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Citations de Julie Héraclès (25)


L’homme à l’appareil-photo nous regarde, sidéré. Ma boule à zéro lui a coupé la chique. Il se recule. Il cadre. Il déclenche son appareil. Un souvenir de cette belle journée existera, quelque part. déjà le photographe se détourne. Déjà, je ne l’intéresse plus.
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Une envie impérieuse.
Retrouver ma cathédrale.
Je lève les yeux. Elle est là, à la fois immense et gracile. Ses toits verts. Ses deux clochers imperturbables, l'un ciselé de sculptures, l'autre un peu rustre, sans fioritures. Je ne sens plus mes pieds, mais, étrangement, je n'ai pas froid. Je veux mettre un cierge. Pour le petit enfant qui grandit en moi. Je pousse la porte du pavillon royal. Je m'attends à l'obscurité habituelle. À la place, je suis saisie par une clarté aveuglante. Je crois vivre un miracle. Je revois la petite fille ardente que j'étais, celle qui espérait rencontrer la Sainte Vierge. Je me frotte les yeux. Et je comprends. La neige est entrée dans la nef. Elle s'est déposée dans les allées, elle forme des coussins blancs sur les prie-Dieu, elle veloute les contours des statues. Les panneaux de bois qui remplaçaient les vitraux depuis 1939 n'ont pas tenu le choc face aux intempéries. Des trous béants laissent passer le jour. Et la neige.
(p. 342)
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Chartres, 16 août 1944, à l’aube

Dans trois jours, j’aurai vingt-trois ans. Je vais mourir avant. Ils ne me louperont pas. Une balle dans la tête. Le sang gicle comme un geyser et me barbouille les yeux. Le monde devient cramoisi, puis tout noir. Je m’écroule, la gueule fracassée sur le pavé. Petit tas inerte qu’il faudra charrier dans la fosse commune.
Ces visions m’assaillent depuis des jours. Elles dansent la gigue dans mon cerveau, elles me trouent les entrailles. Il n’y aura pas de pitié pour moi. La pitié n’existe pas. La vengeance, oui. Les Allemands ont fusillé ceux de Chavannes comme des chiens en 42. Aujourd’hui, les vainqueurs ont changé de camp. Je n’aurai droit à aucune clémence. La pute du Boche va être butée.
 
Ça me fait du bien d’imaginer le pire. L’imaginer, c’est comme l’empêcher d’exister. Je me tiens bien droite, assise sur le banc de la table de la cuisine. Il fait sombre. L’électricité a été coupée et le soleil a toujours du mal à pénétrer la pièce. Je les attends. C’est pour ce matin. Plus rien ne les retient. Les Amerloques se sont pointés hier soir. Aucun doute là-dessus, c’est Madeleine qui me l’a dit. Elle sait tout, elle entend tout, Madeleine. « Reste tranquille, tout ira bien, ils vont juste faire déguerpir les derniers Allemands. Tu n’as rien à craindre, ma Simone. » Elle est gentille, ma frangine. Mais je n’écoute jamais ses conseils.
Hier, avant le couvre-feu, des clameurs ont retenti. Elles venaient de la basse-ville. Cris de joie ou cris de peur : j’ai eu envie de savoir. Moi qui me calfeutre depuis des mois, qui prends garde à ne pas respirer trop fort, j’ai déraillé. J’ai collé Françoise dans les bras de Maman et je suis sortie en trombe. Fallait que je respire. Fallait que je voie. C’était peut-être la dernière fois que j’étais libre dans ma ville.

(INCIPIT)
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Il a été constaté qu'il se trouve encore des citoyens français qui ne respectent pas la législation des jours sans alcool édictée par la loi du 23 août 1940. Des sanctions seront prises à l'encontre des personnes prises en flagrant délit. Pour rappel, la consommation d'alcool est interdite les mardis, jeudis et samedis.
P 179
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«  Les salauds, les saints, j’en ai jamais vu.
Rien n’est ni tout noir, ni tout blanc, c’est le gris qui gagne .
Les hommes et leurs âmes c’est pareil ….. »

