Souvent, je lis la quatrième de couverture et une ou deux chroniques choisies parmi les amis.
Mais rien ne vaut la saisie du livre, la lecture de l'incipit : “J'avais fait remplir un flacon d'acide chlorhydrique, et je le gardais sur moi en permanence avec l'idée de le jeter un jour à la gueule de quelqu'un.”
Le titre ne pouvait laisser indifférent, je n'étais pas tout à fait vierge pour “
Faire l'amour” car je me souvenais d'être passé par “
La salle de bain” de cet auteur, il y a quelques dizaines d'années.
C'est amusant parfois comme on trouve chez un auteur une écriture, un style dont on se sent proche en se disant : “tiens, j'aurai pu écrire ça ! ”
Oui,
Jean-Philippe Toussaint use des paradoxes entre l'amour et les réflexions acides sur la rupture.
Oui, le côté un peu désabusé du narrateur m'a parlé.
Et pourtant…
Je ne peux pas dire que le romancier belge soigne le sens de la narration. Après nous avoir intrigués à propos de sa rupture avec Marie, il nous emmène à Kyoto pour un séjour ennuyeux où il ne se passe rien : “Les heures étaient vides, lentes et lourdes, le temps semblait s'être arrêté, il ne passait plus rien dans ma vie.”
J'ai pensé un peu au film “Lost in translation” ; décidément, les hôtels de Tokyo attirent la langueur et la vie en peignoir/chaussettes !
Ce livre m'a laissé sur mon quant-à-soi, le sentiment d'une imposture au style parfois alambiqué comme dans cette phrase : “... scène qui restait en quelque sorte prisonnière d'une gangue d'indécidabilité des infinies possibilités de l'art et de la vie, mais qui, de simple éventualité - même si c'était la pire - pouvait devenir la réalité d'un instant.”... J'entrave que t'chi !
Loin de servir le livre, le commentaire de
Laurent Demoulin de fin d'ouvrage fait de “
Faire l'amour” une pratique hautement intellectuelle et n'apporte qu'interrogations sur cet objet : “Un roman polysémique, pluriel, avant-gardiste, poétique et métaphysique.”
Je ne peux pas mettre à l'index ce roman et le jeter à la poubelle comme Rodin-Marcel, car il a touché une fibre en moi, même si je ne sais pas laquelle !