« Le sujet était toujours présent. »
Il est non seulement présent, mais s’inscrit dans une continuité de temps qui défie l’entendement. Le féminicide est le plus gros sujet silencié de toute l’histoire de l’humanité. On peut mourir d’être une femme...Mourir d’être et d’avoir un corps de femme. Mourir d’appartenir au genre féminin, et se retrouver « malencontreusement » dans un système de violences qui nie ces êtres-sujets, et empêche même justice et reconnaissance, où que les femmes soient sur cette terre. Les jeunes mortes, c’est une dénonciation de cette réalité terrible de la condition féminine. Ces pages parlent de l’Argentine et des crimes impunis de trois jeunes femmes, mais les prénoms ou les lieux sont interchangeables puisque ce crime spécifique, est universel…
« La mémoire s’est ravivée. »
13 ans. 13 ans, c’est l’âge ou Selva Almada apprend le meurtre d’une jeune fille, à la radio. 13 ans, c’est tôt, pour saisir la violence du monde. 13 ans, c’est la première empreinte du traumatisme de cette réalité où des filles peuvent être tuées, chez elle, dans leurs lits. Mais Selva Almada va vite comprendre qu’elles meurent, partout, tout le temps, dans l’indifférence la plus totale. Les jeunes mortes, c’est un livre hybride entre enquête et récit, qui retrace les histoires tristes, et malheureusement similaires à tant d’autres, de trois jeunes femmes qui n’ont jamais obtenu justice. 30 ans plus tard, les affaires ne sont toujours pas résolues. Même en allant gratter dans les archives, même en allant chercher témoignages et preuves, directes et indirectes, même en faisant appel au paranormal, Les jeunes mortes, Andrea Sarita et María Luisa, sont, encore, victimes, de la silenciation. Et si Selva Almada avait oublié ces jeunes femmes, le monde les aurait oubliées, aussi. Or, ce n’est pas ce qui c’est passé et c’est heureux. Le devoir de mémoire est sauf, grâce à ce livre bouleversant. Entre faits divers et divers intimes, l’autrice nous confie de la difficulté d’être femme en Argentine.
« Je crois que ce que nous devons faire, c’est reconstruire le regard que le monde portait sur elles. »
Ce livre est nécessaire. Indispensable, à vrai dire. Il faut montrer la cruauté des féminicides. Mettre bien nos yeux dessus. Il faut invoquer la Huesera. La supplier de faire sa mission sur terre. Ces jeunes mortes en ont besoin. Toutes les femmes en ont besoin. Aujourd’hui, la Huesera c’est Selva. Il va falloir beaucoup de textes de cette trempe et de cette force engagée, pour remettre des chairs sur les os, renforcer la lumière sur ces ténébreuses histoires de violences, et faire hurler les louves sur ce nouvel horizon. Merci à Selva Almada d’avoir donné une première impulsion, et espérons qu’elle soit suivie, amplifiée, démultipliée pour qu’enfin, la justice s’empare de ce problème de société omniprésent. Coup de cœur 💔❤️
« On dit que quand on quitte un cimetière, on ne doit regarder derrière soi sous aucun prétexte. »
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