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4,05

sur 4261 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Giuliano Empoli conseiller politique et superbe écrivain italien dont j'avais énormément apprécié son essai très instructif «  Les ingénieurs du chaos » ( Dommage, très peu de lectrices et lecteurs sur Babelio ! ), nous revient avec un livre intéressant et un sujet actuel, les coulisses du Kremlin à travers un personnage librement inspiré de l'ex- éminence grise de Poutine, Vladislav Yuryevich Surkov. Cet homme appelé « Le mage du Kremlin », le « nouveau Raspoutine », contribuera de façon décisive à l'édification du pouvoir du Tsar durant les quinze années qu'il passera à son service. Mais….depuis mi-avril 2022 la rumeur est qu'il est en arrêt domiciliaire par ordre du Tsar.

Surkov se distingue de la plupart de ses semblables par son origine. L'homme vient d'une famille ancienne et aisée, il est cultivé et l'argent ne l'intéresse pas vraiment. A vingt ans il s'inscrit à l'académie d'art dramatique de Moscou et commence à vivre la vie désordonnée des théâtreux….de là il convertira son expérience théâtrale en carrière de producteur de télévision, dont le grand patron est un milliardaire qui s'appelle Boris Berezovsky. Ce dernier découvrant ses talents de performance artistique, lui propose de passer à la vitesse supérieur en cessant «  de créer des fictions pour commencer à créer la réalité ». Car Eltsine est mourant et Berezovsky qui en faites gouverne à sa place, a choisi un chef du KGB , un certain Vladimir Poutine pour lui succéder. Il demande à Surkov d'en faire la mise en scène et la régie pour la suite. Là je ne suis absolument pas dans l'ironie, tout ce qui va suivre est du théâtre d'avant-garde jusqu'à nos jours , même cette terrible guerre actuelle qui sévit tout un peuple et un pays, et dont malheureusement nous n'en connaissons presque rien de ses coulisses , bien que tout soit déjà cartes sur table. Car les choses comme dit Surkov sont beaucoup plus simples qu'elles ne paraissent, il suffit de voir et de les suivre. En tout cas pour lui ça était une expérience unique , celle de pouvoir suivre, jour après jour, un drame élisabéthain qui se déployait et continue à se déployer sur la scène mondiale…..

A part la terrible réalité qui se cache derrière le Pouvoir politique russe, ( valable actuellement à divers degrés pour tous les pays même pour ceux qui se déclament « démocratiques »), plus précisément celui de Poutine, ce livre livre aussi le chaos et l'absurdité de la situation qui règne en Russie, depuis la chute du communisme, où la réalité dépasse largement la fiction,
« Vous pouviez sortir de la maison un après-midi pour aller acheter des cigarettes, rencontrer par hasard un ami surexcité pour je ne sais quelle raison et vous réveiller deux jours plus tard, dans un chalet à Courchevel, à moitié nu, entouré de beautés endormies, sans avoir la moindre idée de comment vous étiez arrivé là. Ou bien, vous vous rendiez à une fête privée dans un club de strip-tease, vous commenciez à parler avec un inconnu, gonflé de vodka jusqu'aux oreilles, et le lendemain vous vous retrouviez propulsé à la tête d'une campagne de communication de plusieurs millions de roubles. »

Un livre passionnant et instructif qui fait écho à son précédent, dont le coeur du sujet reste l'ascension de Poutine. au pouvoir. Totalement pénétré par le rôle de l'intrigue de la pièce, devenue son histoire, il n'a nul besoin de jouer, celle-ci coule dans ses veines. Avec un tel acteur un metteur en scène n'a presque rien à faire. Il doit se contenter de l'accompagner. Et c'est ce que fera Surkov, tout en gérant un des courants de fond qui régisse la société, le flux de la rage, qui selon les périodes augmentent ou diminuent mais ne disparaît jamais…..

