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Pour tout savoir sur L'affiche rouge : un très court essai extrêmement documenté par l'historienne Annette Wieviorka.
Je vous invite également à écouter toujours et encore la chanson interprétée par Léo Ferré ou Catherine Sauvage ou Catherine Ribeiro.
Restez et restons curieux, apprenons tous les jours pour enrichir notre culture générale.
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La collection LIBELLE des éditions du Seuil est toujours aussi passionnante et riche en termes de débat, de réflexion. C'est Annette Wieviorka qui signe cet opuscule, "Anatomie de l'affiche rouge", qui défend une idée explicitée dans le journal le Monde par de nombreux signataires de cette tribune. En effet, le 21 février 2024, Missak Manouchian et son épouse Mélinee, sont entrés au Panthéon. C'est, bien évidemment, quelque chose qui nous réunit tous et toutes. Mais pour Annette Wieviorka et d'autres intellectuels, il aurait fallut célébrer également les 21 autres jeunes gens, tous résistants étrangers, qui furent fusillés en même temps que Missak Manouchian. Pour quelles sombres raisons cette chape de plomb. Que dire aussi du silence sur l'exécution de Olga Bancic, guillotinée en Allemagne le 10 mai 1944. Pourquoi ne pas rendre hommage à tous ces braves ? Pourquoi seulement Missak et Mélinee ? La question se pose légitimement que l'on soit historien(ne)s ou citoyen(ne). Un court texte qui interpelle, fait réfléchir au "devoir d'histoire", terme que je trouve plus juste que le trop galvaudé "devoir de mémoire." Tout ceci fait vivre le débat démocratique sur la construction du récit historique par nos politiques. Ces derniers n'ont pas toujours la pleine mesure du sens à donner à une leçon d'histoire. Libre à chacun(e) d'y puiser des éléments pour nourrir son avis sur la question.
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Anatomie de l'Affiche Rouge permet à l'historienne Annette Wierviorka d'analyser l'Affiche Rouge et la propagande nazie. Elle explicite, aussi, son choix de signer la lettre ouverte publiée dans le Monde. (24 novembre 2023).

L'article dénonçait le fait que Mélina et Missak Manouchian entraient, seuls, au Panthéon. Alors qu'ils étaient vingt et un autres à être fusillés le même jour, le 21 février 1944, au Mont-Valérien. En plus, la seule femme du groupe, Olga Bancic, condamnée à mort, fut, elle, guillotinée le 10 mai en Allemagne.

Cette tribune dans le journal fut signée par des anciens descendants de résistants étrangers, membres des FTP-MOI (Francs-tireurs et partisans – main-d'oeuvre immigrée), et des intellectuels. Je suis effarée que dans les différents reportages ou articles, ces jours-ci, MOI soit gommé.

Ils sont venus nombreux entre les deux guerres, fuyant souvent l'arbitraire de leur pays. Ces hommes et ces femmes se sont engagés pour la libération de la France. Ils représentent toute la diversité française. Et, encore, on « oublie » de les panthéoniser ! Comme les harkis ! Comme les tirailleurs sénégalais !

Légende ou histoire
Annette Wieviorka a écrit l'essai, Ils étaient juifs, résistants, communistes, paru en 1986 et réédité depuis, qui fait autorité. Historienne spécialiste de la Shoah et de l'histoire des juifs au XXè siècle, elle a reçu de nombreux prix, distinguant son travail de précision et de rigueur.

Dans Anatomie de l'Affiche Rouge, Annette Wieviorka raconte aussi la véritable histoire de cette affiche, complétée par un tract et un fascicule, qui étaient distribués largement. En détaillant la propagande nazie, l'expression « armée du crime » est explicitée. Elle explique aussi la fabrication du « mythe » Manouchian.

L'objectif de la propagande est de pousser à la vindicte populaire, les dix personnes dont les portraits, sombres, sont exposés. Les nazis falsifient leur histoire et même l'inventent. Qu'importe la véracité, la propagande nazie prône le mensonge pour retourner l'opinion. Alors, utiliser cette affiche comme une illustration de leur combat est, pour moi, une nouvelle violence infligée à leurs dépouilles !

