgit des "replis du vent", de l’espace, du frémissement de la lumière et des ombres d’où naissent des visions mais d’où jaillit aussi une réalité autre, exacerbée par l’attention, le regard aigu et interrogateur de Liv, jeune femme de 18 ans au seuil de sa vie, qui ne sait pas encore, alors qu’elle vient de finir sa scolarité, la direction qu’elle va prendre.

« (il y a), certains jours, de minuscules, presqu’infimes poches d’apocalypse dans l’étoffe de ce monde, prêtes à crever et me surprendre où que je sois »



L’on sort de cette lecture totalement désorientés par un auteur dont le talent de conteur et de poète nous apprend à regarder derrière l’écran des certitudes pour se laisser submerger par un monde fluctuant, changeant, étrange mais tout aussi réel, à l’image des aurores boréales qui surgissent dans le ciel de ces îles en fin d’été.

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L'été des noyés

Angelica Rossdal, Peintre célèbre, reconnue à Oslo, est partie vivre dans une île ,au nord de la Norvège , celle de Valoya, , un lieu reculé et désert car décliner, refuser, dénier, rétracter, telles étaient ses relations avec le monde extérieur non seulement dans son travail mais aussi dans sa vie personnelle.

Elle refusait de devenir une célébrité du monde artistique tout aussi sûrement qu'elle se refusait aux prétendants , elle se repliait dans un isolement ----mythique--- l'intégrité suprême , essentielle, paradoxalement à son succés.

N'être plus rien, se refuser soi-même, c'était ça son pouvoir ! La plus haute forme d'art !

Pour ces raisons des personnes viennent l'interviewer , sa fille Liv vit avec elle .



A Valoya, l'hiver est rude, les mois d'enneigement très longs, l'obscurité hivernale difficile à supporter pour certains mais Angelica aime la lumière toute particulière de cet endroit pétri de contrastes : été de cieux blancs, interminables nuits blanches, air doux et suave, neuf riche d'herbes et de fleurs sauvages....

Au cours d'un été, il y a dix ans , été des dix-huit ans de Liv , deux frères , Mats et Harald se noient au cours de la nuit à quelques jours d'intervalle .Noyades inexplicables?

Que faisaient- ils dans un canot emprunté ?

Comment expliquer deux autres disparitions énigmatiques ?

C'est un roman étrange et dérangeant, à l'écriture pétrie de poésie, onirique ,trés dense, riche de descriptions sublimes .

A travers le portrait de Liv et de sa mére ---- artiste solitaire et indépendante ----les visions et les hallucinations de Liv, errant dans ce paysage halluciné , qui laisse la part belle aux contes féeriques, vieux mythes et autres légendes populaires, peuplées de trolls et de sorcières , de fantômes ,fables morales, monstres dissimulés dans les replis du vent, les personnages sont tout à fait insaisissables, presque évanescents ....les bois de bouleaux où Kyrre et Maia disparurent ?

L'auteur est sans conteste un poéte, il décrit avec un talent indéniable les métamorphoses de la nature, rendant presque l'imaginaire concret, les ciels fugaces, les mirages, la magie des grands espaces, les histoires d'apparition, la noirceur des âmes , les changements de saison , les silences profonds, la rudesse.....

C'est une ode à la nature, un univers fabuleux , fantasmé , baroque et déroutant où il se passe de drôles de choses....un roman hypnotique ? Fantastique ? Je ne trancherai pas ....

Où se situe la limite entre ce que l'on sait et ce que l'on rêve ?

Trés difficile de critiquer et de cerner les contours de cet ouvrage ....
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L'été des noyés

Ce roman, c'est d'abord une atmosphère ; enveloppante, troublante, énigmatique et brumeuse, puis un lieu ; une île du nord de la Norvège, ses vastes prairies, sa mer ondulante et calme, sa forêt sombre, ses plages de galets, ses petites maisons aux couleurs chatoyantes, ses rares pêcheurs, une saison aussi ; l'été avec la lumière si particulière des pays nordiques, sa douceur, les fameuses nuits blanches où jour et nuit se confondent à l'image du ciel et de l'eau qui se reflètent et se mélangent l'un dans l'autre désorientant les hommes, leur sommeil et leurs rêves. Ce livre laisse également la part belle aux contes féériques et autres légendes populaires parcourues de trolls, quant aux personnages « réels », ils sont insaisissables, presque evanescents. Burnside, à travers une écriture onirique, place le lecteur dans une sorte de monde parallèle, navigant entre la réalité, l'imagination et le surnaturel.

