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Expert classiques

Cet insigne distingue les lecteurs incollables sur la littérature des siècles passés.
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Mon plus secret conseil...

Livre acheté dans une ressourcerie... Une nouvelle fois je suis victime de ma curiosité et aussi d'une "quatrième de couverture" qui ne tient pas ses promesses.

"Une méditation pleine d'humour, de finesse et de légèreté sur l'amour, les femmes et l'engagement"... Je n'ai pas du tout le même humour que la personne qui a rédigé cette note. Le livre étant mince (120 pages) je l'ai lu en entier, mais en effectuant un compte à rebours car l'ennui m'a saisie dès les toutes premières pages.

Quel pensum ce texte! Quelle histoire insignifiante et désuète!

Enorme déception. Certainement un texte qui a bien mal vieilli.
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Le Comte de Monte-Cristo, tome 2/2

Achever ce pavé de Monte Cristo, c'est comme arriver au bout d'une longue et haletante randonnée dont le sommet est absolument inoubliable. J'ai eu un peu de mal à me remettre dans le bain car entre le tome 1 et le tome 2 les personnages évoluent, les bons semblent connaître tous les malheurs du monde et les mauvais semblent avoir tout gagné. Mais c'est sans compter l'implacable persévérance du Comte, lui même transformé au début du tome 2. J'ai adoré la mise en place méthodique de la machination pour renverser l'intrigue et remettre les choses dans le bon sens. L'amour, la bonté, la vérité triomphent après moultes péripéties et rebondissements en tout genre, au service d'une vengeance inéluctable. La plume de Dumas est d'une finesse merveilleuse, elle se met au service de toute la fresque, j'ai cru voir les personnages danser devant moi, les figures de style sont puissantes et maitrisées. Je suis absolument ravie d'avoir lu ce vrai "morceau" de littérature !
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Au bonheur des dames (BD)

Je n’ai pas aimé du tout, certes l’album suit l’intrigue du roman de Zola et lui est fidèle. Mais a minima, dans les grandes lignes, transformant de façon caricaturale la magistrale scène de jalousie d’Henriette. La psychologie des personnages est tout autant sabrée, d’autant que leurs visages n’expriment pas grand-chose dans ces dessins qui sont souvent des caricatures ou des personnages exagérément stylisés . Je n’ai rien retrouvé non plus de l’ambiance des anciens quartiers de Paris. Quant aux étalages du magasin, ils ne sont pas à la hauteur des descriptions du Bonheur des Dames. Je me suis plus sentie dans un dessin animé de Walt Disney qu’au coeur du Paris des années 1870.

Une fois le livre refermé, cela m’a rappelé les pages sur ce roman de l’excellent «Avez-vous lu les classiques de la littérature ?», humour volontairement décalé, anachronismes et absence de toute prétention en moins. Sans compter que là il n’y a pas juste quelques vignettes !

Pour moi ce livre représente finalement tout ce qui me fait en général hésiter quand je vois une adaptation graphique d’un roman connu.

A éviter absolument !
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Six personnages en quête d'auteur

N°1892 – Juin 2024.



Six personnages en quête d'auteur – Luigi Pirandello. L'avant-scène théâtre.



C'est une pièce de théâtre écrite par Pirandello en 1921. .

Elle est particulière à commencer par son titre  un peu surprenant. Ensuite elle montre un scénario original, la survenue impromptue d'étrangers, des personnages qui ne sont pas des acteurs et qui perturbent une répétition. D'autre part la pièce ne comporte pas d'actes ni de scène et quand le rideau se baisse c'est à la suite d'une erreur du machiniste..

C'est surtout une mise en abyme. A l'occasion d'une répétition d'une pièce programmée pour un spectacle, «  le jeu des rôles  », l'entrée en scène d'étrangers qui souhaitent jouer une pièce qui n'est pas encore écrite mais qu'ils portent en eux. Cette pièce c'est leur profond drame intime et familial. Peu à peu cette pièce non écrite va prendre le pas sur celle qui était prévue, s'écrire au rythme de l'improvisation, avec la complicité du directeur et au grand désarroi des acteurs professionnels. C'est aussi une réflexion sur la création théâtrale entre la fiction, l'illusion et la réalité, sur la technique théâtrale, le rôle des acteurs, la différence entre le «  personnage  » du manuscrit qui est vrai parce qu'il porte son drame en lui-même et l'acteur qui l'incarne, qui «  joue  » son rôle sur la scène. Il semble qu'ici il y a une véritable opposition entre eux, les acteurs n'étant définitivement que des interprètes.