Annette Wieviorka précise comment la chanson de Léo Ferré, en reprenant le poème d'Aragon, strophes pour se souvenir, a sorti de l'oubli le sacrifice de ses hommes. Et, on ne peut oublier l'interprétation d'Arthur Teboul qui l'a modernisée. Seulement, c'est la légende construite par le poète que l'on retient et non, la véritable histoire.

Bref, un tout petit essai à mettre entre toutes les mains pour retrouver la véritable histoire de ces hommes et non le roman national qu'on veut qu'on retienne !
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Anette Wieviorka livre ce court essai "à propos de l'Affiche rouge" à l'occasion de la panthéonisation ce mois de février 2024 du couple Manouchian. Il ne s'agit pas de remettre en cause leur présence au Panthéon, elle ne souhaite pas polémiquer sur le bien-fondé de cet hommage national. Mais elle cherche à démontrer que mettre l'accent sur un couple contribue à héroïser et "glamouriser" deux personnes, au détriment de tous les autres : le poète, l'amant, l'orphelin arménien survivant du génocide et venu en France par amour pour les écrivains, et "sa Mélinée, son amour, son orpheline" pour citer les "Strophes pour se souvenir" d'Aragon, où certains vers sont une déclaration d'amour bouleversante, par-delà la mort.
Un groupe, le groupe Manouchian - qui n'en était d'ailleurs pas un au sens strict, les différents résistants ne travaillaient pas tous ensemble, mais par petits groupes spéciaux et spécialisés indépendants - est ainsi réduits à deux figures, alors qu'ils étaient "vingt-et-trois quand les fusils fleurirent", vingt-deux en réalité puisque la seule femme, Olga Bancic, a été guillotinée.
Elle cherche donc à montrer toute la diversité de ces résistants étrangers membres de la MOI, la Main-d'Oeuvre Immigrée : hongrois, polonais, espagnols, italiens... qui ont néanmoins pour point commun d'être presque tous juifs - hormis Missak Manouchian, ce qui est l'argument principal de détestation des Nazis. Ainsi, un véritable "casting" est organisé par les services SS pour composer la fameuse affiche rouge, les brochures et les tracts qui l'accompagnent. Il s'agit de mettre en avant les figures qui correspondent le plus à la conception nazie de "dégénération de la race", les noms qui "sonnent" les plus étrangers, les chiffres des attentats étant de plus complétement faux. Il faut des visages "noirs de barbe et de nuit hirsutes, menaçant".
Anette Wievorka retrace donc les figures de ces résistants - et de cette résistante, sans s'attarder sur le couple Manouchian, qui est déjà au centre de nombreux ouvrages historiques. Et, surtout, ce qui m'a particulièrement intéressée, elle insiste sur la construction mémorielle. On ne devient pas un héros de la mémoire nationale comme ça, c'est tout un processus qui se construit à travers l'histoire. Elle présente donc l'histoire même du poème d'Aragon, commandé par l'Humanité, le grand journal communiste, dans le contexte particulier de la mort de Staline. L'identité juive est dissimulée, le ton est certes patriotique, mais aussi un poème d'amour, et une réflexion sur le sens et la fonction même de la poésie. C'est ensuite la chanson qui va mettre en avant les membres de l'Affiche rouge - le titre de Léo Ferré chantant le poème d'Aragon s'est d'ailleurs imposé, jusqu'à ce que l'affiche elle-même devienne un matériel historique, présent notamment dans les manuels de l'enseignement secondaire.
La mémoire - la légende, le mythe, l'histoire d'amour - a donc surpassé l'histoire, et Anette Wieviorka essaye de lui rendre sa place.
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L'affiche rouge et ses portraits "noirs de nuit, hirsutes, menaçants" est désormais connue de tous, surtout depuis qu'Emmanuel Macron a décidé de faire entrer au Panthéon Missak et Mélinée Manouchian. Mais pourquoi seulement eux ?
Annette Wieviorka accomplit ici son travail d'historienne et analyse chaque portrait, chaque mot et chaque image figurant sur cette affiche de propagande nazie, ainsi que le devenir de ce document. Elle retrace les courtes biographies de ces très jeunes hommes morts pour la France et la postérité littéraire et artistiques qu'ils ont pu avoir.
Elle sort ainsi de l'ombre les autres membres du groupe FTP-MOI (francs-tireurs et partisans main d'oeuvre immigrée) et montre comment s'est construit le mythe d'un "groupe Manouchian" qui n'a jamais existé sous ce nom.
Une lecture claire, efficace et un texte qui atteint pleinement son but d' "établir une leçon d'histoire".
