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EAN : 9782882414113
166 pages
Bernard Campiche (01/09/2016)
4.33/5   15 notes
Résumé :
Pietro Cerretani n’est pas celui que l’on croit, ce brave type qui mène une existence paisible, cet architecte à qui tout semble réussir. Le mensonge sur lequel il a édifié son confort se fissure lorsqu’il est contraint de revenir à Florence pour veiller une soeur en fin de vie. Le retour dans sa ville d’origine signe les prémices d’une confrontation d’une singulière violence avec un passé qu’il s’est efforcé d’enterrer, où rôdent la maladie, la gangrène des liens f... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Un grand coup de coeur que ce livre, le double bonheur de la découverte de cette plume féminine suisse, ainsi que celle de l'éditeur, Bernard Campiche, bibliothécaire de formation.

Une très belle lecture…poétique, bouleversante… faite par le plus grand des hasards, en me promenant dans le quartier De Saint-Paul, rue des Francs-Bourgeois, j'ai découvert la librairie du Centre culturel suisse…des trésors, grand nombre d'auteurs inconnus, dont cette dame, Sylvia Härri, dont j'ignorais jusqu'au nom ! .

L'amour d'un grand frère pour sa petite soeur… Tout est lumineux jusqu'aux trois ans de celle-ci, où elle bascule dans le silence…où les non-dits s'installent douloureusement dans cette famille qui se déconstruit avec cette petite fille malade, qui devient « autre » …
« Je ne saurais dire combien de temps cela t'a pris de passer de la planète des mots à celle de leur absence. (…) Tu parles de moins en moins, tu ne poses plus de questions (…) Les paroles se raréfient jusqu'à disparaître. La bonne humeur de Papa et la patience de Maman se disloquent en même temps que ton langage. le souci et la perplexité dessinent des rides sur leur front, l'inquiétude grignote leur sourire. « (p. 17).
Des passages d'une grande sensibilité décrivant subtilement la grande difficulté d'être « père », de transmettre la Vie, lorsque sa propre enfance a été foudroyée… ; l'auteure a le talent d'aborder des sujets universels, difficiles et douloureux : la complexe responsabilité de transmettre la vie, la normalité, la folie, la maladie neurologique d'une très jeune enfant, la résilience, la difficulté de vivre, lorsque les bases de l'enfance ont été semées de cataclysmes, de brisures.
Un texte ras-de-marée , magnifique, à lire toutefois lorsque le moral est solide…Le style est fluide, musical, faussement léger, les thèmes évoqués tout le long du récit entoure un frère, un homme qui a fui toute sa vie, à cause d'une tragédie familiale ayant brisé son enfance…La seule issue trouvée fut la fuite, la prise de distance, la construction d'une carapace. Tout le long du récit, on ne peut s'empêcher d'avoir la gorge serrée.

« Certains silences sont des abus de pouvoir.”
« Toute ma vie j'ai fui. Je confesse que j'ai été un fugitif exemplaire. Un champion de la clé des champs, de la poudre d'escampette, de la navigation entre deux eaux. Un as de la dérobade, du sauve-qui-peut, de pas-vu-pas-pris.
Chaque fois que j'ai trop aimé, j'ai fui.
Chaque fois que j'ai eu trop mal ou que la rage m'a envahi.
Chaque fois que j'ai eu peur. (p. 153)”

Je ne voudrais pas omettre de signaler la très élégante harmonie de la couverture: deux silhouettes enfantines (une grande et une petite) se reflétant dans l'eau.