Veut-il nous dire que le théâtre est le miroir de la vie ? On verra ce qu'on voudra dans cette mise en scène baroque qui n'a pas manqué, à l'origine de faire crier le public au scandale, à l'escroquerie à la trahison ou au génie. le théâtre comme le roman mettent en scène des personnages fictifs, qui n'ont jamais existé parce qu'ils sont nés certes de l'imagination de l'auteur mais que ce dernier construits à sa manière avec son témoignage, son message humain, ses drames, ses rêves, ses échecs et ses joies. Ce sont les malheurs humains qui nourrissent la création qu'elle soit littéraire ou théâtrale. C'est tout le problème de l'écriture qui est le reflet de la condition humaine dont chacun de nous porte en lui la marque mais qu'il n'est pas forcément capable d'exprimer, de mettre des mots sur ses maux pour les exorciser. Ici les six personnages, heureux sans doute d'avoir trouvé un auteur pour être leur interprète, le directeur, le torturent pour qu'il exprime leur tragédie intime en s'opposant aux acteurs. Pour autant, pour que le message passe, il faut que le metteur en scène fasse des choix en rapport avec la technique du spectacle qui doit être donné au public qui, lui aussi, fait partie du jeu puisque c'est pour lui que le spectacle est écrit et joué  .

Il y a aussi, me semble-t-il toute une réflexion sur la faute et aussi la honte, à travers cette famille éclatée, l'attitude du Père, de la Belle-Fille, de la la Mère et l'indifférence du Fils.



Sa première représentation à Rome en 1921 a été un four ce qui ne l'a pas empêchée d'être légèrement remaniée et traduite en plusieurs langues, mise en scène dans plusieurs pays, quant à son auteur il a obtenu le prix Nobel de Littérature en 1934. Pourtant sa carrière d'auteur n'a pas vraiment été un long fleuve tranquille puisqu'il a, un temps, envisagé d'abandonner l'écriture.



Le titre a quelque chose d'étrange qui a piqué ma curiosité. Je crois avoir apprécié cette thématique opposant les personnages de fiction aux acteurs de théâtre, la fiction contre la réalité mais je ne suis quand même pas sûr d'avoir tout compris.



Le cinéaste italien Roberto Ando s'est inspiré de cette pièce en mettant en scène un Pirandello incarné par l'excellent acteur Toni Servillo, à l'étonnante ressemblance avec son personnage.



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L'Art d'aimer -Les Remèdes de l'amour - Les P..

L'art d'aimer d'un point de vue historique est un texte aussi accessible que souriant ,détaillé, didactique que pas évident à utiliser en tant que source historique. Le statut du texte est difficile à établir finalement.

Pour information Ovide était proche du pouvoir par alliance familiale mais bien que poète reconnu il ne s'est jamais impliqué en politique pendant l'époque de construction du régime impérial. Une époque dangereuse et autoritaire où il vivait.

Il a terminé en exil en Dacie et malgré ses supplications intenses et poétiques, il n'est jamais rentré à Rome. On ne sait rien de solide au sujet de la causalité qui a engendré ce définitif exil en pays glacial et barbare (le contraire de l'archétype de la civilisation de la méditerranée).

On peut penser intuitivement que L'art d'aimer n'y est pas pour rien.

Ce poème est un travail didactique sur l'amour (les sentiments, la séduction, la conquête amoureuse) mais ce n'est pas le Kama Sutra attention.

On peut s'étonner à la lecture du carractere pompeux et faussement modeste de la présentation que l'auteur fait de lui-même et de la description de son sujet dont la finalité se veut pratique certes mais apte aussi à soulager la souffrance morale qui accompagne le sentiment amoureux potentiellement et assez fréquemment selon Ovide.

Il y a dans ce manuel antique une discrète grandiloquence surchargée qui confine très probablement à la dérision ou au minimum à une pointe d'humour gourmand. Même dans les recettes de cuisine de beauté des références nous échappent certainement et intuitivement on sent qu'il y a souvent et probablement moqueries "sous roches " (sourires).