Tous les faits cités dans le livre on peut les retrouver sur internet. Est-ce-que l'auteur a rencontré Surkov Ou a-t-il obtenu ses confidences par un autre moyen ? Je n'en sais rien , mais l'ensemble colle parfaitement à la réalité, ce qu'il confirme lui-même par ailleurs. Un livre intéressant facile à lire et qui aide mieux à comprendre comment on en est arrivé à cette guerre terriblement violente aux portes de l'Europe grâce à une politique de fil de fer . « Comment fais-tu quand tu veux casser un fil de fer ? D'abord, tu le tords dans un sens, puis dans l'autre » . La suite n'est pas difficile à deviner . Un livre publié récemment que je conseille fortement ainsi que son précédent , « Les ingénieurs du chaos ».

« Les gens pensent que le centre du pouvoir est le coeur d'une logique machiavélique, quand en réalité c'est le coeur de l'irrationnel et des passions, une cour d'école, vous dis-je, où la méchanceté gratuite a libre cours et prévaut immanquablement sur la justice et même sur la pure et simple logique…. tout ce qui fait croire à la force l'augmente véritablement. »
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L'été 1991, en juillet, je me promenais dans Moscou avec mon ami russe Sacha. Nos pas nous firent passer devant les locaux de la Loubianka. Soudain, mon ami m'intima de chuchoter, de parler bas. Mon étonnement fut grand. Je lui fis remarquer qu'aujourd'hui, il n'y avait plus de raison d'avoir peur.
Il me regarda gentiment et me dit: Tu ne peux pas comprendre, tu n'es pas russe.
Cette petite anecdote pour dire le bémol que je mettrais à l'auteur de ce roman.
Je pense qu'effectivement, même animé d'une belle plume et des meilleures intentions, il est difficile de dire ou penser ce qu'un russe aujourd'hui ressent face à la tragédie de son pays.
Ce bémol souligné, le mage du Kremlin se lit avidement. le début, dans cette maison où le narrateur nous conte l'histoire de sa famille, de ce grand-père extraordinaire, de son père m'ont beaucoup plu. On a l'impression d'être dans un roman de Tolstoï ou une récit de Tourgueniev.
Giuliano da Empoli nous conte, car à mon sens il est admirablement conteur, l'histoire de Vadim Baranov alias Vladislav Sourkov, conseiller de Poutine pendant 20 ans.Et, nous livre les arcanes du pouvoir.
"Le pouvoir est comme le soleil et la mort, il ne peut se regarder en face. Surtout en Russie"
Une des phrases les plus percutantes de ce roman. A méditer intensément.
Un des mérites de ce roman est de nous restituer les événements qui ont mené Poutine à son ascension. Car nous avons beau être abreuvés d'informations, on les oublie vite et notre mémoire n'en garde que peu de traces.

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Metteur en scène et producteur de télévision, Vadim Baranov, issu d'une famille de lettrés russes, devient l'un des principaux conseillers de Vladimir Poutine, le Tsar.
Nous l'accompagnons pendant vingt années au service du maître, et assistons à la transformation du pâle dirigeant de la police politique en un implacable dictateur...

À n'en pas douter, l'auteur, lui-même conseiller politique, connaît son sujet. Pourtant, il ne parvient pas totalement à convaincre. L'image qu'il donne de l'ascension de Poutine, et des jeux de cour autour de lui, est un peu trop convenue, trop conforme à une image médiatique. D'autant que G. da Empoli intègre parfaitement des faits réels dans un texte de fiction, ce qui entretient l'ambigüité...
Le propos manque de nuance, sauf en ce qui concerne les états d'âme du narrateur, conduit à renoncer à son amour, puis à trahir ses mentors, pour rester fidèle au maître du Kremlin. Heureusement, la fin lui réserve une belle surprise.
La narration à la première personne (je, nous) n'aide pas. On sent que le narrateur a envie de prendre de la distance, mais le "je" ne l'y aide pas, le ramenant en permanence au coeur du pouvoir et des événements. Je ne suis pas certain que l'auteur ait fait le meilleur choix.
Néanmoins, le livre se lit vite et facilement ; un peu comme un thriller...