Les yeux grand ouverts, Liv, une jeune femme de dix-huit ans, arpente cette île alors que coulent les heures. Elle vit ici depuis quelques années avec sa mère, une artiste peintre renommée qui du jour au lendemain a fui l'agitation de la ville pour travailler dans la sérénité et la solitude. Une mère toujours là – dans son atelier – et pourtant si lointaine, toute à son art. Son père, Liv ne le connaît pas. Et justement, cet été-là, une lettre arrive d'Angleterre. Des nouvelles de cet homme. Mais a-t-elle vraiment envie de savoir qui il est ? Le rencontrer bouleverserait-il son cheminement personnel ?

Avant même de recevoir cette missive, la jeune femme avançait dans la vie l'esprit confus. Sa scolarité finie, elle ne savait que faire après. À la recherche d'un sens à donner à son existence, d'une direction. Ce père ne semble pas lui avoir manqué. Plutôt solitaire et taiseuse, la seule personne qu'elle aime voir et écouter est son voisin, Kyrre, un passionnant conteur. Il lui parle de la Huldra, cette femme d'une grande beauté qui hante la forêt et le bord de mer pour séduire les hommes et leur faire risquer leur vie. Et cet été-là, de mystérieuses noyades d'hommes vont se succéder. Liv les connait tous. Elle croit savoir qui se cache derrière la Huldra : Maïa, une jeune femme de son âge.

Hallucinations, craintes, sensations d'être épiée, Liv va être aspirée dans une spirale infernale qui l'empêche de distinguer la réalité de l'imagination. Sa vision se trouble. Ses sens lui échappent. Son regard inconstant trahit ses doutes et ses appréhensions face à la vie d'adulte qui l'attend.

Un roman écrit par un poète, cela se sent : les métamorphoses de la nature, les mirages, la beauté et la noirceur des âmes, le lyrisme. Si l'auteur m'a embarquée dans son histoire, je dois avouer avoir ressenti une certaine frustration le livre terminé devant le manque d'explication. Il laisse en effet le lecteur face à sa propre imagination, volontairement j'imagine.
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Une vie nulle part

Si je devais donner une nuance de couleur pour décrire, en un mot, ce livre ce serait un "gris".

Le gris, teinte des rejets dans l'atmosphère des Aciéries de cette ville de Corby même s'il existe aussi le halo orangé de la combustion dans les fours.



Un gris étincelant, argenté, qui diffracte la lumière, comme les Aciéries - pour peu qu'on les regarde comme "douées" du pouvoir d'influencer les existences – diffractent les vies de ceux qui travaillent dans les ateliers et également la vie des familles qu'elles conditionnent finalement à distance.



Un gris poisseux comme ces mêmes rejets qui recouvrent tout, la végétation éteignant les couleurs, les habitations, les rues, la neige qui n'est jamais blanche toujours salie comme les habitants, comme leurs esprits toujours envahis de nuages de pensées où dominent amertume, regrets ou résignation.





Ce n'est pas par hasard si le récit débute par la description d'une séance de shoot à l'acide. Un retrait du monde ou plutôt le désir d'entrer dans un monde plus conforme aux aspirations que la génération des enfants se permet encore d'avoir.



Qu'ils soient venus de loin à une époque troublée pour fuir des conditions de vies insalubres, qu'ils aient juste parcouru quelques centaines de kilomètres pour "préférer" l'insupportable chaleur des fours à la claustrophobie des galeries des mines, qu'ils aient toujours su qu'ils allaient être des fantômes de ces murs parce que l'usine est le seul lieu qui emploie ou plutôt qui consomme les hommes dans la région car la mort y est quotidienne, ils ont cru, pleins d'espoirs, qu'ils pourraient construire une vie digne, décente dans laquelle le dur labeur serait le miroir d'une douceur des sentiments partagés. Et ils ont échoué : les sentiments, comme les feuilles des arbres, recouverts de cette pellicule qui est la deuxième peau de tout relief à Corby, sont eux aussi asphyxiés.. Tous ces êtres manquent d'amour, ils n'arrivent pas à le garder, certains ne l'ont même jamais connu, ils n'échangent pas, chacun finalement se retranchant dans un monde personnel, s'éloignant des autres quand vivre ensemble devient impossible.