Rome n'est pas la capitale du libertinage effréné et la famille y est une institution solide avec le Pater Familias puissant et directif et la Matrone mere de famille et model de vertues qui se veulent à la base de la perpétuation de la société romaine idéale.

Ces valeurs familiales sont très encadrées par le travail du législateur.

Au début de l'empire et avant à la fin de la République, Rome comme centre du pouvoir connaît une crise de croissance. La ville s'agrandit et des cultes et des populations étrangères et étrangers à l'Italie à peine unifiée culturellement s'y installent.

Rome ne s'est pas diluée dans son empire. Elle s'est raidit et a posé dans les lois exigentes son identité et ses idéaux latins à préserver.

Autant les expériences sociales des élites ont pût dériver autant le cadre légal régentant les moeurs est resté très encadré socialement.

Dans ce contexte l'auteur de l'art d'aimer, bien que moqueur a subtilement dissimulé du libertinage et a heurté avec ce texte, frontalement, les assises de la famille à un moment où des lois impériales s'efforcaient de la préserver du chaos redouté du fait de la tradition latine confrontée brutalement et à grande échelle à l'étrange et à l'étranger.

L'art d'aimer tourne les rapports entre les sexes en objets publiques et coquins, pour s'amuser et dédramatiser la vie sentimentale alors que l'état répressif et puissant voulait au contraire à ce même moment la soustraire au débat publique non législatif.

Évidemment quand l'auteur conseille les hommes et les femmes pareillement et sur un pied d'égalité ,c'est intégralement subversif.

En encourageant les femmes à être libres l'auteur heurte frontalement l'autorité et la famille telle que définie par la tradition et les lois récentes à son époque où d'autres déjà anciennes.

L'art d'aimer est aussi le reflet d'un courant assez transgressif qui brillait à son époque. Il faut par exemple à ce propos regarder les fresques rouges de la villa des mystères à Pompéi et les comparer à celles lumineuses et prudes de la Villa de Poppée près d'herculanum.

L'art d'aimer est un texte qui porte fortement le décalage culturel du monde contemporain avec la Rome des débuts de l'empire. Ce fossé peut échapper aux lecteurs non avertis mais le sujet aide beaucoup à nouer des liens avec l'antiquité classique.

Ce texte n'est pas anodin car il est finalement au coeur d'une problématique existancielle et consciente du monde romain
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Tamango

N°1890 – Juin 2024.



Tamango - Prosper Mérimée- Librio.



C'est une nouvelle assez bien documentée de Prosper Mérimée, publiée en 1829 qui ne semble pas avoir recueilli la faveur du public. C'est un réquisitoire contre l'esclavage et met en présence un blanc, le capitaine Ledoux, un marin expérimenté devenu officier qui, en fin de carrière, se reconvertit dans le commerce négrier, et un chef de tribu sénégalais, un guerrier redoutable et amateur d'alcool, Tamango, qui fait commerce de ses ennemis en les vendant aux blancs. Lors d'une tractation un peu arrosée avec Ledoux, il lui donne sa femme, Ayché, aussitôt embarquée. A son réveil un peu embrumé Tamango cherche son épouse, la poursuit jusqu'au bateau et se retrouve capturé comme esclave par la capitaine négrier. Tamango se retrouvait donc avec ceux qu'il avait vendus, à fond de cale, avec pour seul avenir l'esclavage dans les Antilles françaises.



Au cours de la traversée Tamango prend l'ascendant sur les autres prisonniers et réussit à s'emparer du navire en tuant tout l'équipage, mais, ignorant la navigation, l'affaire tourne au désastre et le brick dont ils s'étaient emparé devient rapidement une épave où seul Tamango survit. Sauvé par un navire anglais, soigné, il terminera sa vie tragiquement dans l'armée anglaise, victime de son addiction à l'alcool.

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Mateo Falcone - Tamango - La partie de tric..

N°1889 – Juin 2024.



Mateo Falcone - Prosper Mérimée- Librio.



C'est une nouvelle de Prosper Mérimée publiée en 1829 bien que l'auteur n'ait visité la Corse que 10 ans plus tard contrairement à ce qu'il écrit dans sa nouvelle. Il s'est donc informé des coutumes locales et s'est inspiré d'un fait réel.



