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C'est bien écrit !

Je voudrais d'abord remercier l'éditeur pour le soin apporté à cet ouvrage. La couverture originale rappelle le constructivism russe tout en restant discrète, on en trouve des rappels en noir et blanc en corps de livre. La mise en page est claire et aérée, offrant un confort de lecture bien agréable !

L'introduction par le fils de l'auteur donné quelques éléments importants pour situer ce dissident soviétique peu connu.

Par rapport au contenu, ces deux nouvelles surfant entre parodie, fable absurde et récit savant, sont plaisantes à lire. Le phrasé est frais et clair comme l'eau d'un ruisseau de montagne dont chaque galet aurait été choisi avec soin. C'est amusant, mais pas au point de rire aux éclats... Je n'ai pas trouvé la correspondance entre les 2 histoires aussi évidente que l'annonce la 4ème de couverture. L'écriture, et plus encore le fait d'être édité, est au cœur de Graphomanie. Dans Verglas au contraire, cette question n'apparaît qu'à la toute fin du récit. Elle aurait tout aussi bien ne pas y apparaître sans que cela en change fondamentalement la teneur.

Entre ces deux nouvelles, fort différentes, j'ai une légère préférence pour Verglas qui me semble plus aboutie.
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Azucre : Une épopée

En deux mots : "Azucre" de Bibiana Candia est une petite pépite de style, un petit bout d'archive d'histoire galicienne et un hommage poétique aux émigrés/immigrés, à leur courage dans la misère et l'incertitude.



En plus de mots ;

On a parfois tendance à ignorer ou oublier la partie peu reluisante de l'histoire des Européens. Par là, non pas les horreurs ou les crimes etc mais simplement l'histoire “banale” des Européens. le récit fictionnel ou documentaire de l'existence de la population européenne pauvre, laborieuse, sans terre, historiquement dotée de sa seule force de travail n'intéresse personne ou si peu de monde.



Dans "Azucre", Bibiana Candia s'inspire d'un fait réel et historique. Il s'agit de la tragédie vécue par une poignée de Galiciens partis travailler à Cuba au milieu du XIXème siècle et trompés sur la nature de leur emploi. Avec "Azucre", Bibiana Candia nous donne ainsi accès à une “anecdote” historique très éclairante sur la période.



Ce court roman est une petite pépite de style, un petit bout d'archive et un hommage poétique aux émigrés/immigrés, parce qu'ils sont forcément les deux, à leur courage dans la misère et l'incertitude, à leur opiniâtreté et à leur envie de vivre et d'être libres.



_ Ecrire le corps des Galiciens meurtri par l'histoire



"Azucre" parle des Galiciens à l'époque où la Galice, un peu comme la Bretagne il y a un siècle encore, était une terre pauvre où l'on souffrait de la faim. La situation des Galiciens dépendait alors beaucoup de conditions « extérieures », économiques, climatiques, sanitaires et leur vie comptait peu.



Ces conditions de vie sont directement évoquées dans Azucre, décrites sans misérabilisme et sans pathos, mais avec le souci de transmettre le sentiment de fatalité que les Galiciens partageaient à l'époque. (alors que la peste sévit !)



Elle y parvient avec brio, et cela n’en est même pas désespérant, car ce côté "fatal" a quelque chose de beau. Il est beau grâce au fait que la "cause" des personnages finit par être entendue d'une part et d'autre part, parce que la "preuve" historique de l'existence de leur cause nous est parvenue à travers les archives à partir desquelles Bibiana Candia a construit son récit.



La fatalité et la dureté du vécu des personnages Oreste, Bigorne et José sont aussi transmises par l'incarnation des personnages qui est très poussée. Bibiana Candia dans Azucre, réussit à faire sentir combien les corps subissaient, combien les esprits aussi dans l'exact même temps, et combien ils étaient marqués par la violence de l'histoire.



A la lecture, l'on sent quelque chose d'assez nerveux, une tension qui reflète le contenu de l'histoire : la faim, l'attente, la maladie, le mal de mer et le travail forcé. L'on perçoit aussi le contraste entre la violence et le désir car tous ces corps sont tendus vers la destination finale, la terre promise qu'est Cuba.