Lien : http://michelgiraud.fr/2023/..
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De la révolution bolchevique en passant par la chute de l'union soviétique pour finir sur l'ascension de Poutine au pouvoir fin des années 90, ce récit mélangeant faits réels et fiction est des plus intéressants. Il prend fin avant l'invasion russe en Ukraine.
La partie la plus intéressante est sans nul doute l'ascension de Poutine au pouvoir et comment à la lecture de cet ouvrage on se sent au plus près de celui-ci.
La Russie de Poutine scinde l'image du pays après l'ère de Eltsine où Poutine aura vécu cette période comme un affront envers la Russie, sa patrie sous le gouvernement Clinton.
Mais il est question aussi de l'après chute de l'URSS où une jeunesse russe se retrouve perdue et livrée à soi-même là où cette jeunesse est passées du cloître hermétique de l'union soviétique à l'ouverture sur le monde occidental. Mais celà ne durera pas longtemps.
Poutine même si au début avant de devenir président est d'un caractère modéré, se révélera par la suite être un chef d'état des plus méticuleux, stratège, des plus redoutables et froid.
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Été 99, Boris Eltsine n'est qu'un ours sibérien alcoolique et fatigué, il est devenu un poids qui risque de précipiter tout le monde dans l'abîme. Pour le remplacer on songe à un fonctionnaire, chef du FSB ex KGB, qui toute sa vie n'a pas fait autre chose que d'exécuter des ordres et faire son devoir : Vladimir Poutine.
Inspiré de faits et de personnages réels, ce roman passionnant nous entraîne au coeur du Kremlin et nous éclaire sur les dessous du pouvoir en Russie. Ce récit a le mérite de montrer que Poutine ne fait que répondre aux aspirations du peuple russe lassé de l'affaiblissement de leur pays et de l'emprise des oligarques souvent des mafieux. le summum de l'humiliation a été atteint devant les caméras du monde entier lorsque Bill Clinton se moque ostensiblement de Boris Eltsine à grands coups de tapes dans le dos. le souhait de tout un peuple est de retrouver l'ordre et la splendeur de la grande Russie. Les oligarques ne voient en Poutine qu'un valet qui leur obéira les doigts sur la couture du pantalon et dont les premières mesures seront de les faire arrêter et les remplacer par des hommes de confiance.
Un éclairage sur le président russe, sur sa personnalité glaçante et cynique, sur son fonctionnement, ses raisonnements, et surtout sur ce qui devait le mener irrémédiablement à l'annexion de la Crimée et vers la guerre actuelle en Ukraine.
La construction est habile, le lecteur pénètre dans l'intimité de Vladimir Poutine à travers les souvenirs de Vadim Baranov qui fut son conseiller pendant quinze années. On l'appelait le mage du Kremlin, le nouveau Raspoutine, il a contribué de façon décisive à l'édification du pouvoir de Poutine. Bien que ce livre soit une fiction inspirée par la personnalité de Vladislav Sourkov éminence grise du Tsar Poutine, le rappel de faits historiques lui donne toute sa crédibilité.
Une réflexion sur le pouvoir, sur le rôle trouble des USA et de la CIA et sur la montée des nouvelles technologies qui pourrait bien changer la direction du monde de demain.