Mateo Falcone est un notable respecté qui habite en lisière du maquis de Porto Vecchio qui est un havre de paix pour tous ceux qui sont en délicatesse avec la justice et souhaitent échapper aux gendarmes. Il part avec sa femme visiter un de ses troupeaux en laissant la maison à la garde de son jeune fils, dernier né et héritier du nom, Fortunato. Auparavant il avait eu trois filles actuellement mariées, ce qui ne l'enchantait pas. L'enfant voit arriver un homme blessé et poursuivi par la maréchaussée, Gianetto , et accepte de le cacher contre une pièce d'argent. Bientôt les gendarmes arrivent et le garçon, cupide, dénonce celui qu'il a caché contre une montre que lui offre l'adjudant.

De retour Mateo voit Gianetto prisonnier qui accuse son fils de trahison et maudit sa famille. le père brise la montre de Fortunato et l'emmène dans la maquis et après lui avoir fait dire ses prières le tue purement et simplement malgré les supplications de son fils. Il lui fera cependant dire une messe en espérant que Dieu lui pardonnera sa traîtrise.

En Corse l'hospitalité est sacrée, une trahison amène inévitablement une vendetta, et on n'aime guère les gendarmes. D'autre part la Corse est, à l'époque, depuis peu française, l'île ayant été été vendue à la France par la république de Gêne mais les Corse se sentent avant tout Corses. Cette nouvelle qui est une tragédie illustre Les coutumes ancestrales de cette province au XIX° siècle , son sens de l'honneur, sa fierté.
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Vingt mille lieues sous les mers

Il faut je crois,parcourir un florilège de gravures qui ont accompagnées ce texte depuis sa parution pour se figurer l'ampleur imaginaire et grandiose que porte ce récit.

Amateur de Hard Science, les références scientifiques qui s'imposent constamment au lecteur peuvent être pénibles, mais cela n'enlève rien à la magie et à la fonctionnalité du style et elles ne me dérangent pas.

Personnellement j'ai le grand défaut de considérer tout texte même romanesque, comme une source historique et de ce point de vue ce texte est riche en information sur le statut de la science à cette époque de conquêtes et sur les choses que son efficacité pouvait générer de révolutionnaire en vécu et en espoirs potentiels.

Marcher et vivre sous la mer ,ici c'est la proposition scientifique assortie de la puissance et de la connaissance qui en découle.

C'est de la science-fiction, de la science mise en fiction à mon humble avis et sans doutes.

L'auteur mobilise un imaginaire traditionnel grandiose qui est préexistant dans Vingt mille .... aux avancées scientifiques accomplies et promises à l'époque.

Moby Dick cependant n'est pas loin avec son redoutable cachalot.

Les calmars monstrueux entre autres, apportent aussi du grandiose et du spectaculaire épique ,mais avec la validation scientifique de leur existence effective dont l'auteur se fait l'échos et qui les sorts de facto de la mythologie pour les placer dans les océans réels.

C'est un roman plein de péripéties, de rytme et de confrontations d'idées animées par des personnages solides et palpables qui sont droits et qui savent s'améliorer moralement, qui savent aussi se questionner.

Cependant comme toujours jusqu'à maintenant je rejete les textes de Jules Vernes car quand ce n'est pas un racisme viscéral qui les habite, c'est, comme dans ce texte la haine justifiée contre des animaux qui font simplement ce que l'écosystème et leur évolution et leur nature, les conduit à faire.

Sur ce coup là, l'auteur n'est pas très scientifique. Moby Dick ne haissait pas le cachalot auquel il prêtait de l'intelligence et de la méchanceté, alors que Jules Vernes justifie la haine et par là ,la violence et le massacre sanguinaire sans merci, entier et enivrant, d'une espèce animale définie comme une engeance et selon un processus sanguinaire exaltant.

Bref encore une lecture qui me confirme le talent de l'auteur mais aussi son carractere de vaurien bien-pensant nocif adulant la violence.

Sa pensée est pauvre et ce qui le sauve c'est son imagination et son sens du rythme.

Des pages qui adulent le meurtre et non la recherche scientifiqueen dans tout les cas.