_ Azucre ou le sucre : le lointain Cuba



Les Galiciens de Bibiana Candia partent à Cuba pour y travailler dans les cultures de canne à sucre aux côtés des esclaves. Toute cette histoire est intéressante pour différentes raisons, d'abord ce que cela apprend à certains qui, comme moi, n'avaient pas forcément connaissance de l'existence de vagues de travailleurs espagnols à cette époque et encore moins connaissance des conditions dans laquelle ils devaient faire la traversée de l'Atlantique. L'autrice s'est indubitablement documentée pour retranscrire l'enfer de ce voyage mais aussi pour témoigner d'autres aspects comme le poids de l'église sur les Galiciens dans les différents aspects de leur vie et jusque dans la cale du bateau.



A cela s'ajoute que Bibiana Candia nous incite, en partageant avec nous sa vision de la chose, à nous demander ce que ce devait être que de découvrir un nouveau pays, très lointain, différent en tout point, aux moeurs, aux couleurs et aux odeurs nouvelles. Cet exotisme extrême, alors que nous sommes saturés d'images de tous les coins de la planète, nous est inconnu et même difficilement imaginable.



Enfin il est très appréciable d'avoir le fin mot de l'affaire et de pouvoir consulter les extraits des lettres envoyées depuis Cuba. Cela ajoute quelque chose à l'histoire d'Oreste Bigorne et José, la rendant plus tangible.



Pour conclure, l'on retiendra le style très efficace et reconnaissable de Bibiana Candia : la dimension oral et incantatoire, les répétitions bien dosées et la maîtrise des contrastes. Mais aussi l'intérêt évident et souligné par Bibiana Candia, que représente l'exploitation d'archives exceptionnelles ou irrégulières pour la fiction.
Lien : https://www.undernierlivre.n..
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Azucre : Une épopée

"Prenez garde vous qui quittez les confins pour une terre inconnue [...] personne ne racontera votre histoire, vous n'êtes que des gamins."



Les premiers chapitres de ce récit ont la saveur suave de l'aventure : nous sommes en Galice, fin du XIXè siècle, au nord-ouest de l'Espagne, et une centaine de jeunes garçons sans le sou, attirés par l'ailleurs et une fortune facile, embarquent pour les Antilles, recrutés par un riche Galicien qui possède une exploitation de cannes à sucre (azucre) à Cuba.



Tout est neuf et excitant à leurs yeux, le trajet en mules jusqu'à Saint-Jacques-de-Compostelle, l'idée de prendre la mer pour la première fois, et surtout la perspective de se remplir les poches et de revenir riche à la maison.



Mais Oreste, Bigorne et les autres vont rapidement se heurter aux premières déconvenues : le voyage en mer s'avère chaotique et extrêmement long, entre les roulis incessants, les odeurs pestilentielles, et les rats qui infestent le navire entre autres joyeusetés. Puis une fois passée la joie et l'émerveillement qui les submergent à l'arrivée à La Havane, ils vont vite découvrir que ce n'est pas le travail qui les attend, mais un esclavagisme simple et brutal.



Dans les courts chapitres qui rythment le récit, Bibiana Candia ne parvient pas seulement à restituer avec un réalisme percutant les conditions ignobles dans lesquels ces jeunes gens sont transportés, puis livrés à la plantation comme autant de pièces de marchandises, elle excelle aussi à nous raconter la tristesse, la douleur, l'incompréhension des hommes qui se retrouvent pris au piège d'un rêve qui tourne au cauchemar, d'une brutalité dont on ne revient pas.



Pour évoquer cet épisode historique méconnu, B. Candia s'est inspirée des lettres que certains des garçons réussirent à faire parvenir à leurs familles en Espagne. Ainsi elle redonne voix et dignité à ces oubliés du bout du monde, grâce à une écriture sensible, qui sait rendre compte avec une force saisissante leurs sensations, leurs émotions. Un premier roman passionnant qui m'a fait l'effet d'une claque!



Bravo à @leseditionsdutyphon d'avoir publié ce texte d'une grande force, dans un écrin absolument sublime.
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