****** Grâce à l'auteure, j'ai fait la connaissance d'un sculpteur étonnant, Gérald Ducimetière, qui prendra en 1994 un autre patronyme et prénom : John Aldus. Sculptures incroyablement réalistes, silhouettes qui se fondent dans le décor de la ville.
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Difficile d'écrire sur une auteure que j'aime beaucoup pour sa poésie, la puissance de ses mots, sa douceur, sensibilité, l'émotion qui me saisit lorsque je la lis. C'est extrêmement beau, délicat, maitrisé dans l'écriture, puissant et cette facilité qu'elle a à venir me chercher dans mon intimité, à m'émouvoir. C'est beau oui. Fragilement et intimement beau.
De Silvia Härri, j'ai succombé à son récit « Nouaison ». Une prose remplie de tendresse, de ce qui est nous, de cet enfant que l'on désire tant et qui vient nous happer en plein ventre chamboulant tant de chose en nous. Une poésie merveilleuse tout en silence et en puissance.
Puis ce fut un recueil poétique « Mention fragile ». Délitement de notre peau et observation des petits riens qui nous basculent, déménagent, nous font craquer des allumettes dans la nuit, prendre des coups de coeur et accrocher la lumière. Intimement beau. Tendrement délicat.
Et puis son premier roman. « Je suis mort un soir d'été ». Ce premier roman, que j'attendais tant, redoutais, tellement l'écriture de Silvia Härri est d'une beauté ensorcelante.

« Je suis mort un soir d'été ». Comme une petite mort oui, de l'ordre de celle qui vient nous achever à petit feu, nous empêche d'avancer la tête haute, le corps moite par une chaleur étouffante. Une petite mort qui nous cueille dès l'enfance, l'âge où nous courrons encore derrière le ballon rouge, l'âge auquel nous croyons aux rêves, aux contes que nous inventons le soir à notre petite soeur, l'âge des rires en cascades, des joies et des promesses à venir.
L'âge où un soir d'été, il nous sera désormais impossible de grandir normalement, l'âge où nous perdons notre mur-porteur, canne-tuteur, celle qui aide à pousser droit et éteint un par un les illusions, les marches et les rêves féeriques de l'enfance.
«Je suis mort un soir d'été ». Un homme, architecte de renom, qui n'arrive pas à renoncer à celle qu'il a dû abandonner, à l'âge de six ans et demi, dans un lieu ressemblant à un asile psychiatrique d'une ère révolue, un mouroir. Une soeur, corolle de pétales blanches, pistil de vie, qui du jour au lendemain, n'a plus réussi à rattraper le ballon qu'il lui lançait, à courir avec lui dans les allées du jardin. Margherita qui a parsemé sans le savoir sa vie, d'un vide, de fuites, de silences, de cicatrices, de peurs. Un homme qui tente de rester ce grand frère malgré les séparations, les éloignements, la distance, les renoncements, le silence intoxiquant, les mensonges. Un homme qui a perdu celle qui faisait de lui un grand frère, un soir d'été.
« Je suis mort un soir d'été ». Sublime cri dans le silence, sublimes mots déposés, sublime amour pour une soeur qui n'a plus couru derrière le ballon rouge, a fait de sa vie, un vide béant, une pieuvre aux tentacules étouffantes, un regard absent, des mains déposées sur des genoux sans espoirs de caresser, se tendre vers lui. Un soir d'été, comme cette chaleur collant à la peau et qui nous assomme, nous poisse, nous empêche d'avancer, de relever la tête et de sourire aux étoiles qui naissent dans la nuit.

« Je suis mort un soir d'été ». Un impossible lien, une quête, un silence noué. Cet impossibilité à parler d'elle, d'expliquer la vérité, l'handicap, la folie, les fuites et les mensonges entourant cette soeur à jamais enfermée entre des murs de silences et de hontes. L'absence éternelle, celle qui éboule, manque, empêche de grandir droit, de courir après les ballons rouges.