Comme une évidence à laquelle on ne peut échapper, la violence est au coeur des vies, violence des mots, des relations sociales, violence née du rejet de l'autre, violence de celui qui est plus faible, de celui qui est différent et on sent bien qu'on va atteindre un point culminant, tant les tensions s'exacerbent, tant les liens se dissolvent, tant l'isolement est le credo de chacun.

Au lendemain d'un acte de violence encore plus abject, Francis le personnage principal quitte Corby...





C'est le roman de la fuite, de l'effacement, du retrait, pour s'isoler, pour se mettre en marge d'une vie qu'on n'accepte pas. C'est une sorte d'isolement suicidaire que choisit Francis, une volonté de ne pas être vu, de devenir, à l'instar des fantômes qui l'habitent et le construisent, cette simple présence toute en transparence vue de ceux seuls qui les évoquent encore un peu. de faire le choix de ne jamais s'attacher ni aux êtres, ni aux lieux, toujours en partance...

C'est un roman qui dit le deuil, la perte, ce que l'un et l'autre façonnent chez celui qui les subit.





Magnifique écriture d'un roman choral par laquelle John Burnside, virtuose des mots, parvient à faire changer notre regard sur les êtres, les évènements qui font ce roman en fonction de celui dont on entend la voix…

Un roman avec plusieurs portes d'entrée, qui parle au coeur, qui pose beaucoup de questions, à lire sans précipitation, en prenant le temps de reprendre son souffle. Il y aurait tant à dire...



Et une "bande-son" magnifique, comme toujours chez cet écrivain, teintée de blues encore et encore.



Bref, une lecture âpre mais fabuleuse.







"...And in my mind

I still need a place to go..."

Neil Young
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Le bruit du dégel

Ce que j’ai ressenti:



*Etre sauvée par des histoires…

Kate, jeune femme en pleine étude cinéaste, est en souffrance, perdue dans un brouillard alcoolisé, à la dérive même de sa propre vie…Et un jour, elle rencontre Jean Culver une vielle dame, un peu singulière….Dans un échange implicite, elles décident de se voir plus régulièrement. L’une et l’autre, se sauvant grâce à leurs histoires et une bonne dose de chaleur…Que c’est joli de voir naître une amitié aussi désintéressée avec ces deux femmes si solitaires…



John Burnside a un pouvoir magique: c’est un conteur hors pair, il nous raconte la vie dans toutes ses contradictions, sa beauté et ses horreurs, avec une pointe de philosophie positive…Toute en quiétude, et autour de boissons chaudes réconfortantes, il nous crée une atmosphère suave où deux femmes, de générations et destins différents, se lancent à l’assaut de leurs souvenirs…C’est d’une douceur exquise d’avoir à contempler un peu de ce temps suspendu, et apprécier leurs échanges faits de tendresse et d’empathie.



« Il me semblait comprendre. Premier et second amours. Et derniers amours, sans espoir. Tout ça, c’était de l’amour en fin de compte. »



*…Dans les strates de souvenirs…



On traverse par les sillons de la mémoire de Jean, tout un pan d’Histoire américaine où la guerre et ses aléas ont fait des ravages, tandis que dans ceux de Kate, on frôle toutes les inquiétudes de la jeune génération, complètement anéantie d’aspirations…Un tissage de liens et d’expériences personnelles qui mêlent Passé et Présent, chacune devenant un réceptacle d’émotions vives, mais dans leur entente tacite, toujours cet élan commun, d’espoir, ce rêve de futur meilleur…Hantées toutes deux, par des fantômes, elles vont danser, rire, pleurer, partager autour de ses restes de peines dans une ambiance cocooning tout en savourant des douceurs sucrées. Les résidus de ses douleurs, en ont fait des femmes fortes mais fragiles, solitaires mais aimantes, merveilleuses mais écorchées à jamais…



« Les seuls fantômes qui reviennent hanter leur ancien monde sont les esquintés et les malfaisants. »



*…Par une force tranquille…



John Burnside a une plume sensible et poétique, où l’on ressent une sagesse apaisante. Il a réussi à me captiver dans toutes les nuances de calme et d’ondes de bonheur à saisir, avant l’inévitable… Il se dégage comme une force tranquille dans ce roman, de se recentrer sur l’essentiel pour mieux apprécier, dans un silence, le bruit du dégel et les plaisirs simples de la vie. En somme, juste se poser, écouter, apprendre des anciens, boire un thé chaud, Faire des beignets et fendre du bois, comme ligne de conduite. J’ai adoré cette lecture parce qu’elle se joue du temps, de nos tourments, de nos peurs enfouies, alors qu’il est si facile de se faire chauffer un peu d’eau, y jeter un sachet d’herbes aromatiques et de lire, un bon livre…