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J'aime beaucoup les critiques qui ne donnent qu'une étoile faiblarde à ce roman en expliquant qu'il n'apprend rien de plus qu'un lecteur assidu du Monde diplo ne sache déjà. Eh ouais. C'est sans doute vrai parce je préfère lire le mage du Kremlin plutôt que des articles d'analystes bien informés.
Du coup, doit-on définir la fiction comme un simple glaçage qui fait oublier la roborative farine de châtaigne qu'on avale d'une même bouchée ? La littérature synthétise, ce qui est déjà beaucoup : mais elle permet aussi de se décentrer et d'obtenir un point de vue inégalé sur la psyché de l'adversaire. Or n'est-ce pas justement le talon d'Achille de l'Occident que ce constant sentiment de supériorité qui nous empêche de prendre la mesure de nos ennemis (volontiers considérés comme des ignares ou des sauvages) et nous permet d'ignorer à quel point nous faisons fi de nos propres valeurs ?
Sauf que, à vouloir écrire le Prince du XXI° siècle, da Empoli finit par relativiser un peu trop la morale politique. Il ne sauve pas Poutine, mais son conseiller, si. Ce qui est d'autant plus embêtant que cela ressemble à un plaidoyer pro domo.
Car que fait-elle exactement, cette éminence grise qui parle à l'oreille du dictateur ? Elle fait de la politique, elle imagine les moyens nécessaires à l' obtention et surtout à la conservation du pouvoir. Ce n'est pas toujours joli joli, mais un homme dont le plus grand succès serait d'avoir réussi les Jeux de Sotchi n'a rien de détestable. Elle manque sacrément de sang, cette chronique du règne de Poutine. On parle des attentats attribués aux Tchétchènes qui en furent d'ailleurs certainement les auteurs, d'Anna Politkovskia dont le nom n'est même pas prononcé, des bombardements du Donbass tellement euphémisés que seule une poupée semble en avoir été victime. Ne restent du règne de Poutine que les saloperies bénignes, comme le labrador qui terrorisa Merckel (mais Clinton avait humilié la Russie en riant devant un Eltsine éméché : un prêté pour un rendu, donc).
Et puis, le chapitre final comme justification ultime de la dictature : qui sommes-nous, occidentaux, pour critiquer la Russie alors que notre addiction à Internet fait de nous des esclaves volontaires ?
J'en ai jusque là que les imperfections criantes des démocraties servent de justifications aux dictatures. C'est très bien de déstabiliser le lecteur, de lui faire entendre d'autres vérités. Je suis même prête à pardonner que la longue confession du narrateur soit amenée avec autant d'invraisemblance, ou que son histoire d'amour avec une femme fatale d'anthologie soit aussi clichetonneuse. Mais la dictature d'Internet comme contrepoint à la Russie et la rédemption du conseiller fou d'amour pour sa gamine, c'est quand même too much. Je remercie da Empoli pour sa leçon d'histoire mais j'aurais préféré un récit qui n'exonère pas aussi facilement le serviteur du prince.
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Avec des faits avérés, des témoignages rapportés, des anecdotes filmées, des documents connus ou moins connus mais qui restent fiables, Giulano Da Empoli reconstitue de façon romanesque et crédible, réaliste, la personnalité du "tsar" de la Russie actuelle et de son entourage.
Un livre qui permet bien des éclaircissements pour mieux saisir la situation actuelle et les réactions épidermiques , la politique menée par son dirigeant.
Les traits d'humour, d'ironie rendent cette lecture particulièrement attachante.
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Un livre assez extraordinaire car bien que sous forme de roman, il nous présente de véritables clefs pour comprendre tant la Russie de ces dernières années que son président, Vladimir Poutine.

le choix de la forme romanesque à plusieurs avantages, outre le plaisir de lecture qu'il donne à son lecteur, il permet à l'auteur de nous faire entrer dans la tête du président.