La suite : http://lecarrejaune.canalblog.com/archives/2016/09/21/34350211.html
Lien : http://lecarrejaune.canalblo..
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Livre touchant, poétique et prenant, traitant de la maladie mentale de la soeur du narrateur, de sa survenue, de son évolution, des stratégies utilisées par les proches jusqu'à sa mort et surtout du grand bouleversement familial. Jamais le livre le bascule dans le pathos ou le larmoyant, il est au contraire juste, proche des émotions, du ressenti, met nos sens en alerte et telle une madeleine de Proust, nous replonge dans notre enfance.
Le narrateur a choisit la fuite et le mensonge, seulement l'heure de payer l'addition a sonné, il va devoir faire face et peut être changer de stratégie.
J'ai eu un immense plaisir à lire ce roman, à me laisser transporter par cette histoire même si au départ le sujet ne m'attirait pas, il est traité avec brio. le temps de la lecture nous sommes transportés en Italie dans les années 70, baignés de soleil, du parfum des glaces et des émotions suscitées par les personnages.
Ce roman fait partie des finalistes du prix des lecteurs de Lausanne, je lui souhaite de le décrocher.
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Un superbe moment de lecture. Merci pour cet émouvant et beau récit dans lequel on se laisse glisser. Pietro est un homme émouvant qui a su être acteur de sa vie en osant créer le chemin qu'il s'est souhaité. En lisant le cheminement de Pietro, je pense à ce proverbe : "ne laisse jamais personne juger ta vie et tes choix, car personne n'a traversé tes douleurs, tes joies et encore moins tes peines".
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Magnifique, subtil... étourdissant.



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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Je l'aime pour cela, Mathilde. Parce qu'elle parle avec ses mains, ses yeux et tout son corps beaucoup plus qu'avec de grands discours. Parce qu'elle pose peu de questions et se contente de mes pauvres réponses, quand bien même elle devine que mon jardin secret est peuplé de fantômes. Parce qu'elle est capable d'oublier un rendez-vous si elle est en train de sculpter, parce que ses doigts peuvent arrêter le temps, le retenir dans sa course alors que pour d'autres il file à toute allure. Soudain il y a urgence, urgence vitale de créer. C'est pour lutter contre la mort, elle explique. (p. 108)
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Je ne saurais dire combien de temps cela t’a pris de passer de la planète des mots à celle de leur absence. (…) Tu parles de moins en moins, tu ne poses plus de questions (…) Les paroles se raréfient jusqu’à disparaître. La bonne humeur de Papa et la patience de Maman se disloquent en même temps que ton langage. Le souci et la perplexité dessinent des rides sur leur front, l’inquiétude grignote leur sourire. (p. 17)
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Je peux te parler de politique, du cours de la bourse, donner un cours ex cathedra d'architecture devant cent cinquante étudiants de l'institut, exprimer un avis argumenté sur à peu près n'importe quel sujet.
Ces mots-là, je les connais aussi bien qu'eux me connaissent. Ils me protègent et recouvrent les autres, ceux que je veux pas dire, ceux qui conduisent à la limite, limite de quoi ? , Je ne sais, trop dangereux. (...)
Au fond, mon langage est aussi bancal que le tien. Nous ne sommes sans doute pas frère et soeur pour rien. (p; 151)
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Je ne restais pas longtemps. Je m'asseyais sur le lit à sangles. Je te racontais ma journée d'école (...) ça ne tenait pas longtemps , les mots. C'était un ciment inutile. Je préférais me taire et rester juste à côté de toi, me demandant pourquoi on continuait à te déguiser avec cette camisole ridicule, pourquoi on te bourrait de médicaments qui ne servaient à rien d'autre qu'à te rendre encore plus lointaine et indéchiffrable. (p. 36)
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Toute ma vie j'ai fui. Je confesse que j'ai été un fugitif exemplaire. Un champion de la clé des champs, de la poudre d'escampette, de la navigation entre deux eaux. Un as de la dérobade, du sauve-qui-peut, de pas-vu-pas-pris.
Chaque fois que j'ai trop aimé, j'ai fui.
Chaque fois que j'ai eu trop mal ou que la rage m'a envahi.
Chaque fois que j'ai eu peur. (p. 153)
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