La propagande est avant tout une technique de psychologie de masse. Le modèle sur lequel elle se fonde est celui de la personnalité autoritaire, et ce aussi bien aujourd’hui que du temps de Hitler ou dans les mouvements du lunatic fringe, en Amérique ou ailleurs. L’unité tient dans cet appel à la personnalité autoritaire. On répète constamment que ces mouvements promettent quelque chose à tous, et c’est exact dans la mesure où il s’agit là d’une caractéristique de l’absence de théorie. Mais c’est tout de même faux dans la mesure où cet appel au caractère autoritaire est caractérisé par une unité très spécifique et très ciblée. Vous ne trouverez jamais ne serait-ce qu’une seule expression qui ne corresponde pas au schéma de la personnalité autoritaire. Voir démasquée cette structure de l’appel à la personnalité autoritaire, voilà ce qui chauffe à blanc les extrémistes de droite, ce qui prouve, dirais-je qu’on touche un point névralgique en s’y attaquant. Cette propagande ne rend pas conscientes les tendances inconscientes qui alimentent la personnalité autoritaire, bien au contraire, elle les refoule encore plus loin dans l’inconscient, elles sont maintenues artificiellement au stade inconscient.
On trouve également, dans le même contexte, la « méthode salami », pour reprendre l’expression allemande désinvolte qui la désigne ; elle consiste à prendre un ensemble complexe et à en découper un morceau, puis un autre et encore un autre. Par exemple, avec cette pédanterie pseudo-scientifique qui caractérise ces mouvements, on remet en question le nombre de juifs assassinés. On commence par dire : « oui, ils n’étaient pas six millions, mais seulement cinq et demi », et une fois qu’on en est là, on commence d’abord par exprimer des doutes sur le fait qu’il y ait eu des gens assassinés, puis on présente les choses comme si l’inverse s’était produit. Je crois donc qu’il faut accorder une attention tout particulière à ces questions.
Toutefois, même le tabou portant sur la mention des juifs devient un instrument de l’agitation antisémite, sous la forme de ce clin d’œil qui signifie : « Nous n’avons le droit de rien dire là-dessus, mais nous nous comprenons, entre nous. Nous savons tous ce que nous entendons par là. » Et le seul fait de mentionner, par exemple, un nom juif est suffisant pour que cette technique allusive provoque déjà certains effets.
J’aimerais tout de même vous dire encore une fois qu’il n’y a jamais eu de théorie réellement constituée dans le fascisme, qu’il a toujours été sous-entendu que l’important était le pouvoir, une pratique sans concept et pour finir un pouvoir inconditionnel, et que face à cela, l’esprit, tel qu’il s’exprime dans la théorie, est quelque chose de secondaire.
Cette propagande ne rend pas conscientes les tendances inconscientes qui alimentent la personnalité autoritaire, bien au contraire, elle les refoule encore plus loin dans l’inconscient, elles sont maintenues artificiellement au stade inconscient.
Assister à l'après-midi Marxisme et École de Francfort, dans le cadre du colloque « La philosophie comme critique de la culture ? ».
- 14h : Jean-Claude Monod (CNRS-Archives Husserl)
« Kulturkritik, satire, critique sociale: quelles armes pour la philosophie ? »
- 15h : Katia Genel (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne/Centre Marc Bloch)
« Des pathologies sociales à la santé sociale: Adorno, Habermas et Honneth »
- 16h20 : Franck Fischbach (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
« Faut-il choisir entre la critique sociale et la Kulturkritik ? »
Un colloque organisé par le centre SPH de l'Université Bordeaux Montaigne, en partenariat avec la Librairie Mollat et l'Université de Bordeaux.
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