Même ado je n'ai jamais apprécié Jules Vernes sur le fond mon libre arbitre était peut-être déjà trop développé, sourire. Mais l'île mystérieuse m'a laissé un bon souvenir qui est peut-être plus construit que réel. Je ne sais pas.
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Pierrette

Balzac est inégal, c'est vrai ; mais qui ne l'est pas ? Il s'englue parfois dans des sujets et des intrigues avortés ou grands prématurés, publiés à la va-vite, faute de temps et d'argent. C'est vrai tout ça. Mais quand il est en forme le bonhomme, ouh ! nom de Zeus ! ça dépote les amis !



Et c'est ce Balzac-là qui justifie que, sitôt qu'on l'a croisé une première fois dans ses moments de grâce, l'on s'évertue sans cesse, à vie durant, à vouloir le croiser à nouveau vers de tels sommets.



J'ai eu parfois à dire du mal de mon petit chéri De Balzac sur Babelio, et ça m'a fait de la peine. C'est peut-être pour cette raison que j'ai encore plus de plaisir aujourd'hui à vous parler de Pierrette, qui est, à n'en pas douter, un excellent opus du gigantesquissime Balzac.



C'est un court roman, qui se prêterait admirablement à une découverte de l'auteur pour un public lycéen, car c'est du Balzac typique, du condensé de " Comédie Humaine " et à sa lecture seule, on comprend aisément que son auteur ait choisi cette dénomination pour chapeauter l'ensemble de son oeuvre.



Tout y est : l'entrée en matière avec la peinture du lieu où va se nouer l'action principale, l'éclairage rétrospectif sur les personnages centraux qui nous permet de mieux comprendre pourquoi ils en sont arrivés à vivre et réagir ainsi. Ici, il y a Pierrette, le personnage prétexte, qui, comme souvent, n'est pas véritablement le personnage principal, un peu à la manière d'Eugénie Grandet ou du Père Goriot, qui ne représentent que des épiphénomènes de la mécanique humaine que l'auteur souhaite illustrer. Enfin, il y a le sens de l'intrigue sociale si propre à Balzac, la modification progressive du rythme vers la grosse accélération finale, etc., etc. ; tout y est ou presque des clefs d'écriture qu'on retrouve régulièrement à différents endroits de la Comédie Humaine.



Pierrette est indubitablement annonciatrice des Rougon-Macquart de Zola. On peut, au bas mot, citer au moins quatre volumes qui s'en inspirent directement : La Fortune Des Rougon, La Conquête de Plassans, Au Bonheur Des Dames, La Joie de Vivre. D'ailleurs, le nom même des Rougon résonnent de façon troublante avec celui des Rogron de Pierrette et Balzac écrit même textuellement à un moment la formule « la fortune des Rogron » à laquelle Zola donnera une descendance.



Mais c'est loin d'être tout, on peut y lire sans peine une amorce des Misérables d'Hugo, où Cosette rime avec Pierrette, où les Thénardier sont des émanations postérieures des Rogron et où les personnages de Marius et de Jean Valjean apparaissent comme un dédoublement du personnage de Jacques Brigaut, qu'on rencontre ici.



Dès les premières pages, nous sommes donc téléportés au sud-est de la région parisienne, dans le Provins des années 1825-1830. L'on voit s'y épanouir la petite mesquinerie commerçante et provinciale d'un couple borné et absolument irrespirable, les Rogron frère et soeur, tous deux célibataires endurcis après une minable — quoique rentable — vie de merciers parisiens.



Parmi les rejetons éparpillés du rameau familial — exactement à l'instar des Rougon-Macquart — on trouve la petite Pierrette Lorrain, cousine des deux affreux, d'au moins vingt-cinq ans leur cadette, et aussi innocente, simple et admirable que les autres sont retors, prétentieux et détestables.



Par un hasard de mauvaises fortunes et d'héritages détournés, Pierrette va donc se retrouver pupille de ses cousins à Provins, elle qui a grandit près des embruns en Bretagne.



Tour à tour faire-valoir social, outil stratégique et enjeu matrimonial, on assiste impuissants à la mise au pilori de Pierrette (Pierrette et le poteau laid, en somme) par son cousin et surtout sa cousine, Sylvie Rogron. Mais c'est sans compter sur l'intervention de Jacques Brigaut, un brave parmi les justes, qui voudrait bien arriver à inverser la tendance et à rendre à Pierrette un peu de sa dignité d'être humain et d'amour tout simplement. Y parviendra-t-il ? Ça c'est ce que je m'interdis de vous révéler.