Un bon livre comme, Le bruit du dégel de John Burnside, fraîchement sorti pour la rentrée littéraire 2018…







« Quand on entrevoit l’ailleurs, même brièvement, personne ne pourrait nous tenir rigueur de penser que le bonheur et le temps sont une seule et même chose. »



Ma note Plaisir de Lecture 9/10
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L'été des noyés

L'été des noyés de John Burnside pourrait faire croire en raison de son titre et de sa première de couverture que l'on va savourer, en le lisant, un de ces bons thrillers scandinaves avec une intrigue diablement bien ficelée sur fond de critique sociale. Fausse piste... même si le cadre est trompeur car l'action se situe sur l'île de de KvalØya aux confins du cercle polaire. Un lieu dépaysant où "les nuits blanches" du soleil de minuit "figent l'esprit" et provoquent "des délires extravagants"chez toutes celles et tous ceux qui, amateurs d'expériences extrêmes, veulent vivre un jour sans fin et un temps qui n'existe plus...

C'est dans ce très déroutant été polaire que vont se produire deux noyades qui resteront inexpliquées, celles de Mat et Harald Sigfrisson, deux ados solitaires, ainsi que deux disparitions celle d'un habitant de l'île Kyrre Opdahl et Martin Crosbie, un drôle de touriste qui semble se fuir...

Tous ces événements nous sont rapportés par la narratrice, Liv Rossdal, venue sur l'île avec sa mère Angelica Rossdal, une artiste-peintre qui a choisi de venir vivre en ce lieu alors que Liv n'était qu'une petite fille.

Mais le suspense n'est pas là où on l'attend, déjà parce que les allers et retours de la narratrice dans le présent - elle a vingt-huit ans - et le passé - elle avait dix huit ans - brouille constamment les cartes et nous jette dans un abîme de perplexité quant à l'interprétation des faits tragiques survenus cet été-là.

Première source de questionnement : la personnalité de la narratrice Liv qui, au fil des confidences qu'elle nous livre, pose question. A-t-on affaire à une ado qui souffre de phobie sociale et qui va basculer, au fil des événements tragiques qu'elle va vivre, dans un comportement psychotique, notamment dans les scènes on l'on peut penser qu'elle est victime d'hallucinations visuelles et auditives ? Ou bien s'agit-il d'expériences extra-sensorielles comme elle l'exprime avec à la fois beaucoup de conviction et de doute, dans ce cadre de vie où la réalité apparaît parfois comme une illusion et où le visible et l'invisible sont constamment en relation. C'est du moins ce qui est dit dans les légendes que lui a racontées le vieux Kyrre Opdahl quand elle était enfant. Et dans ce monde de l'irrationnel "où tout est à la fois magnifique et voué à la mort et en même temps étrangement rassurant" , un certain nombre de questions vont rester en suspens. Qu'est-ce que la narratrice a réellement vu et vécu cet été-là ? On ne le saura jamais. Pas plus que l'on saura ce qu'il est advenu des deux disparus. Qu'en est-il exactement de Maïa, la jeune fille, que de près ou de loin, la narratrice associe aux noyés et disparus ? Est-elle une incarnation d'une créature maléfique qui hante les légendes de l'île ? Ou bien est-elle tout simplement une jeune déboussolée avec laquelle on peut qu'établir une relation toxique ? Mystère...

Autre personnage tout aussi énigmatique que les précédents celui de la mère de Liv. Une femme qui vit dans un double enfermement, celui de l'île et celui de son atelier, un sanctuaire, auquel personne n'a accès, même pas sa fille. Curieuse relation d'ailleurs que celle qui la lie à cette dernière, faite à la fois d'une connivence forte mais aussi d'une mise à distance dont on peut penser parfois qu'elle confine à l'indifférence. Ce qui est certain c'est que cette femme vit dans une solitude existentielle qu'elle transcende dans l'art et qu'elle vit - aux dires de sa fille - un bonheur intimiste "[qui] ne peut être expliqué et quoi qu'on raconte [qui] ne peut vraiment pas se partager". Alors, la mère de Liv, un double de l'auteur ?