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J'ai regardé la panthéonisation de Missak Manouchian et de son épouse. Ses compagnons ont été cités, certains racontés... Annette Wieviorka dénonce dans ce livre la mise en lumière d'un couple qui va laisser dans l'ombre ceux moins "glamour" parmi les résistants étrangers morts pour la France. Elle revient sur la composition de l'affiche et sur la volonté profondément antisémite qui y a présidée... volonté quelque peu écartée dans celle du président de mettre à l'honneur le couple Manouchian, survivant d'un premier génocide.
Annette Wieviorka relance en historienne rigoureuse l'éternel débat de la mémoire et de l'histoire. A trop vouloir la simplifier, puisque notre jeunesse ne retient plus grand-chose, trop fascinée par ses écrans, on risque de lui faire perdre son sens.
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Je reste très sceptique sur les motivations et les objectifs de l'écriture de cet opus qui cherche avec son titre, un clin d'oeil pour le moins déplacé avec l'actualité cinématographique.
Ce n'est pas là le moindre défaut de cette publication.
Cette anatomie respire surtout une opposition de principe à l'entrée au Panthéon de Missak Manouchian.
On peut poser la question du pourquoi cette démarche.
Annette Wievioka s'insurge parce que Mélinée entre au Panthéon aux côtés de son mari. Elle a des mots glaçants sur le « couple glamour » mis en avant dans l'actualité et des propos blessants sur Mélinée, mineure en résistance à ses yeux. Que ne s'est t-elle révoltée quand Antoine, le mari de Simone Weil entrait au Panthéon aux cotés de Simone. Quelle logique y a t-il et de quel droit peut -on séparer les restes des corps morts de ceux qui ont vécu ensemble?
Annette Wieviorka s'insurge car les restes des 21 compagnons de Manouchian fusillés avec lui ce jour de février 1944, et ceux d'Olga Bancic, décapitée (et non guillotinée comme elle le dit) en Allemagne en mai 44, n'entrent pas physiquement au Panthéon.
Annette Wievioka s'insurge sur le peu d'actions armée à mettre à l'actif de Missak Manouchian, elle évoque rapidement l'action contre Ritter, qui lui parait, finalement, bien peu de chose.
Depuis quand mesure t-on l'héroïsme des résistants au nombre de tués qu'ils ont pu faire dans les rangs allemands. Elle sait pourtant comme historienne, que ces actions étaient périlleuses et qu'il y en eu peu….
Jean Moulin ne mériterait donc pas les honneurs qui lui ont été rendus.
Non, Il s'agit bien de se situer sur la question du sens. Ce qu'elle ne fait pas.
Le sens de la panthéonisation de Manouchian est universel.
Manouchian, apatride, communiste, résistant, à la tête des FTP-MOI de Paris au moment de la troisième filature qui conduit à l'arrestation des 23. Manouchian comme un symbole.
Un symbole qui n'a pas échappé à Aragon, à Ferré, dont les écrits et la musique sont venus le souligner.
Un symbole fort aujourd'hui, pour les citoyens attachés aux droits humains à l'heure de la loi récente contre l'immigration.
Avec Manouchian, il s'agit bien de l'entrée au Panthéon de la résistance communiste, armée, internationaliste, à égalité de droits avec ceux de la résistance qui n'étaient rien de tout cela.
Ils sont bien 23 à y entrer pour moi le mercredi 22 février 1944.
Et au delà ils sont des millions, tous ceux qui se battent pour la dignité humaine, qui verront dans ce symbole la légitimité de leur lutte..
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L'historienne Annette Wieviorka revient sur les conditions dans lesquelles l'Affiche rouge a été conçue et diffusée. Elle rappelle ce que fut le combat des FTP-MOI, et comment 23 de ceux-ci furent arrêtés au cours d'une même traque. Pourquoi 10 d'entre eux, dont 7 Juif, furent-ils « affichés » et pourquoi ceux-là ?
Elle introduit son propos par la controverse liée à la décision de panthéoniser l'Arménien Manouchian seul (avec sa Mélinée) aux dépends d'un groupe d'origines diverses où les Juifs étaient majoritaires. C'est tout le groupe dit-elle qu'il fallait panthéoniser : "Ce groupe de résistants ne se résume pas à Manouchian (…) Et le symbole qu'il représente à juste titre pour nos compatriotes de la communauté arménienne est indissociable de toutes les autres nationalités et communautés qui ont partagé son combat et son sacrifice".
Le débat peut sembler secondaire, mais l'éclairage qui nous est donné ici a son intérêt.
À chacun de juger si la cérémonie de panthéonisation du 21 février avait le caractère universaliste qui s'imposait.
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Ce court essai (46 pages) est une leçon d'histoire, rigoureuse.