En tout cas, c'est du très grand art Monsieur de Balzac, ça ne donne pas spécialement le moral, ça ne nous fait pas particulièrement aimer davantage l'humanité, mais c'est admirable dans son style, un patrimoine romanesque à inscrire sur la liste de l'Unesco, car malheureusement, ça a existé et ça existe encore de nos jours, peut-être avec une ou deux modalités différentes, mais si peu, dans le fond.



Bref, selon moi, un ouvrage majeur de la Comédie Humaine et de la littérature française en général, mais ce n'est bien entendu que mon avis, c'est-à-dire une toute, toute petite pierrette à l'édifice.
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La Planète des singes

Dans ce livre, on voit de grands singes civilisés qui font des atrocités sur des hommes sauvages, au nom de la science : je respecte encore plus les animaux depuis que j'ai lu cet écrit !



En 2500, les progrès scientifiques permettent au professeur Antelle, Ulysse Mérou et un jeune homme d'atteindre Betelgeuse, une étoile éloignée. Ils y arrivent en trois ans. Ils "atterrissent" sur un de ses satellites dont la composition de l'atmosphère est identique à la notre, et découvrent des hommes nus et sauvages, ne parlant pas. Tout-à-coup, des singes chasseurs, bottés, habillés, la plume au chapeau, le fusil en bandoulière, parlent un langage articulé, épaulent et massacrent les hommes. Hélius est un docteur Mengele qui pratique d'horribles ablations sur les hommes capturés.

"Que sont ces valeurs inversées ici ?" pense Ulysse, traqué comme les autres humains, et affolé.

.

Ce roman de SF a le mérite de nous questionner : qu'est ce qu'un être supérieur ( pas si supérieur que ça, je l'ai furieusement montré dans L'homme cardinal ) ?

Qu'est ce que l'âme ? la conscience ? la parole est-elle un critère de civilisation ? qu'est ce que le raisonnable ? la sagesse ? l'esprit ? le sens critique ? Au nom de quoi avons-nous le droit de martyriser d'autres êtres ?

Toutes ces questions, qui ne sont pas développées, mais qui me travaillent depuis que j'ai lu le merveilleux "La controverse de Valladolid" de Jean-Claude Carrière, font de ce livre quelque chose d'assez philosophique, quoi qu'on en dise.



Ulysse tombe amoureux d'une belle sauvageonne humaine dont il a un bébé : parlera-t-il ?

Ce n'est pas tout ça, mais Ulysse, le professeur Antelle et le jeune homme finiront-ils par s'en sortir et regagner la Terre ?

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Le Monde d'hier : Souvenirs d'un Européen

Le monde d’hier, souvenirs d’un européen de Stefan Zweig

On suit la vie du jeune Stefan Zweig durant sa scolarité en Autriche, qu’il décrit comme particulièrement ennuyeuse avec cette impression permanente de ne rien apprendre, que le temps qu’il y passait était totalement inutile. Viendra ensuite l’université où il travaillera toujours aussi peu, s’arrangeant simplement et à minima pour valider son cursus.

Ainsi commence cette autobiographie d’un jeune juif autrichien né dans une famille aisée, le père est un industriel et la mère issue d’une famille qui possède une banque. C’est dans ce milieu hyper privilégié que va grandir Stefan Zweig dont les seuls intérêts dès le plus jeune âge sont la littérature et les arts en général. Passionné de poésie il fréquente les cercles où il pourra partager ses écrits et très rapidement proposera ses textes à de prestigieuses revues qui, à sa grande surprise accepteront de le publier. Viendront les voyages en Europe, France, Angleterre, Italie, les rencontres , Romain Rolland, Paul Valéry, Rilke et de nombreux autres. Puis viendront les années sombres, la guerre, la fin de la monarchie, l’espérance en 1919 que, malgré les soucis économiques, l’hyper inflation et les difficultés d’approvisionnement, cette guerre serait la dernière. Grand collectionneur d’autographes( de Vinci, Napoléon, Wagner, Balzac, Nietzsche…)et de manuscrits rares, Zweig va se trouver emporté dans ce tourbillon belliqueux qu’il n’aura pas vu venir et pour lequel, encore plus qu’un autre il n’était pas préparé. En tant que juif il ne se sentait pas menacé d’aucune façon avant la première guerre mondiale, peut-être vivait il dans un microcosme très protégé.