Une question de plus que l'on se pose à la fin de ce roman envoûtant. Ce qui en revanche est indéniable c'est la magie de l'écriture de John Burnside faite à fois de méticulosité dans le choix du lexique et d'une poésie onirique qui nous entraîne dans un monde fantasmatique où les limites et les frontières du réel se déplacent ou n'ont plus cours...
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L'été des noyés

La maison du pêcheur, tableau peint en 1906 par Harald Sohlberg, illustre la couverture de L'été des noyés dans sa version originale (mais pas dans l'édition française, bizarrement). Ce n'est pas un hasard, l'artiste norvégien est souvent cité dans le roman de John Burnside, pour évoquer le paysage dans lequel se déroule l'action du livre mais aussi pour mettre des images sur le travail de la mère de la narratrice, peintre "recluse" volontairement avec sa fille, Liv, dans une île du Grand Nord, proche de l'Arctique. L'été des noyés est entièrement conté par Liv, une décennie après les faits, alors qu'elle venait d'avoir 18 ans et qu'elle n'avait pas encore décidé quoi faire de sa vie, bien qu'elle sache déjà qu'elle voulait avant tout "qu'on la laisse tranquille". Un été de noyades et de disparations où la confusion s'empara de son esprit entre la réalité et l'illusion, un état chaotique et peut-être délirant que rend de façon merveilleuse la plume magique et onirique de Burnside. C'est un roman qui se lit à petites goulées, lentement, pour en apprécier le sinueux cheminement, contemplatif souvent, avec des descriptions superbes de paysages, de lumières et de temps changeants. De même pour les états d'âme de Liv, aussi versée dans la solitude que l'est sa mère, avec pour seul ami un vieux raconteur de légendes, notamment celle de la huldra, troll déguisée en femme sublime pour attirer à elle et faire disparaître les jeunes garçons. John Burnside captive et ensorcelle à partir du moment où l'on se plie à son rythme lent et hypnotique. Le livre est incroyablement précis dans les détails de la vie quotidienne et dans les rapports mère/fille, sans doute la clé du récit, avant de glisser comme dans un rêve dans le surnaturel. L'alchimie est là : entre le réel et l'imaginaire ne subsiste qu'une fine pellicule de glace. Le lecteur, lui, doit s'en remettre à ses propres raisonnement et sensibilité et sait qu'il devra y dénicher les réponses qu'il ne trouvera pas dans le roman. L'été des noyés est comme un tableau de Sohlberg, il laisse toute la place à un univers, fabuleux, atroce et fantasmé. C'est beau, déroutant et bouleversant.
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Scintillation

Quel déroutant roman que Scintillation. Le titre en est très beau et plein d'évocations attrayantes.



L'intrigue se déroulent dans un coin indéterminé de la Grande Bretagne, sur une presqu'île complètement empoisonnée par une usine de produits chimiques désormais désaffectée mais dont la pollution marquera le sol et l'air pendant bien longtemps. Dans cette "réjouissante" contrée se trouve l'Intraville, bourgade principalement peuplée d'anciens ouvriers de l'usine, pour beaucoup alcooliques et/ou atteints de maladies rares et mortelles. A côté, l'Extraville avec ses belles demeures et ses nantis.



Dans ce petit paradis perdus surviennent plusieurs disparitions de jeunes adolescents d'une quinzaine d'années. La police, représentée par le seul agent Morrison qui a pactisé avec le gros bonnet pas clair du coin, à qui il doit son poste, laisse entendre qu'il ne s'agit de rien d'autres que de fugues.

Léonard, quatorze ans, féru de littérature et de parties de jambes en l'air avec la peu farouche Elspeth, réfute cette hypothèse.



Il n'est pas forcément très simple d'entrer dans ce roman. Ni de le terminer. Le récit est décousu, dans le sens où l'auteur apporte divers points de vue. J'avoue que vers la moitié du livre, certains faits m'ont paru en décalage avec l'ensemble. Comme une note dissonnante dans une mélodie.

Il n'en reste pas moins que le style de John Burnside est époustouflant, mêlant crudité et poésie, démontrant qu'il peut exister une certaine beauté même au coeur d'une friche industrielle où les arbres poussent empoisonnés. Son talent est de forcer le lecteur à lire et voir autrement; son intrigue et sa construction narrative bousculent volontairement. Est-ce pour nous éviter de sombrer dans l'apathie qui s'étend sur la population amorphe et téléphage d'Intraville?