Tous les faits sont exacts, quasi tous les personnages interviennent sous leur vrai nom. Font exception à cela, Vadim Baranov, le personnage principal, au destin inhabituel, faisant partie du milieu artistique, réalisateur de télé-réalités qui se retrouve conseiller du président et artisan de son pouvoir avant de sortir de son entourage.
A celui-ci l'auteur ajoute trois personnes son père, apparatchik du régime, son grand-père et une femme.

le roman démonte le processus qui a permis à Poutine, quasi inconnu lorsqu'il fut choisi par Eltsine, s'asseoir et solidifier son pouvoir, inamovible depuis 22 ans.
Ce pouvoir se crée à partir du chaos, amenant les Russes à choisir l'ordre, Poutine profite des événements tragiques, se montre autoritaire et cruel. Ce pouvoir s'alimente des terreurs du peuple devant un attentat, devant la guerre de Tchétchénie car Poutine s'y montre implacable.
Ce pouvoir se maintient par la création d'un parti pro-Poutine mais aussi de faux partis d'opposition qui maintiennent un désordre dont il se sert.
La main-mise sur la télévision et l'utilisation des médias sociaux et de la désinformation sont de précieux atouts.
J'ai eu l'occasion de faire un voyage en Russie il y a cinq ans et j'ai été étonné, frappé de constater à quel point Gorbatchev, tant aimé par nous, y était haï alors que leur président était respecté ayant mis fin au désordre inouï connu par le pays à la disparition de l'URSS, et ayant redonné de la fierté aux Russes humiliés par la chute de leur empire.
le mage de Berlin m'a beaucoup éclairé sur la construction de ce pouvoir, par une mécanique psychologique, Poutine est arrivé à être le tsar, le maître suprême, il a écarté les oligarques, il gouverne seul, il est au-dessus de tous.
le livre est intéressant pour l'histoire de la Russie des années quatre-vingt-dix.
Il nous montre comment le pouvoir russe juge notre société occidentale

Baranov se révèle un homme cultivé, il a donné à Poutine une idéologie, la verticalité du pouvoir à l'opposition de l'horizontalité de nos gouvernants occidentaux, l'importance de la force, le concept de démocratie souveraine, je ne les explique pas ici, Giuliano da Empoli le fait de manière plus simple sous la forme d'un roman.
Lisez-le.
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Le dictateur et sa société
OU
rira bien qui rira le dernier, dit-il.

Il ne faut pas rappeler le contenu de ce roman aux 300 critiques et 2000 notations rien que sur Babelio. C'est l'histoire d'un proche de Poutine, de ce dernier, de leurs relations et de l'évolution de tout ce système. Comment un haut fonctionnaire devient une abstraction : non plus un être de chair et de sang, mais le point focal du pouvoir. Un mythe incarné - celui du souverain, du Tsar - un être devant qui tous doivent baisser les yeux. Une sorte de "divinité " sombre, enfin.

Pour moi ce livre a posé trois problèmes. D'abord celui du monomane fonctionnel. J'en discutais avec une amie : j' ai vraiment peine à croire qu'un être totalement concentré sur l'acquisition du pouvoir - ou de l'argent ou d'autre chose - ne devienne pas fou au point de ne plus du tout pouvoir fonctionner dans la société. Hitler, Staline, Mussolini , maintenant Trump, sont des dangers publics. Mais ils ne seraient pas en mesure de vivre dans le monde réel, de se maintenir dans un emploi, d'avoir une relation, de vivre une vie normale. Ils ne peuvent fonctionner que dans le monde artificiel qu'ils se sont construit, à nos dépens bien sûr. Alors, il faut envisager une lente convergence du futur dictateur et son futur monde artificiel, un processus d'influence mutuelle où un fou reconstruit la société qui l'environne à son image. Cela me parait très difficile à concevoir, mais il est vrai qu'il y a des précédents.