Beaucoup d’informations intéressantes notamment sur la monarchie austro hongroise de l’époque à laquelle Zweig a vécu, l’empereur François Joseph vieillissant, son neveu François Ferdinand héritier présomptif, détesté du peuple qui sera assassiné, la montée des nationalismes, les alliances incertaines.

Un livre que l’on parcourt avec plaisir, Zweig a rencontré à peu près tout ce que le monde de la poésie, des romans, peintres ou musiciens compte en Europe, beaucoup de ces noms célèbres à l’époque ont disparu des mémoires, et c’est un large panorama qu’il dresse de tous ces artistes.

Néanmoins ses réflexions politiques sur l’Europe m’ont paru par trop élitistes pour m’avoir réellement passionné. Ça reste du Zweig très bien construit et écrit, concis et intelligent comme toujours.
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Lettre d'une inconnue

Ce court roman épistolaire est un vibrant cri d'amour d'une amoureuse inconnue à l'homme qu'elle aime secrètement depuis son enfance. Le style talentueux de Stefan Zweig fait passer la pilule de son lyrisme passionné et exacerbé, genre avec lequel généralement j'ai bien du mal.



Les exaltations de cette inconnue m'ont toutefois touchée. C'est l'histoire d'un éblouissement, celui d'une adolescente qui fantasme sur son beau et célèbre voisin de palier, auteur à succès, et qui soupire après un idéal, s'éprenant jusqu'au malaise d'un inconnu qu'elle croit connaître en l'observant par le judas de sa porte.



Grandie, indépendante, séduite, cette jeune ingénue se retrouvera dans une situation délicate pour l'époque : devenir fille-mère comme on disait alors, maman-solo comme on dit aujourd'hui. Vénérant l'enfant reçu comme un don insoupçonné de l'homme à qui elle a voué toute son existence et toute son âme, la belle inconnue devenue demi-mondaine pour subvenir à ses besoins et à ceux de son enfant ne pourra avoir d'autre destin qu'une issue tragique touchant au sublime.



A travers ce roman sous forme d'une longue épître, l'inconnue nous donne une belle leçon d'amour, de fidélité, de foi, de folie et de désillusion. Tous les ingrédients d'un poème éternel.





Challenge MULTI-DEFIS 2024
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Les mille et une nuits : Ali Baba et les qu..

Je n'avais encore jamais lu « Ali Baba et les quarante voleurs », issu des contes des Mille et une nuits, bien que j'en connaisse très bien l'histoire. Les adaptations et inspirations en sont nombreuses, je me souviens notamment du film avec le génialissime Fernandel. Trouvé il y a peu dans une boîte à livres, voilà que l'occasion de réparer cette lacune se présente.



Dans ce conte oriental, qui date de plusieurs siècles, on y suit un homme, à l'origine pauvre, coupeur et vendeur de bois, devenir tout à coup riche en découvrant une caverne secrète contenant un sacré pactole. On y suit également les quarante voleurs, à qui appartient le-dit pactole, et voulant se venger d'avoir été volés à leur tour. Et pour finir, on y suit une esclave, au service du nouveau riche, déjouant les plans des voleurs et sauvant la vie de son maître à plusieurs reprises.



Que dire de ce conte que, je suppose, tout le monde connaît, de près ou de loin ?



Si ce n'est qu'il faut un petit temps d'adaptation pour se faire au style d'écriture très très classique, accepter les formulations et vocabulaire d'un autre temps, parfois plombants il faut bien le reconnaître. Mais une fois le parti pris, la lecture coule toute seule et s'apprécie de mieux en mieux.



L'histoire en elle-même n'est pas folichonne mais est plaisante dans son ensemble. J'ai apprécié qu'une femme, esclave qui plus est, se trouve être plus maligne et intelligente que son maître, pas niais mais disons plutôt crédule. J'ai apprécié la manière dont il le lui rend à la fin, conscient que sans elle, il serait mort dès le début de l'histoire (ce qui en aurait fait le conte le plus court de tous les temps). C'est finalement elle l'héroïne, et non Ali Baba. À savoir que le titre original « Histoire d'Ali Baba et de quarante voleurs exterminés par une esclave » est tout de même bien plus éloquent...



