N'est-il pas bien naïf de s'imaginer que la paternité a la vertu inévitable de transformer complètement un individu, de faire disparaître ses défauts, ses passions, ses vices ? L'ivrognerie, la paresse, le jeu, le goût du plaisir, la prodigalité, la débauche sont autant de destructeurs de l'instinct paternel. Et, à défaut de ces infirmités morales, la misère suffirait à elle seule. Elle est le plus actif dissolvant des rapports de la famille. Les privations continues dégénèrent en souffrances aiguës, elles irritent et rendent injustes. Dans ces intérieurs délabrés, sordides, une naissance équivaut à une catastrophe. Cette fête de la vie, loin de donner lieu à des transports de joie, n'est accueillie qu'avec des imprécations. On était misérable à trois, à quatre, que sera-ce à cinq, à six ! C'est la faim, c'est le froid, c'est le dénuement dans toute sa hideur...