Le second problème vient de l'attirance que ce genre de personnage semble pouvoir exercer sur un grand nombre de gens. Bien sur, les russes ont une longue expérience de la construction de cultes de la personnalité Poutine le judoka, Poutine aux abdominaux d'acier, Poutine aux commandes d'un bombardier stratégique, Poutine observant le lancement de missiles intercontinentaux. A part cosmonaute, on l'aura mis à toutes les sauces. Comme le petit père. Et la Russie semble effectivement demander surtout qu'on la protège de troubles intérieurs et de menaces extérieures. Il faut donc habiller l'homme en commandeur, et si des troubles se présentent, la partie peut commencer. Il y aurait, dans l'histoire russe, un 14ième siècle particulièrement mal vécu, qui aurait laissé un traumatisme fondateur dans l'âme collective, fondant cette exigence de sécurité, même à tout prix. Je veux bien croire qu'il s'agit de voisins particulièrement dangereux. Et que sur un tel terrain, la constructiuon du dictateur et de sa société puisse s'entreprendre.

Le troisième problème concerne le dernier volet, spéculatif, du livre. Il est proposé que des catastrophes à venir généraliseront à l'ensemble du monde cette exigence inconditionnelle de sécurité en face de menaces de plus en plus formidables. Au bout de ce tunnel, l'auteur prédit (sérieusement ? ) la domination des machines. Même le dictateur ne serait plus que la marionnette d'un logiciel. Chaque époque a ses mythes, ses promesses de paradis et ses angoisses d'enfer. Et l'homme a toujours été fasciné par ses propres créations. Aujourd'hui, ce n'est plus Dieu, ce n'est même plus l'homme, c'est la machine qui remplit l'espace imaginaire. Il s'agit de projections : l'homme a peur de ce qu'il est devenu, l'homme se sent seul, il est pris d'une sorte de vertige et projette les angoisses qui en découlent sur ses propres créations. Ordinateurs, robots et -pourquoi pas ? - extra-terrestres peuplent un imaginaire que l'on n'arrive plus à distinguer d'un réel qui, d'ailleurs, parait de plus en plus incompréhensible. L'homme vit dans la "réalité augmentée" d'un quotidien imbriqué d'imaginaire. Un quotidien qui repose, telle la première lamelle d'une monstrueuse lasagne, sur une structure à la profondeur insondable...

L'homme, désorienté, a peur. Il y a état de crise. Cela suffira t-il pour généraliser l'avènement des Poutine et des Trump ? Voir des systèmes cybernétiques enfantant des terminateurs ? Et bien non, je ne le crois pas. Aux jeux video et aux fantaisies de science-fiction, fussent-elles réalisables, je préfère la compagnie et l'enseignement des livres d'histoire. Et ce que l'histoire nous enseigne, c'est qu'elle est une succession de crises et de rebonds. Nous avons déjà survécu à 25 siècles, ou à 40 siècles, de crises. L'on m'objectera que cette fois-ci ... Allons. Allons donc. A quoi pouvait bien ressembler la catastrophe naturelle qui provoqua ces migrations, et les guerres qui s'en suivirent, aux villes crétoises, à l'Egypte et à tant de peuples méditerranéens? A la fin du monde. Nous appelons cela la crise de l'age du bronze moyen. Ou l'éffondrement de l'empire romain d'occident ? Ailleurs : combien de fois la Chine n'est-elle pas née à nouveau ? Nous la créditons de 5000 ans d'histoire. L'histoire, justement, n'est qu'une succession de crises. de dictateurs, aussi, c'est vrai. Mais jamais l'histoire ne s'est arrêtée définitivement. Il n'y a jamais eu de mot " Fin". Je veux croire, moi aussi, au futur de l'homme. Je ne sais si vous ou moi en ferons partie. Mais il y en aura un.
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Vadim Baranov ,pas du tout prédestiné à faire de la politique , va être approché pour entrer dans l'entourage proche de Vladimir Poutine qui « apprécie sa liberté » . Poutine qui déplore une Russie livrée au capitalisme dont les richesses sont pillées par quelques oligarques opportuns ,est bien décidé à redonner à la Russie sa grandeur d'antan .Vadim va participer à l'élection de Poutine et devenir l'un des conseillers proche du président et nous décrire les arcanes du pouvoir russe .Un bon roman .
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