Pas mécontente d'avoir enfin découvert ce conte dans sa version originale. Je n'en lirai pas tous les jours, du fait du style un peu lourd et désuet, mais je reviendrai sans aucun doute vers l'un ou l'autre de ces fameux contes des Mille et une nuits.

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Les raisins de la colère

La dernière page est magnifique ; Les raisins de la colère gagnent, à la dernière page, leur 5ème étoile.

Vous n'oublierez pas les personnages de ce livre.

Non, surtout Tom Joad, qui, joué par Henry Fonda avec ses yeux perçants en 1940, doit être sublime. Mais il y a surtout M'an, la mère, pilier de la famille, et sans elle, dans cette déroute et cette fuite continuelle, cette famille se serait éparpillée. En groupe et en famille, on a plus de force.



Dans les années 1930, les tracteurs des grands propriétaires côtés en bourse, bousculent les petits agriculteurs endettés de l'Oklahoma : les conducteurs des tracteurs, impassibles, sous les yeux des paysans médusés, disent : "Maintenant, ce terrain est à la banque. partez !" Et comme par miracle, des prospectus vantant le besoin de main d'oeuvre en Californie, et poussent les fermiers à prendre la Nationale 66 vers l'ouest. Plus de cent mille fermiers s'exodent ainsi, peu avant l'exode français, par exemple. Heureusement, pour ce qui est de la famille Joad, les fils, al et Tom s'y connaissent en mécanique, et achètent un camion d'occasion. Tout au long du voyage, le lecteur a peur que le vieux camion tombe en panne. le Grand'Pa ne veut pas quitter sa terre. le grand fils, bizarre, s'en va seul au fil de l'eau lors d'une halte. M'an, affolée, regroupe ses poussins ...



John Steinbeck a cette écriture américaine "rough"que j'aime bien, et que reprend Jim Harrison dans Légendes d'automne. La traduction est bonne, et je retrouve le langage de mon grand-père. Cependant, j'ai souffert avec les personnages lors des 500 pages de ce magnifique livre. Livre qui montre bien que les puissants manipulent les petits, et donc, 4 étoiles, mais la fin étant sublime, je lui accorde la cinquième !
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Othello

Au début du XVIIe siècle, Shakespeare invente Iago.



Quel personnage exceptionnel ! Un manipulateur des âmes hors pair, qui sait et veut employer toutes les ruses, toutes les dissimulations pour parvenir à ses fins. Des fins qui ne doivent améliorer le sort que de son seul ego.

Tout être vivant autour de lui n’est qu’une pièce sur son jeu d’échec. Elle doit être déplacée, retournée comme un gant, trompée, égarée, flouée, sacrifiée si besoin. Iago est un marionnettiste.



Personne ne repère son jeu. Ni le grand général Maure au service de Venise Othello, chez qui il va efficacement instiller une jalousie féroce, qu’il va persuader que sa toute nouvelle épouse Desdémona le dédaigne déjà pour son lieutenant Cassio. Ni Cassio qui ne comprend pas pourquoi il perd la confiance de son général, et demande à Desdémona d’intercéder en sa faveur, ni Desdémona elle-même qui ne saura jamais pourquoi son amant la hait si soudainement et injustement.

Iago insuffle le doute, organise les « preuves », permet aux animosités de se déployer. Mais en apparence il est l’ami de tous, le fidèle conseiller et ami.

Un chef d’œuvre de perversité.



Et pourtant…

Pourtant – Iago le dit lui-même – il improvise. Il tisse son plan au fur et à mesure, le cultive comme un jardinier qui choisit ses tactiques en fonction de la météo. Ce plan a de la chance de « se dérouler sans accroc », comme dirait Hannibal de L’agence tous risques. Il ne tient que parce que, par miracle, les marionnettes ne se parlent pas.

La fragilité de la construction apparait au dernier acte, alors que les acteurs ont enfin la possibilité d’échanger leurs informations. La duplicité de Iago éclate comme un feu d’artifice.

Mais il est trop tard. Le mal est fait, même si le scélérat n’en profitera pas.



Une pièce dont j’ai savouré chaque phrase.

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