PHILIPPE CLAUDEL , les Âmes grises.
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Ce qu'il ne sait pas, c'est que pour moi, embochée, ce n'est pas une injure. Il y a eu un moment , dans ma vie, où je me suis sentie plus allemande que française. Il y a même un jour où j'ai vibré en voyant le peuple allemand acclamer son Führer. L'Allemagne allait engendrer un monde nouveau, j'en suis persuadée.Tout ça c'est vrai. Tout ça, j'y ai cru. Même si c'est loin, maintenant. Je ne suis plus la même. À présent, j'ai trouvé d'autres raisons de vivre.
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Elle s’enferme dans les cabinets. Puis, elle revient, les yeux toujours un peu plus vitreux, le pas toujours un peu plus lourd. Le tout dans des vapeurs de Cologne. Pas besoin d’un dessin pour piger son manège : maman picole.
En revanche, à table, pas une goutte de vin. Maman grogne même contre le vieux qui verse en douce du rouge dans son reste de soupe. « Comme les ploucs, tu me dégoûtes » dit-elle. Et lui comme à son habitude il baisse encore plus le menton dans son assiette. Il se grouille de finir de boulotter pour aller se terrer dans sa chambre. Le lendemain, il s’esquive à l’aube pour ne pas croiser la patronne.
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«  Pour moi, c’est l’aubaine.
Quitter cette école de bigotes sadiques et de pestes friquées , c’est tout ce que j’attends.
Impossible de ne pas voir là, l’intervention de Sainte Bernadette .
J’en suis certaine , elle me protège.
Je prépare mon certificat, dans un état proche de l’exaltation.
Je l’obtiens.
Et pas avec des notes de petite joueuse .
10 en calcul, 10 en histoire et 9 en composition française .
Les bonnes sœurs de Sainte - Bernadette peuvent aller se rhabiller. »
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Aujourd'hui, vous m'avez rasé le crâne, vous m'avez marquée au fer rouge et maintenant vous m'insultez comme une chienne. Mais vous ne me détruirez pas. Vous n'aurez pas cette étincelle qui me pousse à continuer, envers et contre tout. Car, aujourd'hui, encore plus qu'hier, je suis forte d'un trésor inestimable. Un trésor que beaucoup d'entre vous passerez toute une vie à chercher et n'obtiendrez jamais. J'ai aimé. Et j'ai été aimée. Alors, allez-y, dégainez vos plus belles injures, crachez vos mollards. Peu importe ce qui m'arrivera au bout de cette journée. Je vous plains, vous qui me haïssez sans savoir. Car vous ne connaissez rien de moi.
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En septembre 40, je suis donc retournée à Guéry. Cette année-là, la rentrée a été avancée d'un bon mois. Le Maréchal veut remettre la France au travail. Et les écoliers font partie de son plan. Fait nouveau : les professeurs ont dû certifier qu'ils ne sont ni francs-maçons, ni Juifs, ni communistes. Toute une ribambelle a dû plier bagage.
P 175
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Quand j'aperçois une lettre d'Otto, je ne l'ouvre pas tout de suite, je me laisse envahir par une sensation que je n'ai jamais connue : un mélange d'excitation et de douceur.
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Je rêvasse et une certitude s’impose : je veux être allemande. Pour ne plus jamais avoir honte. Je veux être allemande pour me sentir forte, pour croire en mon avenir. Je veux être allemande pour mettre de la grandeur dans ma vie. Je veux être allemande pour parler allemand, pour penser allemand. Je veux être allemande pour ne pas être comme toi, Pierre. Je veux être allemande pour te montrer que, moi aussi, je suis capable de réfléchir et de choisir mon camp.
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Moi, je ne suis coupable de rien. Juste d'un griffonnage au bas d'une feuille. Rien de bien méchant.
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Au fond de mes entrailles, un brasier s'est allumé. Il me dévore. Je suis en nage. Ce n'est pas la fièvre. Ce n'est pas la colère. C'est la honte. Impossible de ne pas repenser à la position qui était la mienne sans avoir envie de hurler. Je ne suis qu'une torche de honte. Je voudrais disparaître, devenir ce flocon qui virevolte et qui s'écrase. Je me déteste, je me dégoûte. Je vais me jeter du haut du clocher. Mourir pour ne plus penser.
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Aujourd’hui vous m’avez rasé le crâne, vous m’avez marquée au fer rouge et maintenant vous m’insultez comme une chienne. Mais vous ne me détruirez pas. Vous n’aurez pas cette étincelle qui me pose à contribuer, envers et contre tout. Car, aujourd’hui, encore plus qu’hier, je suis forte d’un trésor inestimable. Un trésor que beaucoup d’entre vous passerez toute une vie à chercher et n’obtiendrez jamais. J’ai aimé. Et j’ai été aimée. Alors, allez-y, dégaine vos plus belles injures, crachez vos mollards. Peu importe ce qui m’arrivera au bout de cette journée. Je vous plains, vous qui me haïssez sans savoir. Car vous ne connaissez rien de moi.
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Dans trois jours, j'aurai vingt-trois ans. Je vais mourir avant. Ils ne me louperont pas. Une balle dans la tête. Le sang gicle comme un geyser et me barbouille les yeux. Le monde devient cramoisi, puis tout noir. Je m'écroule, la gueule fracassée sur le pavé. Petit tas inerte qu'il faudra charrier dans la fosse commune.
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Dans trois jours j’aurai vingt-trois ans. Je vais mourir avant. Ils ne me louperont pas. Une balle dans la tête. Le sang gicle comme un geyser et me barbouille les yeux. Le monde devient cramoisi, puis tout noir. Je m’écroule, la gueule fracassée sur le pavé. Petit tas inerte qu’il faudra charrier dans la fosse commune
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Je me lève, je vacille, je récupère mon Malet- Isaac. Jamais, je ne renoncerai, moi. Je ne serai plus une petite victime, qu'on violente, qu'on injurie et qu'on abandonne. J'irai jusqu'au bout de mes rêves, mon bac, l'allemand, les études, le professorat. Et ma réussite sera ma première vengeance. Tout au fond de moi, ma boule de pus s'est changée en boule de feu. Comme un truc qui m'irradie de l'intérieur. Qui me porte.
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Le violoniste joue, les yeux mi-clos, bougeant la tête par saccades. Sa mélodie semble s'envole, égratignant au passage les murs de la préfecture, puis rejoignant I'azur du ciel. C'est solennel. C'est gai. Je sens monter dans ma gorge un rouleau de larmes. Non, pas possible. Le 14 juillet et tout le tsoin-tsoin, rien à fiche, ça me passe au-dessus. Je me mords les joues. Et je reste, les yeux agrippés au petit bonhomme qui me file les poils.
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Les mots se précipitent sur mes lèvres. Mais plus aucun son ne sort. Je commence à comprendre ce quil veut dire. Car, plus ça va et plus y en a, des indices, là, sous mes yeux, qui me narguent. J'entrevois des bribes de vérité et ça me fait mal au bide. Je veux pas la voir, cette vérité.
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