En bonus, il nous offre de très beaux passages sur la littérature via les lectures de Léonard. On y trouve avec bonheur Dostoïevski (avec un à propos des plus intéressants d'ailleurs), l'Anna Karénine de Tolstoï, Marcel Proust et sa Recherche, Herman Melville et sa baleine blanche, etc.



Scintillation est un roman très sombre tant du point de vue social, psychologique, économique et écologique. A éviter en cas de gros coups de blues car malgré un titre qui évoque de jolies étincelles, il y a très peu de lumières dans cette ombreuse presqu'île abandonnée.
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L'été des noyés

Il se passe de drôles de choses sur l’île de Kvalaya, à l’extrême nord de la Norvège. En mai 2001, Mats Sigfridsson s’est noyé dans le détroit de Malagen. Dix jours plus tard, ce fut au tour de son frère de disparaître dans les mêmes conditions. Liv les connaissait plus ou moins tous les deux. Cette jeune fille, vivant avec sa mère artiste peintre dans une maison grise offrant un vue imprenable sur les prairies et la grève, aime la solitude que ce « bout du monde » lui procure. Son seul ami est Kyrre, un vieil homme qui depuis son enfance lui raconte des histoires de trolls et de sirènes. Lui est persuadé que les noyades sont l’œuvre de la « huldra », une femme à l’irrésistible beauté et aux pouvoirs maléfiques qui séduit les jeunes hommes avant de les faire disparaître. Liv est plus terre à terre, elle pense que les racontars de Kyrre ne sont pas crédibles. Pourtant, les faits qui vont s’enchaîner au fil des nuits blanches de l’été arctique feront vaciller ses certitudes…



Un roman étonnant. Un roman d’atmosphère. Un roman psychologique. Très psychologique même. Beaucoup trop pour moi en fait. Le paysage boréal a ce petit quelque chose de fantasmagorique qui dégage une inquiétante étrangeté. Liv est la narratrice unique du récit. Et elle a parfois un comportement assez flippant ! On en vient à se demander si les disparitions on vraiment eu lieu ou si elle nous mène en bateau. On referme le livre en se disant que Burnside, quelque part, nous encourage à ne pas choisir, nous laisse volontairement démunis et en pleine perplexité. C’est du moins ce que j’ai ressenti et c’est une impression que je n’aime pas du tout !



Finalement, les noyades ne sont que des péripéties secondaires. La quête d’identité de Liv, son passage vers l’âge adulte, la relation particulière avec sa mère et l’absence d’une figure paternelle sont les véritables thématiques du texte.



Il y a quelque chose de David Lynch dans ce roman que beaucoup pourraient qualifier de fascinant. Le problème, c’est que l’univers de Lynch m’a toujours laissé de marbre. Personnellement, j’ai trouvé cet été des noyés plus nébuleux qu’envoutant. Il n’empêche, la partition offerte par John Burnside, au-delà de réticences qui me sont propres, a tout pour plaire. Son écriture, à la musicalité particulière, est parfois proche du baroque et possède une tonalité à l’incontestable originalité. Énormément de qualités donc, mais je dois bien reconnaître qu’en ce qui me concerne, le charme n’a pas opéré. Dommage.


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Une vie nulle part

John Burnside situe son roman «Une vie nulle part» dans la ville anglaise de Corby dominée par la présence écrasante de l’aciérie, ville qu’il connaît bien pour y avoir vécu son enfance et son adolescence, une enfance et une adolescence qui ressemble fort à celles de Francis, d’Alina et son frère Jan, qui avec Derek, frère de Francis et leurs parents sont au centre de ce récit.

Ce récit prenant, tragique et sombre, est imprégné d’un certain mystère. J’en ai aimé la lenteur, la grande poésie et la langue qui, dans une analyse fine, pénètre sans effraction, l’intimité et la vie intérieure de chacun des personnages en en faisant pour le lecteur de vieilles connaissances inoubliables, que l’on n’a pas envie de quitter.

Tous ont espéré, certains espèrent encore, surtout parmi les plus jeunes, ne faire à Corby qu’un séjour provisoire qui leur permette, en travaillant à l’aciérie, d’économiser l’argent nécessaire à un nouveau départ, plus conforme à leur rêve. Car personne ne peut avoir comme idéal de vivre près de l’aciérie qui domine la ville et leur vie, salissant, pourrissant tout, leurs âmes, leurs corps, leur environnement. A Corby ils se sentent déracinés, vivant «nulle part»

Et pourtant ils doivent se rendre à l’évidence progressivement, ils sont bien d’ici.