La légende de l'Affiche Rouge a été construite à plusieurs reprises.

Par les nazis d'abord, qui ne firent pas figurer tous les résistants mais surtout les juifs, ce qui correspondait à la propagande de l'époque. Choisir parmi les résistants du FTP-MOI ceux qui étaient juifs quitte à qualifier Celestino Alfonso de "juif espagnol"de "ne pas mettre sur l'affiche" le français Rouxel. Attribuer un nombre fantaisiste d'attentat à chacun. Les mettre en scène....Sur les 23 condamnés seuls dix figurent sur l'affiche, 7 juifs sur les dix présents alors qu'ils étaient douze sur les vingt trois fusillés...

Tous étaient FTP-MOI . Missak Manouchian ne remplaça Boris Holban qu'en aout 1943. Officiellement, le "groupe Manouchian" n'a jamais existé sous ce nom, affirme l'auteur....

Annette Wieviorka étudie dans le détail les personnalités de ces combattants du FTP-MOI, loin de la légende ou de la propagande sans éluder la trahison .

Légende de l'Affiche Rouge entretenue par le poème d'Aragon publié dans l'Humanité en 1955 dont elle livre une première version. . En 1959 Léo Ferré le met en musique, reprise par de nombreux artistes jusqu'aux rappeurs  et Feu Chatterton.

Légende portée au cinéma  ici encore des libertés sont prises par rapport à l'histoire.

La panthéonisation a privilégié la légende à la vérité historique, privilégié deux héros à la reconnaissance du collectif

"Le « groupe » est donc devenu un couple, plutôt glamour, les « étrangers » les seuls Arméniens ; les Italiens, Espagnols, Juifs de toutes nationalités et les Français, compagnons de ce combat solidaire, passent au mieux au second plan, deviennent invisibles ou noyés dans la vaste catégorie des « étrangers » privés de noms."

Saine lecture en temps de "réécritures de l'histoire" et de "vérités alternatives"
Lien : https://netsdevoyages.car.bl..
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Annette Wieworka veut ici, en quelques pages, rendre hommage à l'ensemble des membres du groupe de FTP-MOI fusillés ou guillotiné en 1943. Elle rappelle qu'ils etaient 23, que Missak Manouchian ne fut leur chef que 3 mois et que la panthéonisation de Missak et sa compagne Melinée a tendance d'une part à renvoyer dans le silence ou l'oubli tous les autres et d'autre part, à passer sous silence à la fois le caractère profondément antisémite de l'affiche rouge et aussi l'aspect internationaliste prolétarien qui animait ces hommes et cette femme. Elle rappelle, lhistoire de laffiche rouge, sa construction par les nazis mais aussi l'histoire qu'a reconstruit le Parti Communiste autour du groupe Manouchian en oubliant le caractère antisémite de cette affiche et même les autres combattants des FTP-MOI. Une légende à laquelle a contribué le poème d'Aragon que Léo Ferré a mis en chanson.
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