«Les gens de la région évoquaient toujours le pays, un mot qui désignait immanquablement un autre lieu, quelque part dans le passé ou l’avenir, un lieu d’où ils étaient venus, un lieu où ils allaient. Des gens qui avaient vécu là toute leur vie, des hommes qui travaillaient aux Aciéries depuis vingt ans et plus, des femmes dont les enfants sont nés et avaient grandi à la lueur des hauts fourneaux, parlaient de retourner au pays pour les vacances, ou de rentrer au pays à la retraite, ou à défaut de faire en sorte que leur corps soit définitivement rapatrié à Dunfermline, Cracovie ou Paisley pour qu’ils puissent au moins être enterrés ailleurs. Toute leur vie durant, ils avaient vécu et respiré les Aciéries ; leur corps était imbibé d’un mélange méphitique d’acier, de carbone et de minerai..... Les Aciéries les avaient absorbés, réquisitionnés, et ils pouvaient bien parler tant qu’ils voulaient d’autres lieux, leur pays c’était là.» p 23



Il n’y avait rien ici qu’ils n’y eussent apporté ces Ecossais, Irlandais et Polonais aux yeux embrumés : le pays dont ils parlaient avec tant d’émotion n’était qu’un mensonge, et ils le savaient. p 129



Il est important pour vivre de se sentir d’un lieu, un lieu qui vous permet de grandir, de le quitter comme va le faire Francis qui s’éloigne brusquement après un drame, rejetant l’immobilisme et l’apathie environnante pour mener une vie d’errance pendant dix sept ans, sans supporter aucun lien prolongé. Il reviendra finalement à Corby où il se re-connaîtra et sera alors capable d’aimer ceux qu’il a quitté et laissé si longtemps sans nouvelles.



«Une vie nulle part» a la beauté d’un diamant noir et Burnside est vraiment un alchimiste qui parvient à transformer la matière vile en or dans le creuset qu’est son écriture.



«Dans le monde, tant de choses étaient froides, dures, mortes, il fallait retenir la chaleur. Il fallait avaler ce poison et le transformer, dans son propre sang en quelque chose de bon et vrai, de même qu’un alchimiste transformerait un métal ordinaire en or (p 16)

(...) tout à coup elle était frappée de cette perception sombre, intense, du noir dans le vert de la sève, du noir dans le blanc de la neige, pareil à une bribe de traité d’alchimie, noir : nigredo, véritable énergie du monde qui n’avait rien de sombre, ou du moins rien de maléfique, si dangereux qu’il parût (p 24)»



Ce livre par sa richesse peut donner lieu à de multiples lectures et il est très difficile d’en rendre toute la profondeur et la beauté comme pour le dernier roman de John Burnside «Scintillation» que j’ai lu d’une traite après celui-là et qui me laisse pleine de questions.

On y retrouve certains éléments de «Une vie nulle part» et on peut considérer l’Intraville de Scintillation comme la dégradation et l’aboutissement dans un avenir proche de la vie à Corby.

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L'été des noyés

De John Burnside, j'avais été impressionnée et conquise par "Scintillation". Avec "L'été des noyés", j'ai retrouvé la même poésie et la même étrangeté.

Il s'agit d'une histoire mystérieuse, lors d'un été sans nuit, sur un bout de Norvège arctique, qui commence avec la noyade de deux adolescents. Pourquoi sont-ils morts ? Ont-ils été entrainés par un Esprit typiquement nordique ? C'est ce qui intrigue la narratrice, fille d'une peintre renommée et recluse, et leur voisin âgé. Arrivent ensuite un vacancier triste, un journaliste américain, puis des lettres d'Angleterre, qui tous se brouillent dans des hallucinations nées sous le soleil de minuit.

L'écriture de John Burnside est d'une poésie ensorcelante ; en tournant les pages, j'avais l'impression de manipuler une pièce de porcelaine fragile et délicatement belle. L'intrigue est très intériorisée et nous fait plonger dans les profondeurs de l'âme humaine -jusqu'à en perdre la notion du réel. C'est une lecture qui nécessite une grande attention, mais que je qualifierais également de "contemplative", car l'auteur exalte aussi la Nature et les éléments, ou le bonheur du simple moment présent.

C'est une belle pièce littéraire, envoûtante mais exigeante.
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